Dialogue de sourds entre l'État et ses juristes en grève
Le dialogue de sourds se poursuit entre le gouvernement Couillard et les 1100 juristes de l'État en grève depuis 14 semaines.
Alors que le président du Conseil du trésor Pierre Moreau soutient leur offrir l'argent qu'ils demandent, les avocats et notaires de l'État rétorquent qu'il existe un écart de 40% entre les offres patronales et les demandes syndicales. Québec dit avoir déposé l'équivalent de ce que les procureurs de la Couronne ont obtenu l'an dernier, soit 10% sur quatre ans.
«À terme, les juristes de l'État auront dans leurs poches, à la fin du contrat de quatre ans, la même somme d'argent que les procureurs aux enquêtes criminelles et pénales», a déclaré Pierre Moreau à l'occasion d'une mêlée de presse.
En colère, le président de l'association des avocats et notaires de l'État québécois (LANEQ), Me Jean Denis, a dénoncé l'affirmation du ministre Moreau affirmant que la proposition déposée en début de semaine équivalait plutôt à ce que les fonctionnaires et les autres employés du secteur public ont accepté (moins la relativité salariale), soit 5,25% sur cinq ans.
L'autre pomme de discorde qui sépare LANEQ du gouvernement porte sur le mode de négociation des juristes qui réclament un arbitrage sans droit de grève à l'instar de ce qu'ont obtenu les procureurs aux enquêtes criminelles et pénales (Couronne). Pierre Moreau propose de créer un comité tripartite et de lui donner le mandat d'examiner la question.
M. Moreau se dit réticent à mettre les juristes de LANEQ sur le même pied que les procureurs de la Couronne. «De prime abord, j'ai de la difficulté à concevoir (...) un notaire au ministère des Transports n'a pas le même degré d'indépendance qu'un procureur de la Couronne qui choisit de porter, ou de ne pas porter des accusations. Personne au gouvernement ne peut changer sa décision.»
Idem pour un avocat qui fournit un avis juridique à un ministre. «Le choix final appartient au politique», a plaidé M. Moreau.
Le président de LANEQ fulminait après avoir entendu le ministre. «On a passé deux heures à leur démontrer qu'ils avaient tort (...) Ils ont arrêté la réunion (...) Ils nous sont arrivés avec l'offre de merde qu'ils nous ont faite la semaine suivante.»
LANEQ met le gouvernement au défi de forcer le retour au travail de ses membres par l'adoption d'une loi spéciale. Pierre Moreau répond qu'il s'agit d'une solution de dernier recours. «Je n'a pas dans mes cartons l'ombre d'une pensée de demander la rédaction d'une loi spéciale», dit-il.
LANEQ prévoit soumettre les dernières offres patronales à ses membres et se dit déterminée à poursuivre la grève. Des discussions ont été entreprises avec d'autres syndicats, dont le SCFP, pour obtenir un soutien financier. De plus, LANEQ prévoit poursuivre le gouvernement qu'elle accuse de négocier de mauvaise foi.