Il s’excuse d’avoir «insulté» les Québécois dans MacLean’s
Son texte au sujet du Québec a provoqué un tollé, mais le magazine persiste et signe
Le directeur de l’Institut d’études canadiennes de McGill s’est excusé d’avoir provoqué un tollé avec une lettre d’opinion publiée par Maclean’s, où il accuse le Québec d’être une société «presque pathologiquement aliénée». Mais le magazine, lui, persiste et signe.
Andrew Potter – professeur, détenteur d’un doctorat et ex-rédacteur en chef du quotidien Ottawa Citizen – a tenu à se rétracter mardi, moins de 24 heures après la diffusion en ligne de son billet controversé. Il y explique le cafouillage survenu sur l’autoroute 13, lors de la tempête de neige la semaine dernière, par un supposé «malaise social».
Après avoir provoqué les foudres des politiciens tant à Québec qu’à Ottawa, mardi, l’auteur du controversé article a dit regretter d’avoir «insulté» les Québécois.
«Le premier devoir d'un auteur politique est de refléter sa communauté sur elle-même. Bien évidemment, j'ai échoué, a écrit M. Potter sur sa page Facebook. Quand les gens que vous suivez et respectez vous disent qu'ils ne reconnaissent pas leur société dans votre description, cela signale un échec de l'empathie et de l'imagination, et il est temps de prendre un peu de recul», a-t-il poursuivi.
Il a tenu à s’excuser d’être allé trop loin, soulignant qu’il n’a jamais voulu «insulter» les Québécois.
L’Université McGill a pour sa part réagi en indiquant sur Twitter qu’elle «n’endosse d’aucune façon les propos tenus» par M. Potter.
Légitime dit MacLean’s
De son côté, le magazine s’est porté à la défense de M. Potter en fin de journée mardi.
«Andrew Potter est un superbe journaliste et penseur. Bien que son article d’opinion soit controversé, il s’agit d’un commentaire légitime exprimant un point de vue bien argumenté. Nous le soutenons lui, ainsi que ses écrits», a fait savoir Alison Uncles, rédactrice en chef de MacLean’s.
Le magazine anglophone avait fait grand bruit en 2010 en soutenant que le Québec était la province la plus corrompue au pays.
Plus tôt dans la journée, le premier ministre Philippe Couillard a déploré cet article. «C’est un texte de très mauvaise qualité, qui s’appuie sur des préjugés et qui vise, encore, essentiellement, à dépeindre une image négative du Québec.» Le chef du PQ, Jean-François Lisée, a dirigé ses critiques à l’endroit du magazine Maclean’s.
« Torchon »
Le chef de la CAQ, François Legault, a qualifié l’article de «torchon», reprochant à l’auteur de prendre des «raccourcis».
La ministre fédérale du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, a qualifié les commentaires de M. Potter «d’inacceptables», l’accusant de prendre un «raccourci totalement absurde». Elle a ajouté que sa rétractation était «la bonne chose à faire».
Aux Communes, le bloquiste Mario Beaulieu a présenté une motion dénonçant l’article, mais celle-ci a été rejetée faute de consentement unanime des députés. Il a qualifié l’article de «charge québécophobe d’une rare intensité» et de «Quebec bashing», exhortant le Maclean’s à s’excuser également.
– Avec la collaboration de Patrick Bellerose et Christopher Nardi
Qui est Andrew Potter?
- Directeur de l’Institut d’études canadiennes de McGill, depuis août 2016
- Ex-rédacteur en chef du Ottawa Citizen
- De 2006 à 2011, il est chroniqueur d’Affaires publiques au MacLean’s
- Il a enseigné la philosophie de 2001 à 2004 à Trent University à Peterborough
- Il a étudié la philosophie à McGill, où il a obtenu un baccalauréat en Arts en 1993
- Il a obtenu un doctorat de l’Université de Toronto
- Il a fait des études en Éthiques à l’Université de Montréal à titre de titulaire d’une bourse postdoctorale
Sources : Linkedin de Andrew Potter et l’Institut de McGill
Extraits de la chronique
«Le moindre stress se fraie un chemin dans les fissures du squelette politique transformant ces fissures en fractures et l’idée même de la société québécoise se met à ressembler à un job de peinture cheap d’un atelier de carrosserie».
«Le fiasco (de l'autoroute 13) est dépeint comme un scandale politique, marqué par la paresse administrative, l’absence de leadership et un échec de la communication. Bien qu’il y ait un peu de tout ça dans cet épisode, ce qui est beaucoup plus inquiétant, c'est la façon dont le cafouillage a révélé l’important malaise qui ronge les fondements de la société québécoise.»
«Comparativement au reste du pays, le Québec est une société où il y a peu de confiance, à la limite de l'aliénation pathologique, déficiente dans plusieurs des formes de capital social de base que les autres Canadiens tiennent pour acquis.»
«L’absence de solidarité se manifeste de différentes façons et est si criante que ça fait partie du bruit ambiant de la ville. Un exemple flagrant: les policiers de Montréal ne portent pas d'uniformes appropriés. Depuis 2014, les policiers municipaux portent des pantalons de camouflage rose, jaune et rouge en guise de protestation contre la réforme des régimes de retraite.»
«Ce ne sont pas seulement les restaurants. Différents entrepreneurs, ou garagistes insistent pour que vous payiez en argent comptant. Il en va de même pour les médecins de famille ou les cliniques d’échographie. Ce qui est frappant ce n’est pas que les guichets automatiques des banques distribuent des 50 $ par défaut, c’est que tout le monde les acceptera.»
– Avec la collaboration de Marie-Renée Grondin