Est-on moins heureux en hiver ?
« Maudit qu’il fait froid dans ce pays ! » « Ah, qu’on serait heureux dans le Sud ! » Au creux de cet hiver particulièrement rigoureux, les réseaux sociaux regorgent de plaintes. Faut-il mettre son bonheur sur la glace ?
«Nous, on est heureux en hiver. Le climat n’a pas été un facteur de départ du Québec, au contraire, il serait même pour nous un facteur de retour.»
Élise Gaste et Germain Maes, un couple de jeunes Français, cultivent le contraste climatique. Après avoir vécu huit mois au Québec, ils se sont installés sous le soleil de La Réunion. Constat: pour eux, le bonheur peut être polaire aussi bien que tropical.
«Au Québec nous n’avons pas souffert de l’hiver, au contraire.» Pour Élise, «il semble plus facile de se réchauffer que de se rafraîchir».
Pierre Côté, porte-parole de l’organisme L’Indice relatif de bonheur pense que Élise et Germain ont la bonne approche pour cultiver le bonheur sous nos climats. «La seule façon d’être heureux dans le froid, c’est de s’ouvrir à l’hiver, de l’accepter, de l’embrasser». Et d’aller dehors.
Une enquête menée par son organisme montre que l’indice de bonheur des Québécois est plus bas d’octobre à janvier et plus haut pendant les mois d’été. Cependant, cette variation est assez minime (entre deux et trois points). Une autre enquête de l’IRB (2010) montre que seuls 16 % des interrogés disent préférer l’hiver.
Catherine Sweeney, dentiste à la Baie-James, compte parmi ceux qui s’adaptent bien à l’hiver. Elle a beau jurer contre son auto qui ne démarre pas par grand froid, elle ne troquerait pas sa situation pour un poste sous les tropiques: «Il y a quelque chose de grand, comme un défi personnel à affronter un tel climat».
S’il n’y a pas de profil type de l’individu qui s’adapte bien à l’hiver, Pierre Côté remarque que les gens plus âgés résistent mieux au climat rigoureux.
Pas assumé
Pierre Côté relève ce paradoxe: «On est un pays nordique et on ne l’assume pas». Beaucoup moins que les habitants des pays scandinaves. Et moins on accepte une situation, moins on est heureux.
Cette relation amour-haine des Québécois pour l’hiver, le météorologue Pascal Yacouvakis l’a constatée bien des fois: «On chiale contre l’hiver, mais s’il n’y a pas de neige à Noël, on crie: où est la neige?»
Lui-même trouve son bonheur à défier les éléments et à marcher dans les rues désertes de Montréal: «L’hiver, tout est calme, la lumière est souvent magnifique».