Festive et engagée
La manifestation d’hier a pris la forme d’une gigantesque vague rugissante et riante, engagée et enragée.
C’est entre ces deux rives, enthousiasme et revendication, qu’a coulé ce torrent humain de la Place des Arts jusqu’au parc La Fontaine. Sous la surface festive où cris et slogans montaient et éclataient comme des bulles, on sentait sourdre du fond une colère palpable.
« Je n’en peux plus de voir nos enfants se faire frapper au lieu que le gouvernement discute », affirme Suzanne Bilodeau, sous sa bannière des « Mères en colère et solidaires ».
« Je n’ai pas élevé mes enfants à coups de bâton », reprend-elle.
Menez Chapleau et Geneviève Lechasseur marchaient avec une pancarte les identifiant comme des « parents désobéissants » à la loi 78. Parents d’étudiants ? « Oui, d’une petite fille en 6e année », répond Geneviève en souriant.
« C’est pour elle que nous sommes ici », ajoute-t-elle.
Les vieux
Les parents n’avaient pas le monopole du mécontentement. Claude et ses comparses aux têtes blanches se démarquaient avec leur banderole « Aînés contre la hausse ». Leur passage était chaudement salué par les autres manifestants.
« Nous sommes des gens comme beaucoup d’autres, en colère contre le gouvernement et son traitement envers les jeunes, l’éducation et la population », confie l’homme de 63 ans.
« C’est un gouvernement comme on n’en a pas vu depuis Duplessis ! », lance-t-il, souvenirs à l’appui.
Selon lui, le problème à la source de la crise étudiante n’est pas intergénérationnel.
« Il y a autant des étudiants contre la hausse que des gens de mon âge réceptifs à la cause », dit Claude.
Humour
Plusieurs ont trouvé le moyen de canaliser leur exaspération du gouvernement par l’humour et l’absurde. Ainsi, Nady, 21 ans et étudiant au Cégep André-Laurendeau, défilait dans son costume moulant de Spider-Man.
Il se justifie en avançant que comme lui, Peter Parker, l’alter ego de l’homme-araignée est étudiant et est touché par la hausse. Un autre, déguisé en policier aux allures clownesques, « poivrait » les manifestants de son eau en atomiseur.
L’ambiance festive était imperméable aux caprices de la météo, qui a ouvert une petite fenêtre de beau temps avant de la refermer à la toute fin. Quand l’averse est tombée, les gens criaient : « La nature, avec nous ! »