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«La beauté ne se dit pas»

«La beauté ne se dit pas»
Photo courtoisie


La talentueuse Hélène Dorion, auteure d’une trentaine de livres et lauréate de nombreux prix prestigieux, s’est inspirée d’un séjour en Italie, interrompu par l’annonce que son père était mourant, pour écrire un formidable récit méditatif sur la beauté de la vie, le passage du temps, les états transitoires et le deuil, Le temps du paysage.

Parfois, des brouillards se posent sur les paysages et sur nos vies et Hélène s’est laissé porter par ces passages nécessaires, ces états transitoires entre les périodes troubles et le retour du ciel bleu, pour écrire ce recueil inspirant.

Pour la première fois, elle associe ses propres photographies à son écriture, ouvrant la porte à un dialogue poétique entre le texte et l’image pour chacun des lecteurs. «La beauté ne se dit pas», écrit-elle. «Elle est là, qui résonne avec nous.»

«Je voulais faire ressentir ce que je ne voulais pas décrire. Tout le livre est vraiment conçu comme quelque chose qu’on peut ressentir: la couverture rigide, le papier. Ce n’est pas un livre de photos, c’est un livre avec des photos, ce qui est très différent», commente Hélène Dorion en entrevue téléphonique.

Commencer la naissance

Toutes les photos ont été prises en Ombrie, où elle a fait une résidence d’artiste. Elle ne s’attendait pas à y recevoir un coup de fil lui annonçant que son père était mourant.

«Ce projet s’est imposé à partir de la mort de mon père, mais surtout de la transformation, comme dans Recommencements, où la mort de la mère est un point de départ. Ici, la mort du père est aussi un point de départ. Pour moi, la mort, c’est le début, c’est pas la fin.»

La mort est pour elle une faille qui permet de commencer la naissance. «La feuille tombe de

l’arbre: elle meurt, mais s’en va nourrir autre chose pour recommencer autrement, à partir du sol, dans la nature. C’est cyclique: la vie ne se passe pas sur une ligne droite. Ce qui meurt est donné à ce qui veut renaître.»

À travers les souvenirs, les réminiscences, Hélène explore ce recommencement dans son texte. Elle a sublimé l’épreuve. «Il y a tellement de morts et de petites morts. Il y a toutes ces vagues qui arrivent: de petits deuils, des

ruptures, des maladies, des changements de cap, des changements de travail.»

Les trois fenêtres

Hélène Dorion écrit dans le livre qu’il y a trois fenêtres dans la vie: mourir, aimer, naître. «C’est un peu ce cycle que j’ai voulu explorer. Ne pas rester dans la mort. Ce n’est pas une négation du deuil ou de l’existence de la mort. Mais on a besoin de faire un pas suivant. Sinon, chaque jour, quand quelque chose meurt autour de nous, on arrête. Il y a une sorte de transfiguration, d’où la présence du paysage, de ce que j’appelle la beauté comme sensation, qui est réparatrice, d’une certaine manière.»

Comment la nature et les paysages l’ont-ils aidée à traverser l’épreuve? «Cette beauté est une sensation, ce n’est pas quelque chose de mental. Ressentir la beauté, c’est ressentir la fragilité, le mouvement, la vulnérabilité.»

Le personnage principal de ce livre, ajoute-t-elle, c’est le brouillard. «Quand on ne voit plus devant, ça nous rend habituellement assez inconfortables. On ne veut pas de brouillard dans nos vies: on veut que ce soit clair et voir tout l’horizon devant. Mais c’est pas comme ça que ça se passe. Parfois, il y a des moments de brouillard dense et il s’agit d’apprendre à les habiter.»


  • Une exposition itinérante des photos du livre voyage dans tout le Québec.
  • Hélène Dorion rencontrera les visiteurs du Salon international du livre de Québec.

 

Hélène Dorion Le temps du paysage Éditions Druide, 128 pages

 

«La beauté ne se dit pas»
Photo courtoisie

EXTRAIT

«Plutôt que d’approcher le paysage de manière bucolique ou de l’envisager comme ce quelque chose de romantique dont on a du mal à se débarrasser, je chercherai à lui faire dire ce que j’ignorais encore de moi-même, à faire en sorte qu’il trouve sens par cette révélation de vivre dont il est empreint. Ainsi, un paysage peut-il accomplir une sorte de réparation, notamment à travers ce que j’attribuerais pour ma part à la beauté, car n’est-ce pas elle qu’on appelle lorsqu’il s’agit d’éclairer nos chemins, d’adoucir le relief de notre horizon intime?»







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