Terrassé au milieu de la nuit après avoir obtenu son congé de l’hôpital
Un jeune homme dans la trentaine est décédé à son domicile de Québec, dans la nuit de lundi à mardi, après avoir obtenu son congé de l’urgence de l’hôpital Chauveau quelques heures plus tôt.
Totalement bouleversés, les proches de Dominic Cantin ne parvenaient pas, mardi, à accepter cette perte aussi soudaine qu’incompréhensible.
En colère, la sœur de la victime n’hésite pas à blâmer le centre hospitalier, dont le service d’urgence ferme ses portes à 22h.
«Mon frère s’est présenté à l’urgence à 21h, lundi, parce qu’il avait des maux de tête intenses et de la fièvre. Il avait pris des Advil pour calmer la douleur, mais cela ne passait pas.»
«On l’a retourné chez lui en disant que l’urgence fermait à 22h. Une vie aurait pu être sauvée. Je ne veux pas que cela reste sous silence», raconte encore sous le choc Mélanie Cantin.
Son frère de 34 ans avait subi un traumatisme crânien, en 1997. Le jeune homme avait alors été opéré à l’hôpital de l’Enfant-Jésus pour un caillot au cerveau, mais depuis, il allait bien, affirme-t-elle.
Réveil brutal
«De retour chez lui, dans le secteur Val-Bélair, Dominic s’est couché sur le divan. Sa conjointe est allée se coucher et il l’a rejointe un peu plus tard. Dans la nuit, elle s’est réveillée, sentant que la couverture glissait en direction de son conjoint», poursuit sa sœur.
La jeune femme a aussitôt constaté que son compagnon était tombé du lit. Il gisait par terre, sans vie. «Ma belle-sœur criait son nom, mais Dominic était déjà décédé. Elle a appelé les ambulanciers qui l’ont conduit à l’hôpital Laval (IUCPQ)», relate en pleurs Mme Cantin.
«On ouvre des cliniques vétérinaires dans le milieu de la nuit pour soigner un animal. Ce n’est pas fort de fermer une urgence à 22h», dénonce-t-elle.
Père d’une fillette
Employé chez Bell, Dominic Cantin avait une fillette de quatre ans. Sa conjointe endeuillée est en plein désarroi.
«Ma belle-sœur est traumatisée. Mon frère n’était pas un plaignard. S’il s’est présenté à l’urgence, c’est que la douleur était vive. Cela ne restera pas comme cela», lance la jeune femme.
Elle a eu la difficile tâche, mardi matin, d’aller annoncer la triste nouvelle à leur mère (leur père est décédé il y a 8 ans). «Ma mère est désemparée. Comment annonce-t-on à une mère qu’elle a perdu un de ses enfants ? Dominic était un père exemplaire. Il avait toute la vie devant lui», se désole Mélanie Cantin.
La jeune femme est entrée en contact, mardi matin, avec la direction du CSSS de Québec-Nord. «Le directeur m’a dit: je ne comprends pas ce qui s’est passé. Aussitôt que j’ai des nouvelles, je vous en donne», souligne-t-elle.
Enquête en cours à l’hôpital Chauveau
Une enquête est en cours, à l’hôpital Chauveau, afin de déterminer si Dominic Cantin a reçu les soins appropriés à son état de santé, lundi soir, à l’urgence.
«Nous avons été mis au courant de la situation. Pour des raisons de confidentialité, on ne peut pas commenter davantage ce dossier», déclare succinctement le porte-parole du CSSS de Québec-Nord, Francis Audet.
Un médecin de garde est présent chaque jour à l’urgence de l’hôpital Chauveau entre 8h et 22h. Il peut y avoir deux médecins lorsqu’il y a des périodes plus achalandées.
«Après 22h, si des patients sont encore à l’urgence, par exemple en attente d’un transfert vers un autre centre, l’équipe demeure sur place, et ce, jusqu’au moment où tous les patients ont quitté», précise M. Audet.
Si un malade nécessite de rester sous observation, après 22h, il sera transféré dans un autre hôpital, assure-t-il.
Pénurie de médecins
L’urgence de l’hôpital Chauveau fonctionne de jour et de soir seulement, depuis avril 2009. Le CSSS de Québec-Nord a convenu de cet horaire restreint après avoir tenté en vain, pendant plusieurs mois, de recruter de nouveaux médecins pour combler toutes les périodes de garde.
Après la transformation de l’hôpital en centre d’hébergement, en 1996, le gouvernement a décidé d’y maintenir des services d’urgence, afin de continuer à desservir la population de la couronne nord de Québec.
Pétition
En décembre 2010, les résidents du secteur ont demandé la réouverture de l’urgence, la nuit. Une pétition de plus de 4000 signatures avait alors été remise au ministre de la Santé Yves Bolduc.
L’hôpital le plus près est situé à une quinzaine de kilomètres du secteur Loretteville. Selon le CSSS, l’urgence de l’hôpital enregistre environ environ 30 000 visites par année.
