Kanasuta
Le rapport Coulombe 10 ans plus tard
Desjardins

Par trois fois depuis 2002, L’Action boréale a réussi à convaincre les compagnies forestières de se retirer du territoire Kanasuta, un paradis naturel – tout le monde en convient – situé à l’ouest de Rouyn-Noranda et jouxtant la frontière ontarienne. «Au boute du boute» de la route 117. Des lacs et des rivières à profusion, des montagnes, un lieu mythique habité par les Algonquins depuis plus de 8000 ans. Les eaux s’y séparent pour aller soit vers le Saint-Laurent, soit vers la baie James. Leur autoroute 20 de l’époque, quoi... C’est là qu’ils reprenaient leur souffle. Tout comme d’Iberville et ses pirates quand ils allaient «bouter» les Anglais hors de la baie d’Hudson.
Un trésor archéologique y dort, non perturbé par les charrues agricoles ou par la machinerie lourde. Ce rare massif de vieilles forêts recèle une des dernières bibliothèques biologiques boréales. Le gouvernement a d’ailleurs reconnu la préciosité du lieu puisqu’il a déjà dans ses plans l’intention de protéger des «patches» tout autour et même à l’intérieur du territoire Kanasuta, qui aurait normalement dû constituer un grand parc naturel depuis longtemps.
Click and claim ! Une folie complète, ce stratagème ! Un pur terrain de jeu de gamblers
Mais ce territoire est «claimé» quasi mur à mur, c’est-à-dire que des prospecteurs ou des compagnies y détiennent des droits miniers, excluant de facto toute possibilité d’instaurer une aire protégée.
Ils sont une centaine de lobbyistes miniers à Québec à vouloir perpétuer ce système qui permet à n’importe quel prospecteur australien, par exemple, de «geler» via internet une surface de 35 hectares dans le Kanasuta – l’équivalent de 70 terrains de football – pour la somme de 25 $! Click and claim! Une folie complète, ce stratagème! Un pur terrain de jeu de gamblers. D’autant plus fou qu’aucune mine n’a été exploitée depuis 100 ans à cet endroit. Abus, abus, abus! (En fait, 40% de l’Abitibi est ainsi devenu une aire minière protégée!)
L’Action boréale s’est néanmoins montrée ouverte à la possibilité d’exploiter une mine dans une aire protégée pourvu qu’elle soit souterraine, que ses résidus soient transportés dans d’autres sites de dépôts existants et que le périmètre occupé soit restreint aux installations de surface.
Le 1er avril prochain, la compagnie forestière Tembec entend exercer son droit peut-être légal, mais sûrement illégitime, de pénétrer dans le territoire naturel du Kanasuta et d’aller y couper à blanc, tel qu’elle l’a laissé entendre.
L’Action boréale s’y oppose, demande une extension du présent moratoire et prie le gouvernement de fournir au ministère chargé d’établir le réseau d’aires protégées le budget nécessaire pour qu’il puisse convenablement achever son travail d’analyse.
– Richard Desjardins, vice-président de l’Action boréale.
• Ceci est le dernier texte d'une série de sept de Richard Desjardins
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