Il sait où se trouve son ordinateur volé
Malgré le fait qu’une application lui donne une adresse, la police souligne qu’elle ne peut pas intervenir
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Une famille de Montréal qui a retrouvé son ordinateur volé par géolocalisation est allée elle-même sonner à la porte du cambrioleur quand la police leur a dit qu’elle ne pouvait pas intervenir.
«On arrive à un stade où on sait où est notre bien. Et il n’y a pas moyen de le récupérer, dénonce Mohamed Tahar. Qui va défendre les honnêtes citoyens si ce n’est pas les lois?»
La famille Tahar a été cambriolée lundi dernier dans la nuit, alors que l’immeuble entier avait été évacué par la Croix-Rouge en raison d’un problème d’électricité.
En revenant tôt le lendemain matin, ils ont eu la mauvaise surprise de voir leur porte enfoncée et leurs affaires éparpillées à travers l’appartement. Rapidement, ils se sont rendu compte que les voleurs avaient emporté les bijoux de famille ainsi que leur ordinateur Mac dernier cri.
«Ils ont même pris le temps de récupérer la boîte d’emballage», ajoute le père de famille, avec une pointe d’ironie.
Un couple qui vit un peu plus haut s’est également fait cambrioler ce soir-là.
Géolocaliser
Mohamed Tahar, qui travaille en informatique, a tenté le soir même de localiser l’appareil à l’aide de l’application Find my Mac. Ils ont obtenu une adresse à Laval.
« On arrive à un stade où on sait où est notre bien. Et il n’y a pas moyen de le récupérer. Qui va défendre les honnêtes citoyens si ce n’est pas les lois ? » – Mohamed Tahar
Le père de famille a tout de suite bloqué l’ordinateur à distance en installant un mot de passe et a envoyé le message suivant en anglais: «You have stolen this iMac. You need to bring it back» (Vous avez volé ce iMac. Vous devez le rendre).
N’ayant pas de signe de la part du voleur, il est allé sur place le lendemain avec sa femme pour réaliser qu’il n’y avait qu’un immeuble à logement à l’endroit indiqué.
Fiers de leur découverte, ils ont prévenu la police. Mais elle les a vite freinés dans leurs ardeurs.
«Ils nous ont dit qu’il fallait un mandat de perquisition et qu’ils ne pouvaient pas en obtenir s’ils n’avaient pas d’adresse exacte», indique Hamel, la conjointe de Mohamed Tahar.
Sans sentir plus de soutien, Mohamed et Hamel Tahar ont appelé eux-mêmes le propriétaire de l’immeuble pour lui demander son aide. Mais là encore, ils ont trouvé porte close.
Pas de mandat pour ça
L’avocat criminaliste Jean-Pierre Rancourt explique effectivement qu’il serait difficile de convaincre un juge d’obtenir un mandat pour un immeuble entier. Il ajoute que, de toute façon, les policiers ne poussent souvent pas les enquêtes aussi loin pour ce genre de délits.
«C’est dommage, les petits délits comme ça sont souvent reliés à de grosses affaires, dénonce Hamel Tahar. On sait qu’on ne retrouvera pas nos biens. Mais on veut dénoncer la situation. Peut-être que ça va aider d’autres familles.»
La mère de trois enfants explique que ce n’est pas tant la valeur des objets qui les motivait que la valeur sentimentale.
«Chaque bijou représente un événement pour moi: un cadeau de mon père qui est mort, un autre de notre lune de miel, se désole-t-elle. C’était pour ça qu’on voulait les récupérer.»
Droit à la vie privée
Selon les policiers, obtenir un mandat de perquisition ne se fait pas à la légère. «Une résidence privée, on n’a pas le droit de rentrer à l’intérieur. Il y a des droits et des libertés. On a une expectative de vie privée. Les policiers ne peuvent pas violer un droit comme ça sous de simples soupçons», explique Manuel Couture du Service de Police de la Ville de Montréal.
Selon le policier, il faut monter tout un dossier pour pouvoir rentrer à l’intérieur et réunir plusieurs preuves. Cela peut prendre des photos par exemple. «Il faut convaincre le juge que lorsqu’on va rentrer à l’intérieur, on viole un droit fondamental, mais il y a des raisons qui sont appuyées par des faits», dit-il.
Le SPVM assure que toutes les informations sont toutefois pertinentes. «On comprend que ça peut être frustrant parfois parce que l’enquête n’avance pas aussi vite que l’on voudrait. Mais chaque information compte. Peut-être que d’autres personnes vont porter plainte, et cela va étayer le dossier», dit celui qui n’encourage pas les gens non plus à se faire justice eux-mêmes.
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