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Des employées qui rapportent

Un entrepreneur a vu son chiffre d’affaires augmenter de 40 % depuis qu’il embauche des femmes

Le président de Gestion 3 dans 1, Stéphane Pépin, a reçu le prix «Construire se conjugue au féminin», remis par l’Association de la construction du Québec, pour ses efforts dans l’intégration des femmes.
Photo jean-françois desgagnés Le président de Gestion 3 dans 1, Stéphane Pépin, a reçu le prix «Construire se conjugue au féminin», remis par l’Association de la construction du Québec, pour ses efforts dans l’intégration des femmes.

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Alors que plusieurs compagnies de construction hésitent toujours à embaucher de la main-d’œuvre féminine, un entrepreneur a vu son chiffre d’affaires exploser depuis qu’il a ouvert ses chantiers aux femmes.

Stéphane Pépin est à la tête de Gestion 3 dans 1, une compagnie de Québec spécialisée dans la peinture et le tirage de joints qui emploie 27 femmes. En engageant ses trois premières employées, il y a onze ans, il était loin de se douter à quel point elles transformeraient le visage de son entreprise.

«Je vous dirais que mon chiffre d’affaires, depuis que j’ai mes filles, a augmenté de 40 %, parce qu’elles sont beaucoup plus minutieuses et ponctuelles», a-t-il confié à l’Agence QMI.

«Bien souvent, les femmes vont moins s’absenter [puis] elles ne prennent pas 28 minutes de “break” comme sur d’autres chantiers où tu as 25 gars assis à une table qui vont étirer le temps. Ce sont vraiment des femmes à leurs affaires», a ajouté M. Pépin.

À l’écouter, on serait porté à croire que l’embauche de femmes dans la construction va de soi. Pourtant, l’association qui représente les patrons de l’industrie juge que le milieu est trop sexiste pour faire plus de place aux femmes.

Horrifié

Stéphane Pépin a été horrifié d’apprendre dans Le Journal de Montréal qu’une peintre de l’Estrie avait été congédiée après avoir dénoncé le harcèlement sexuel et psychologique dont elle était victime.

«Quand j’ai vu l’article, le poil m’a levé de sur les bras. Pour moi, c’était insensé. Chez nous, entre les filles et les gars, c’est le respect absolu, tout le monde est égal. Puis s’il y a un problème entre deux individus, je me déplace sur le chantier, on va s’asseoir, puis on en jase», a-t-il expliqué.

Un exemple

L’entrepreneur est persuadé que la solution au problème de l’accès et de la rétention des femmes dans l’industrie de la construction passe par l’éducation.

«J’offre souvent mes services pour aller faire le tour des écoles de métiers puis expliquer ce qui est arrivé dans mon entreprise depuis que j’embauche des femmes, qu’est-ce qu’il a fallu changer», a raconté M. Pépin.

«Souvent, les gens de la vieille garde, ceux qui ont entre 55 et 68 ans, vont dire: “Si on engage une fille de 24 ans, elle va tomber enceinte.” Mais ça, c’est une réalité depuis que le monde est monde. Tsé, moi, j’en ai six présentement qui sont en congé de maternité», a indiqué l’entrepreneur.

L’industrie n’est pas prête à accueillir plus de femmes

Il y a encore trop de sexisme sur les chantiers de construction pour permettre aux femmes d’y faire leur place, prétendent les patrons de l’industrie.

Tandis que des voix s’élèvent pour réclamer l’imposition de quotas de femmes, l’Association de la construction du Québec (ACQ), qui représente quelque 17 000 entrepreneurs, soutient qu’une telle mesure serait contre-productive.

L’ACQ a d’ailleurs rencontré le ministre du Travail, Sam Hamad, pour lui faire part de son opposition à toute éventuelle imposition de quotas. Selon le directeur général de l’association, Luc Bourgoin, il faut d’abord éliminer les préjugés et changer les mentalités avant de pouvoir envisager l’arrivée massive de femmes sur les chantiers.

«Pour nous autres, il faut régler le problème des préjugés, je pense que ce ne serait pas rendre faveur aux femmes que de les envoyer dans un milieu où il existe tant de préjugés et où il y a des mentalités à changer», a déclaré M. Bourgoin en entrevue avec l’Agence QMI.

«Mais l’imposition de quotas, en amenant plus de femmes sur les chantiers, ne contribuerait-elle pas justement à faire avancer les mentalités?» lui a-t-on demandé. «Je pense, au contraire, qu’on doit s’attaquer aux problématiques avant de passer à cette situation-là. C’est ce qu’on privilégie. C’est pour ça qu’on travaille fort dans ce sens-là», a répondu M. Bourgoin.

Plan d’action

Ce dernier assure que l’Association de la construction souhaite augmenter la présence de la main-d’œuvre féminine sur les chantiers. Il a rappelé que l’ACQ avait adopté un plan d’action afin de sensibiliser les employeurs à la problématique de l’accès et de la rétention des femmes au sein de cette industrie.

M. Bourgoin a également indiqué que son organisation soutenait le «Programme d’accès à l’égalité des femmes dans l’industrie de la construction», qui vise à faire passer la proportion de femmes sur les chantiers de 1,4 % à 3 % de la main-d’œuvre totale d’ici 2018.

La main-d’œuvre féminine dans l’industrie de la construction

  • 1997 : 243 femmes actives (0,3 % de la main-d’œuvre totale)
  • 2013 : 2223 femmes actives (1,4 % de la main-d’œuvre totale)
  • Objectif de l’industrie d’ici 2018 : 3 % de femmes
  • Seulement 5 % des employeurs comptant cinq salariés ou moins recrutent des femmes
  • 52 % des entreprises de plus de 25 employés n’embauchent aucune femme

Source : Commission de la construction du Québec

 

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