Un centre de prédédouanement ne suscite pas l’enthousiasme
Les transporteurs interrogés par Le Journal sont plutôt tièdes à l’idée
Coup d'oeil sur cet article
N’en déplaise à la communauté d’affaires de Québec qui réclame depuis des années un centre de prédédouanement américain à l’aéroport Jean-Lesage, plusieurs compagnies aériennes ne montrent aucun enthousiasme.
Le Journal a sondé toutes les compagnies aériennes présentes à Québec et trois d’entre elles, même si elles vont aux États-Unis à partir d’autres villes, ne sont pas intéressées, pour l’instant, à offrir davantage de vols entre Québec et les États-Unis.
La compagnie Porter n’a «pas de plan dans l’immédiat» pour offrir de nouveaux vols transfrontaliers à partir de Québec, préférant concentrer ses opérations à l’aéroport Billy-Bishop de Toronto, qui demande aussi un centre de prédédouanement.
Air Transat va aussi passer son tour, affirme la porte-parole Debbie Cabana. Au lieu d’ajouter des vols directs, Air Transat préfère miser sur les vols par correspondance à Montréal et va augmenter son offre cet été (voir encadré).
WestJet n’a pas non plus de plan dans ce sens, indique la porte-parole Lauren Stewart. Elle explique que les coûts d’utilisation de ces installations sont élevés et que «l’aéroport international Jean-Lesage est déjà notre aéroport canadien le plus coûteux sur la base du coût par passager» (voir autre texte).
Air Canada a discuté du plan d’agrandissement de 300 millions $ qui pourrait inclure un centre de prédédouanement, à l’aéroport de Québec, en 2018, mais la teneur des discussions reste confidentielle, a répliqué la porte-parole Isabelle Arthur.
Les compagnies United et American, déjà présentes à Québec, n’ont offert qu’une réponse vague. Delta n’a pas répondu au Journal.
Comparativement à Halifax, Ottawa et Winnipeg, d’autres villes canadiennes de taille semblable, l’aéroport de Québec est celui qui offre le moins de vols réguliers vers les États-Unis.
Un centre de prédédouanement américain pourrait régler le problème. Cela permettrait aux voyageurs de passer aux douanes américaines à Québec et de débarquer aux États-Unis comme dans un vol local. Les compagnies aériennes en raffolent et l’expérience des autres villes canadiennes a montré que le nombre de liaisons et de passagers augmente après la construction d’un centre de prédédouanement.
Mais c’est à condition que les compagnies aériennes embarquent dans l’aventure. Est-il inquiétant que trois firmes canadiennes disent déjà «non merci»? «Pas du tout», répond le porte-parole de l’aéroport Jean-Lesage, Mathieu Claise.
L’aéroport vise surtout les compagnies américaines et les transporteurs à bas prix. Mais il n’y a encore eu aucune discussion avec ces firmes. «Les négociations ne peuvent pas commencer tant qu’on n’a pas un oui.»
Dossier complexe
C’est un dossier complexe et à la fois pressant. Le Canada et les États-Unis ont signé un protocole d’entente sur les transports en 2015, mais ce dernier doit encore être ratifié. C’est seulement à cette étape que le centre de prédédouanement pourrait être accordé à Québec.
«On souhaite que ça se fasse avant le déclenchement des élections américaines. Ça nous permettrait de sauver un an de discussions. Mais j’ai bon espoir», a déclaré le PDG de l’aéroport, Gaëtan Gagné.
– Avec la collaboration de Stéphanie Martin
Frais
Mise en garde de WestJet
La porte-parole de WestJet Lauren Stewart a servi un avertissement à l’aéroport de Québec: «Ce serait très préoccupant si l’administration aéroportuaire augmentait ses frais à la suite de son investissement», a-t-elle dit.
Mais WestJet n’est pas très présente à Québec, avec un vol quotidien pour Toronto et un vol par semaine pour Fort Lauderdale. «S’ils créent une offre pour Québec et qu’ils mettent une fréquence, il y aura plus de passagers et, donc, les coûts vont diminuer», a répondu le porte-parole de l’aéroport, Mathieu Claise.
Son patron Gaëtan Gagné, PDG de l’aéroport, a indiqué jeudi, lors de la présentation du bilan annuel, que «tant que l’augmentation du trafic est là, les frais n’augmenteront pas».
« Sommes colossales »
Si les frais sont tout de même élevés (33 $ par billet), c’est parce que l’aéroport, dit-il, a été longtemps «négligé» et qu’il a fallu investir «des sommes colossales». Mais le passager y trouve son compte, assure M. Gagné.
«En 1995, ça coûtait 1200 $ pour aller à Toronto. Et aujourd’hui, malgré tous ces frais dont on parle, on va à Toronto pour 300 à 400 $ aller-retour. Donc, plus il y a d’espace, plus il y a de la capacité dans un aéroport, meilleurs sont les prix, et c’est ce qui avantage les passagers.»
– Avec la collaboration de Stéphanie Martin
Plus de vols vers l’Europe... via Montréal
Air Transat ne prévoit pas offrir davantage de vols directs à Québec. Le transporteur mise plutôt sur les vols avec correspondance à Montréal. Depuis l’été dernier, pour un nombre limité de destinations européennes, l’avion d’Air Transat cueille des passagers à Québec, se rend à Montréal et repart pour l’Europe. Même principe au retour.