Le MTQ rate sa cible d’embauche de 30%
Le manque d’expertise au ministère encore pointé du doigt par les syndicats pour les «extras»
Plus de cinq ans après avoir promis de regarnir l’expertise au ministère des Transports, le gouvernement n’a atteint que 70 % de la cible d’embauche qu’il s’était lui-même fixée, révèlent des chiffres obtenus par Le Journal.
En octobre 2011, afin de contrer la collusion dans l’industrie de la construction, les ministres de l’époque – Michelle Courchesne et Pierre Moreau – avaient annoncé un train de mesures, dont l’embauche de près de 1000 ingénieurs, techniciens en travaux publics et professionnels sur un horizon de cinq ans.
Selon les données les plus récentes colligées par le ministère des Transports du Québec (MTQ), 678 postes ont été créés en date du 31 décembre 2016 sur les 970 espérés.
«Nous, on trouve ça scandaleux que des cibles aussi basses n’aient pas été atteintes. Ces cibles-là, c’était un minimum pour lutter contre la collusion et la corruption dont a fait état la commission Charbonneau», s’insurge le président de l’Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec (APIGQ), Marc-André Martin.
Pénurie de techniciens
Les techniciens en travaux publics, très demandés, sont les plus durs à recruter. Seulement 38 % des 564 postes promis il y a cinq ans ont été créés selon les chiffres du MTQ qui, au surplus, sont contestés par les syndicats.
«Aujourd’hui, dans nos effectifs, on serait supposés être à 1438, puis on est à 994. On est loin du compte», déplore le président du Syndicat de la fonction publique, Christian Daigle, qui critique le «manque de vision à long terme» de l’État.
Les techniciens assurent la surveillance des chantiers, une tâche clé régulièrement pointée du doigt pour les nombreux «extras» accordés par le gouvernement aux firmes privées.
Les salaires
«La question des dépassements de coûts, ça nous horripile vraiment parce qu’on pourrait faire mieux et beaucoup moins cher à l’interne. Souvent, les firmes qui vont surveiller, ce sont des firmes jumelles de celles qui vont faire de la construction. Je ne veux pas accuser personne, mais c’est plus facile, des fois, de laisser passer des choses quand tu travailles avec des amis.»
«La problématique, c’est qu’on n’est pas capables d’embaucher parce que les salaires ne sont pas au rendez-vous», résume le président du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), Richard Perron.
Recrutement - Les cibles du MTQ
Le gouvernement libéral s’était engagé, en octobre 2011, à embaucher 970 ETC supplémentaires (équivalent à temps complet) d’ici 5 ans
- 678 postes additionnels ont été créés (70 % de l’objectif)
- 286 ingénieurs
- 219 techniciens
- 113 professionnels
- 49 au service du soutien technique
- 11 cadres
Source: Ministère des Transports du Québec
Le ministre Lessard confiant d’y parvenir d’ici octobre 2018
Le ministre des Transports Laurent Lessard garde le cap sur l’objectif de 970 postes additionnels au sein de son ministère «avant la fin du présent mandat».
C’est du moins ce qu’a avancé son attaché de presse Mathieu Gaudreault, mardi. La cible d’embauche sur cinq ans a tout simplement été repoussée de deux ans, a-t-il plaidé, ayant bon espoir d’atteindre l’objectif fixé avant le prochain scrutin général en octobre 2018.
«L’objectif a été mis sur la glace à cause des compressions et du gel d’embauche, mais l’objectif est encore bon. Le ministre Lessard souhaite qu’on l’atteigne le plus rapidement possible. Ça implique pendant le présent gouvernement», a-t-il indiqué au Journal.
La faute au Conseil du trésor
Si le gouvernement a raté sa cible, c’est notamment en raison du frein à l’embauche imposé par le Conseil du trésor dans les dernières années.
«Il y a des mécanismes d’embauche dans la fonction publique, il faut que ça soit autorisé alors demain matin, même si on disait qu’on en veut 900, on n’a pas le droit. Chaque année, il faut qu’on aille au Conseil du trésor qui nous dit combien de personnes on peut engager», a expliqué M. Gaudreault, défendant le bilan du gouvernement dans les circonstances.
«En septembre dernier, on avait 707 postes maximum autorisés par le Conseil du trésor et on avait 613 postes comblés, ce n’est pas épouvantablement loin non plus.»
Surveillance de 38 % des chantiers
Qui plus est, selon lui, l’État est sur la bonne voie et a de moins en moins recours à la sous-traitance.
«Pour la surveillance des travaux routiers, 16 % de l’activité était réalisée en régie interne en 2012-2013, aujourd’hui, on est à 38 %, c’est un bond substantiel puis on aspire à mieux.»