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Le Québec | Une histoire de famille

Les Couture

Torturé mais silencieux...

Les Couture

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Pendant tout le 17e siècle, les habitants des régions de Montréal et de Trois-Rivières subissaient régulièrement des attaques iroquoises. Leurs raids étaient redoutés, car les traitements qu’ils infligaient à leurs ennemis inspiraient la frayeur... Et pour cause.

Pendant tout le 17e siècle, les habitants des régions de Montréal et de Trois-Rivières subissaient régulièrement des attaques iroquoises. Leurs raids étaient redoutés, car les traitements qu’ils infligaient à leurs ennemis inspiraient la frayeur... Et pour cause.

Deux Couture ont immigré en Nouvelle-France au 17e siècle. Née en 1641, Anne Couture arrive dans la colonie en 1665 en tant que fille du roi. Contrairement à la plupart de ces femmes, elle n’est pas originaire de Paris, mais de Chartres et ne sait ni lire ni écrire. L’année de son arrivée, elle épouse Jean Moreau dit Lagrange, adopte le nom de son mari et s’installe à l’île d’Orléans. Elle laissera huit enfants et s’éteindra le 13_mai 1715.

Les Couture du Québec sont les descendants d’un prénommé Guillaume (1618-1701), originaire de Rouen, une ville du nord-ouest de la France. S’il décide d’immigrer en Nouvelle-France, c’est apparemment pour des raisons religieuses, mêm­e s’il ne deviendra jamai­s prêtre. Au printemps 1640, il est embauché comme domes­tique chez les religieux de la Compagnie de Jésus – les Jésuites. L’année suivante, il les accompagne au pays des Hurons, une nation amérindienne alliée des Français.

TORTURÉ...

Le 1er août 1642, avec une quarantaine d’autres personnes, il quitte le petit poste des Trois-Rivières pour une nouvelle expédition. Le convoi remonte le fleuve et les hommes décident de passer la nuit sur la rive-sud du lac Saint-Louis. Le lendemain, des Iroquois lancent une attaque. Guillaume Couture se bat courageusement et abat d’un coup de feu le chef de la troupe ennemie. Seul et isolé, il est cependant fait prisonnier. Les jours qui vont suivre seront les plus terri­bles de sa vie...

L’ancêtre des Couture et tous les autres captifs marchent dénudés pendant de longues heures. Fiers de leurs proies, les guerriers les exhibent dans plusieurs villages. Les uns après les autres, ils défilent entre deux rangées d’Iroquois qui les fouettent et les frappent. Une humiliation difficile à encaisser, mais qui est bien moins pénible que les séances de torture qui vont suivre...

Selon l’anthropologue Roland Viau, les rituels de torture pouvaient durer jusqu’à trois jours. Tous les villageois y prenaient part, même les femmes et les enfants. On plaçait le captif au-dessus d’un feu. Comme ce fut le cas pour Guillaume Couture, on commençait par les mains. On arrachait d’abord les ongles et on sciait ensuite certains doigts à l’aide d’un coquillage. Parfois, on trempait le moignon du doigt coupé dans le fourneau d’une pipe allumée.

Ce face à face avec la souffrance et la mort fascinait les Iroquois, qui s’attendaient à ce que le captif endure cette torture en silence. Ceux qui criaient ou imploraient de l’aide étaient méprisés et tués rapidement.

...ET ADOPTÉ

L’ancêtre des Couture auraient subi ces horribles sévices avec une dignité étonnante. Son courage aurait beaucoup impressionné les Iroquois présents. Toujours vivant après sa maca­bre séance de torture, il est adopté par l’une des veuves d’un clan. Contrairement à d’autres captifs, il ne prend pas la fuite. Il adopte même une attitude pacifi­que, apprend la langue et les mœurs iroquoises.

Selon Roland Viau, ces adoptions étaient fréquentes. Décimés par les mala­dies transmises par les Européens et par les guerres intertribales, les Iroquois comptaient sur ces captifs pour remplacer les disparus. Les prisonniers n’étaient donc pas tous éliminés ou rédui­ts à l’esclavage. Plusieurs, comme Guillaume Couture, devenaient des membres à part entière de la communauté.

Il vécut donc parmi les Iroquois pendant au moins trois ans et devint même leur interprète lors des négociations d’une paix provisoire en 1645. Libéré l’année suivante, il s’installa à Pointe-Lévy, où son épouse Anne Esmard et lui auront neuf enfants. Paysan et menuisier, il s’éteint en 1701, l’année de la Grande paix avec les Iroquois.


(Roland Viau, Enfants du néant et mangeurs d’âme, Boréal, 1997)

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