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L’inquiétude de François Legault

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Depuis son départ du PQ en 2009 et son retour rapide en politique active, François Legault multiplie les métamorphoses. En 2011, il fondait la Coalition avenir Québec avec Charles Sirois, un ex-recruteur libéral. La CAQ se disait alors le parti de la «réconciliation fédéraliste-souverainiste».

À l’élection de 2012, la candidature de Jacques Duchesneau lui permet de se changer en parti de l’«intégrité». Résultat: 27% des voix. À l’élection de 2014, la CAQ devient le parti du grand ménage des finances publiques. À 23%, elle perd 205 000 voix.

Aujourd’hui, son «virage identitaire» devient sa énième nouvelle marque de commerce. Comme Mario Dumont et l’ADQ avec les «accommodements raisonnables» et Pauline Marois avec sa «charte des valeurs».

Le virage de la CAQ est livré sous forme d’un «nouveau pacte avec les immigrants». Voyant que les «ressources financières et humaines consacrées aux programmes d’immigration stagnent ou diminuent», M. Legault sonne l’heure d’une «modernisation complète du modèle québécois d’immigration».

Le diagnostic n’est pas nouveau, mais il est fondé. Sa suggestion d’augmenter les ressources pour la francisation et l’intégration économique des immigrants tombe sous le sens. Depuis 1996, le laisser-aller péquiste et libéral sur cet enjeu crucial est en effet scandaleux.

« Gérer » la diversité ?

L’objectif de M. Legault est de «gérer» la diversité et de «codifier» l’interculturalisme. Vaste programme. Le diable, lui, est dans les détails.

Sa mesure phare est la création d’un certificat d’accompagnement pour nouveaux arrivants. Ce qui rappelle le «contrat d’accueil et d’intégration» obligatoire en France depuis 2007, mais ne s’appliquant qu’aux «étrangers non européens». Lequel comprend, lui aussi, une formation linguistique et civique sur les «valeurs» de la République ainsi qu’un bilan des compétences professionnelles.

La CAQ prévoit une probation de trois ans. Si un immigrant échoue à démontrer son employabilité de même que sa connaissance du français et des «valeurs» québécoises, une reprise serait possible un an plus tard. Et s’il échoue? Il n’aura qu’à «retourner» dans son pays, dixit M. Legault. La mesure est drastique et pourrait mener à de graves injustices.

Une autre mesure est carrément troublante. Une fois le nouvel arrivant «initié» aux «valeurs» d’ici, un «comité d’experts», suite à une plainte et une enquête, statuerait sur l’admissibilité d’un immigrant qui «contrevient à une disposition fondamentale» de la Charte québécoise des droits.

M. Legault cherche-t-il à créer un délit d’opinion ou une police des valeurs? Nos lois, nos chartes et le Code criminel ne lui suffisent pas?

L’inquiétude

François Legault prend des airs adéquistes parce qu’il craint de perdre d’autres appuis. L’arrivée d’un nouveau chef au PQ l’inquiète. L’austérité libérale le prive de son cheval de bataille. Une possible polarisation souverainiste-fédéraliste à l’élection de 2018 risquerait même d’envoyer la CAQ en phase terminale.

Avec son virage identitaire, M. Legault cherche avant tout à sauver les meubles en courtisant les nationalistes dits «mous». Bref, comme je l’écrivais dès 2011, sa première mission politique reste la même: diviser le vote francophone juste assez pour empêcher l’élection d’un gouvernement péquiste majoritaire. Aussi hypothétique puisse-t-elle être...

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