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Les nuits caniculaires

Si à tout problème il y a une solution, mes rêves me poussaient clairement à l’action

Les nuits caniculaires
illustration, benoit tardif

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Enfant, je détestais la canicule avec conviction. J’avais le sentiment que des champignons proliféraient autant dans mon corps que dans mon esprit; je devenais zombie. Je n’avais plus envie de rien. Je n’avais plus d’énergie pour rien. Je voulais que ça cesse. Et pire que tout : chercher le repos... Mes nuits d’été ont souvent été des tentatives avortées de trouver le sommeil. Et de le garder.

Enfant, je détestais la canicule avec conviction. J’avais le sentiment que des champignons proliféraient autant dans mon corps que dans mon esprit; je devenais zombie. Je n’avais plus envie de rien. Je n’avais plus d’énergie pour rien. Je voulais que ça cesse. Et pire que tout : chercher le repos... Mes nuits d’été ont souvent été des tentatives avortées de trouver le sommeil. Et de le garder.

Horreur et chaleur

Deux facteurs, outre l’évidente chaleur, m’empêchaient de sombrer dans un repos complètement réparateur. D’abord, la canicule me rendait somnambule. Un matin, au réveil, nous avons trouvé près du bain la cruche d’eau que nous gardions au frigo. J’avais rêvé que le bain était en feu – si ce n’est pas avoir chaud, ça! – et tout indique que pour sauver les meubles, je me suis levée en pleine nuit pour ­apporter l’eau froide aux flammes. Ainsi, je me levais régulièrement la nuit pour tenter de gérer l’humidité ambiante. Si à tout problème il y a une solution, mes rêves me poussaient clairement à l’action. Du moins, certains d’entre eux.

D’autres rêves me poussaient vers l’enfer puisque j’avais une peur bleue des films d’horreur, qui, dans les années 1980, envahissaient la télé pendant l’été. En fait, j’avais plutôt peur des bandes-annonces, puisque je n’ai jamais vu les films. De Jason à Chucky en passant par Jaws, les publicités ont suffi à me gâcher plusieurs nuits et sans doute celles de mes parents. Quand je n’étais pas occupée à combattre la chaleur ambiante, je combattais les monstres et j’allais les rejoindre dans leur lit.

Pour être peureuse, j’étais peureuse! On m’avait raconté à l’école que si on se regardait dans le miroir à minuit pile, on voyait le diable. Ce type ­d’histoires bêtes hantait mes pensées endormies. Pour ne pas prendre de chance, si ­j’allais à la salle de bain, ­j’essayais toujours de garder les yeux fermés.

D’une canicule à l’autre

J’étais peureuse et je détestais la canicule. J’ai bien peu changé finalement, sauf qu’il me semble qu’on entend moins parler des films d’horreur qu’avant. Et je ne suis plus somnambule. ­Enfin, presque plus. Ou alors c’est qu’il n’y a personne pour me ­surprendre.

C’est vrai qu’il y a quelques jours, au beau milieu d’une nuit de ­canicule, je me suis ­réveillée assise sur le coffre en bois qui est au pied de mon lit. Je ne sais pas depuis combien de temps j’étais là, flambant nue, les pieds se balançant dans le vide, comme une enfant. J’avais sans doute voulu me rapprocher du ventilateur.

Sortant doucement de ma brume, j’ai croisé le reflet de mon corps dans le miroir. Malgré le coup de soleil de la veille et mes ­cheveux en bataille, je n’ai pas vu le diable. À quelques détails près – plus de seins, plus de cernes – on change ­assez peu en 25 ans. J’avais le regard épuisé et les muscles un peu relâchés des nuits qui se contentent de demi-sommeils.

Je n’ai pas vu le diable, mais il était bien dépassé minuit. Je maintiens qu’il vaut mieux ne pas courir le risque.

 

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