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La retraite avant 30 ans sur des îles paradisiaques

Un trentenaire de Rimouski ne travaille plus du tout depuis qu’il vit aux îles Fidji

Mathieu Pelletier au cours d’une journée de pêche à Yacata Island. «Comme je n’ai jamais de stress, je suis bien préservé pour mon âge», plaisante celui qui se fait parfois passer pour un jeune homme de 21 ans.
Photo Courtoisie Mathieu Pelletier Mathieu Pelletier au cours d’une journée de pêche à Yacata Island. «Comme je n’ai jamais de stress, je suis bien préservé pour mon âge», plaisante celui qui se fait parfois passer pour un jeune homme de 21 ans.

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À 37 ans, Mathieu Pelletier a déjà passé plus de temps à la retraite qu’à travailler. Rejetant le style de vie occidental, il vit avec environ 3000 $ par année aux îles Fidji. Ses occupations : écrire, jardiner, dormir dans un hamac et faire «du travail humanitaire pour les gens plus paresseux que [lui]».

Avec sa chemise fleurie et son attitude décontractée­­, Mathieu Pelletier pourrait passer pour un simple vacancier. Or, sa vie n’a rien à voir avec celle des trentenaires qui bûchent toute l’année pour se payer quelques semaines de vacances, puisqu’il ne travaille plus du tout, explique-t-il en entrevue­­ avec le Journal par Skype.

Son secret? Vivre simplement dans un pays où le coût de la vie est bas.

Il a pris cette photo lors d’un événement où on prépare le kava, la boisson traditionnelle fidjienne.
Photo Courtoisie Mathieu Pelletier
Il a pris cette photo lors d’un événement où on prépare le kava, la boisson traditionnelle fidjienne.

Gageure

«Je te gage 50 $ qu’un jour je vais vivre aux îles Fidji», a-t-il défié un ami, vers l’âge de 13 ans. Deux décennies plus tard, ce qui n’était qu’un inoffensif pari s’est transformé en mode de vie.

«Je n’ai jamais aimé le froid», explique ce natif de Rimouski, qui a fait un baccalauréat en géographie.

«J’aurais pu faire un doctorat, mais je n’étais pas intéressé. Moi, ce que je voulais, c’était vivre aux îles Fidji», confie-t-il en riant.

En travaillant plusieurs années au Québec­­ comme cartographe tout en étant très économe, il a réussi à accumuler plus de 150 000 $. Il a calculé qu’en retirant environ 3000 $ par année sur cette somme, il pourrait vivre sans nouveau revenu pendant les 50 prochaines années.

À l’âge de 28 ans, il a fait le grand saut et a enfin réalisé son rêve insulaire. Les premières années, après son arrivée, il a travaillé à distance pour générer un peu de revenus, puisque la seule façon de déménager aux Fidji était d’immigrer en tant qu’investisseur. «Encore là, je ne travaillais qu’une à deux semaines par année», avoue-t-il.

Il espère ne plus jamais avoir à travailler et estime que cela ne serait nécessaire qu’en cas de bouleversement économique.

En neuf ans de vie fidjienne, il a habité dans dix endroits différents du pays, autant en village éloigné que dans des lieux touristiques. D’ailleurs, il n’a pas de lit. «J’ai seulement un hamac. Je peux le plier et aller­­ n’importe où», dit-il.

Mathieu Pelletier (à gauche) avec l’un de ses «pères» fidjiens. «J’ai de la famille partout ici», explique-t-il.
Photo Courtoisie Mathieu Pelletier
Mathieu Pelletier (à gauche) avec l’un de ses «pères» fidjiens. «J’ai de la famille partout ici», explique-t-il.

Mariages et funérailles

Quand il n’est pas invité chez des amis en montagne ou ailleurs au pays, il habite un petit­­ appartement qu’il loue à une famille à Navua.

Étant bien intégré à la communauté locale­­, sa vie est ponctuée par les événements de la vie sociale, comme les mariages et les funérailles. «Si je traverse le village à pied, il y a 18 personnes qui vont m’inviter à des événements», illustre-t-il.

«Je ne m’ennuie jamais», dit celui qui cultive ses propres légumes bios et passe beaucoup de temps à construire des serres pour des voisins ou amis. «Je fais de l’aide humanitaire pour les gens plus paresseux que moi», ironise-t-il.

Il tente aussi d’écrire un livre qu’il intitulera Liberté 35, faisant référence au fameux­­ «Liberté 55», un slogan publicitaire faisant la promotion de la retraite à 55 ans dans les années 1990. Mais encore là, rien ne presse, puisqu’il travaille sur son livre... depuis 2007.

Mathieu Pelletier au cours d’une journée de pêche à Yacata Island. «Comme je n’ai jamais de stress, je suis bien préservé pour mon âge», plaisante celui qui se fait parfois passer pour un jeune homme de 21 ans.
Photo Courtoisie Mathieu Pelletier

Anecdotes de paresse fidjienne

Des anecdotes montrant que les Fidjiens n’ont pas honte d’être paresseux, Mathieu­­ Pelletier en a à revendre­­.

«Les Fidjiens sont toujours heureux. Ils peuvent être aussi paresseux qu’ils le veulent. Ici, ce n’est pas tabou», explique Mathieu Pelletier­­, qui dit voir une grande sagesse­­ dans cette approche­­ antistress de la vie.

Il se souvient d’une année­­ où le prix du taro, une plante racine qui pousse facilement aux Fidji, avait doublé. L’une de ses connaissances qui en cultivait aurait ainsi pu doubler le profit qu’il faisait habituellement en le revendant.

Interrogé sur ce qu’il ferait­­ avec ces surplus, le Fidjien a répondu: «Rien. Je vais juste planter la moitié de ce que je plantais les autres années», relate M. Pelletier avant d’éclater de rire.

Autre époque

Les Fidjiens semblent parfois figés dans une autre époque, explique-t-il. Par exemple, une de ses villes préférées est Levuka, ancienne capitale du pays.

«On dirait qu’elle sort du Far West. Il n’y a que de vieilles maisons et des personnes âgées. Pas de jeunes. Chaque commerce est tenu par un [autochtone] qui vend la même chose que le voisin», dépeint­­-il.

L’un de ses amis qui habite Levuka lui a déjà avoué que son moment préféré de la semaine était le diman­che, seul jour où il pouvait regarder la télévision. «Il se demandait comment il allait faire pour que ce soit diman­che tous les jours. On a toujours l’impression que le bonheur est ailleurs», philosophe M. Pelletier.

Les inconvénients de vivre aux Fidji

Les ouragans

«Je me suis retrouvé sur la trajectoire d’au moins sept ouragans [...] Chaque fois, le vent a tourné à la dernière minute et les ouragans m’ont évité.»

Pas très fiables

«Rien n’est à l’heure. Ce n’est pas évident de faire confiance aux gens. Si vous leur donnez de l’argent, vous pouvez être sûr qu’ils vont le dépenser pour autre chose. Chaque journée est une surprise. Il faut avoir un sens de l’humour 11/10 [...] Aussi, qui dit paresse excessive dit un peu de vol. Les cambriolages arrivent à l’occasion en milieu plus urbain.»

Pas facile de trouver l’amour

Dans un pays où beaucoup de natifs songent à partir pour l’Australie, il est difficile de trouver une conjointe. «Les Indien­nes veulent s’en aller. Ils ne croient pas que je veux rester ici.» Trouver l’amour est d’autant plus ardu qu’il ne souhaite pas avoir d’enfants, une réalité rare dans les pays en développement, explique-t-il. Il a déjà été en couple avec une Néozélandaise, mais elle est retournée en Nouvelle-Zélande. «Ce n’est pas pour tout le monde, les Îles Fidji [...] Je suis déjà heureux­­ comme ça. Finalement, j’ai un peu renoncé», dit-il avec un haussement d’épaules.

Les insectes

«Il y a de super grosses coquerelles. J’ai appris à voir leur beauté au fil des années, à défaut­­ de pouvoir les faire disparaître­­ de la Terre».

Ce dont il n’a pas besoin

Voiture

«Les transports en commun sont tellement peu chers, et même les taxis locaux, si cela est parfois nécessaire, ne coûtent presque rien.»

Barbecues et autres babioles

«Ici, les gens s’invitent continuellement. Par exemple, un de mes voisins [...] me laisse utiliser son barbecue si je veux [...]. Si je veux écouter la télé, je vais chez le voisin. Le partage permet de ne pas tout acheter de façon individualiste comme au Nord.»

Laveuse et sécheuse

«Je lave mes quelques vêtements chaque jour dans un évier. C’est rapide et simple, sous les tropiques!»

Rangement

«Je range mes “cochonneries” dans six grands conteneurs en plastique [...] Je me fixe comme règle de me limiter à cet espace­­.»

Lit

«J’ai seulement un hamac. Je peux le plier et aller n’importe où.»

Gym

«Mon gym, c’est le jardin! Je fais pousser assez de trucs pour nourrir quelques familles [...] Quand je veux faire de l’exercice physique, je vais planter ou construire des serres bénévo­lement».

Combien lui coûte la vie aux Fidji?

(en $ CAN)

  • Loyer: 100 $/mois
  • Électricité: 6 $/mois
  • Eau: 2 $/an
  • Téléphonie: 25 $/an
  • Bouteille de vin: 7 $
  • Gros ananas: 1 $

 

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