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Le «boutefeu»

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Le politologue Léon Dion, qui s’y connaissait un peu, avait exhorté son intellectuel de fils, Stéphane, à résister au chant des sirènes de la politique, qui lui offraient un poste prestigieux à Ottawa. «Les intellectuels te regarderont de haut; les politiciens te regarderont de travers.»

Dion père avait raison. Ses collègues libéraux ont accueilli Dion-fils comme des tocsons dans une cour d’école. Ils lui ont donné des jambettes, ont saboté ses discours, tenté de lui ravir son comté, comploté dans son dos quand il est devenu leur chef.

Ses adversaires, eux, l’ont excommunié.

Un divorce à deux

Évidemment, aux yeux des vrais sépara­tistes, les fédéralistes sont tous des Québécois douteux, assimilés, ou vendus. Mais Dion méritait pire: il dénonçait la faiblesse stratégique de la démarche péquiste: on ne se lance pas dans un tel divorce à l’aveuglette, sans un minimum d’encadrement, de coordination avec l’autre partie, disait-il.

Stéphane Dion avait beau être favorable à la loi 101 et affirmer que le nationalisme est une forme valable de mobilisation, rien à faire: on en fit un traître à la Nation, un vire-capot, «un boutefeu, un petit homme», a dit Lucien Bouchard. Un rat, dans La Presse.

Dion a convaincu l’arrière-garde trudeauiste de reconnaître le droit du Québec de se séparer – un droit que Madrid refuse toujours à Barcelone – comme préalable à une entente des deux parties sur la formulation de la question référendaire et le pourcentage de voix requis pour rendre la démar­che crédible.

Éternelles victimes

Cela créerait des conditions comparables à celles dans lesquelles l’Écosse s’est prononcée sur son adhésion au Royaume-Uni.

Mais, au lieu de faire face à la musique, avec un Canada pourtant fragilisé, les nationalistes ont préféré se replie­r. Ils ont crié à la trahison, invoquant Dion pour jouer les victimes, l’accusant de vouloir enfermer le Québec dans la fédération.

Et, 21 ans plus tard, ils en sont toujours au même point.

 

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