Des minorités plus sympathiques que d’autres ?
La Charte des droits et libertés de la personne protège contre la discrimination fondée sur différents facteurs comme le sexe, la condition sociale, le handicap, la couleur de la peau, la grossesses, l’âge, l’orientation sexuelle etc.
La loi protège toutes les personnes contre la discrimination qui serait fondée sur l’une ou l’autre des caractéristiques à l’égard desquelles il est interdit de discriminer.
Il appert toutefois que dans l’esprit de plusieurs de nos concitoyens, ce droit à ne pas être discriminé est à légitimité variable.
Le sondage portant sur la perception des Québécois à l’égard de la diversité sociale réalisé sous la direction du professeur Pierre Noreau, du Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal et une équipe de chercheurs, de quatre universités révèle des différences marquées quant au degré de sympathie qu’inspirent les membres de groupes protégés contre la discrimination.
Selon la sympathie que l’on porte à un groupe de personnes minoritaires, on serait plus ou moins choqué par les traitements discriminatoires que subissent des personnes appartenant à certaines minorités.
Une très forte majorité de québécois expriment une grande confiance envers les personnes handicapées de même que celles appartenant à une minorité visible.
À l’autre extrémité du spectre, une forte majorité de répondants expriment une opinion très défavorable à l’égard des assistés sociaux et des manifestants.
Une majorité des répondants accorde en effet une grande confiance aux membres de certains groupes sociaux. Il s’agit des citoyens ayant un handicap, des personnes appartenant à une minorité visible, les jeunes et les homosexuels.
Les chercheurs notent que “que l’évolution des perceptions ne met pas nécessairement les membres de ces groupes à l’abri de toute discrimination, mais celles dont ils pourraient être victimes sont plus susceptibles d’être socialement dénoncées aujourd’hui, compte tenu de l’opinion positive qui entoure leur condition particulière.”
L’opinion des Québécois est plus circonspecte à l’égard des autochtones, des personnes d’autres origines ethniques ou de religions minoritaires. Les chercheurs relèvent que “l’opinion positive des répondants vis-à-vis de ces groupes varie des deux tiers aux trois quarts en fonction de leur spécificité, mais témoigne d’un certain nombre de réticences.”
Les auteurs notent à cet égard que “C’est vis-à-vis de ces groupes, et notamment à l’égard des personnes d’autres origines ethniques et religieuses que les positions des répondants semblent les plus partagées.
Enfin, un troisième groupe de personnes protégées par la loi contre la discrimination fait plus directement l’objet de la méfiance des répondants. Près de 50 % des Québécois affichent en effet une opinion négative vis-à-vis des assistés sociaux (49,1 % d’opinion positive).
Ces données permettent d’éclairer les débats actuels sur la place respective du droit à ne pas être discriminé et de la liberté d’expression.
Si l’on s’en tient aux données de l’étude Noreau, il est fort possible que l’opinion des québécois quant à l’acceptabilité de propos discriminatoires soit à géométrie variable: une blague visant une personne handicapée serait réprouvée par une majorité alors que la même blague à l’égard d’une personnes assistée sociale serait saluée par une majorité de nos concitoyens.
Alors, une limite à la liberté d’expression serait-elle ressentie comme étant plus légitime lorsqu’il s’agit de protéger une perspnne handicapée que lorsque vient le temps de protéger les personnes appartenant à une autre minorité (religieuse, âge, sexe, etc.) ?
Ces données reflètent évidemment l’état d’esprit des répondants au moment de la réalisation du sondage. Cela ne représente pas forcément l’opinion réelle de la population.
Mais tout indique qu’il y a une sympathie variable au sein de la population à l’égard des personnes faisant partie des minorités protégées contre la discrimination.
Les membres de certaines minorités recueillent plus d’empathie que d’autres.
Voilà peut-être une explication de la variabilité dans l’indignation que semblent génèrer certains types de propos humoristiques.