/news/currentevents
Publicité

Tuerie de la mosquée : «on continue notre vie, mais avec terreur»

Le président du Centre islamique de Québec, Mohamed Yangui. et l'avocat des victimes, Me Jean-Félix Charbonneau.
Le président du Centre islamique de Québec, Mohamed Yangui. et l'avocat des victimes, Me Jean-Félix Charbonneau. Photo Kathleen Frenette


Depuis la tuerie de la grande mosquée qui a fait six morts et plusieurs blessés, les gens du Centre islamique de Québec disent avoir été dans l’obligation de contacter les policiers à au moins «trois reprises».

«Vous savez, on continue notre vie, mais avec terreur. Il y a des gens qui étaient louches, qui ont demandé de l’argent, exactement comme Bissonnette. Ils ont essayé d’ouvrir la porte... alors on a appelé la police», a dit, jeudi, le président du Centre, Mohamed Yangui.

Selon ce qu’il a raconté, le présumé tireur de la mosquée a «approché la communauté deux à trois fois» avant d’agir. Désormais, les gens qui fréquentent l’endroit sont donc appelés à être plus vigilants et à dénoncer les comportements suspects.

«Vous savez, Bissonnette, il avait demandé des renseignements et cette information a été très pertinente pour lui et c’est avec cette information qu’il a commis son acte, alors maintenant, bien que l’on continue à être ouverts aux autres, nous sommes beaucoup plus vigilants», a-t-il ajouté.

D’ailleurs, selon M. Yangui, les policiers du Service de police de la Ville de Québec sont «systématiquement» présents au moment des prières qui ont lieu à la mosquée.

Questionné sur le «report» du dossier, l’homme a fait savoir que cette situation amenait une «attente remplie de terreur» à l’intérieur de la communauté qui, depuis les évènements, ne se sent plus en sécurité à l’intérieur de son lieu de culte.

«Chaque fois que l’on entre à la mosquée, tout le monde a l’impression qu’il y a quelqu’un derrière nous et on a de la misère à se concentrer sur la prière. Avant, nos enfants venaient à la mosquée, ils venaient jouer, mais maintenant, chacun essaie d’avoir son fils près de lui et on fait des groupes. Quelques-uns prient, les autres protègent et surveillent... c’est une situation très difficile», a-t-il ajouté.

L’homme a également profité de son passage pour «invoquer le Bon Dieu» pour les personnes décédées et pour celles qui sont encore à l’hôpital aux soins intensifs.

Il a également eu une pensée pour les blessés, les orphelins et ceux qu’il qualifie de «rescapés» de la tragédie.

Les victimes seront désormais représentées par avocats

Dans le cadre des procédures entourant l’arrestation d’Alexandre Bissonnette, un troisième joueur est entré en piste puisque les victimes seront désormais représentées par avocats.

C’est tout à fait gratuitement et dans un but d’entraide que les cabinets Roy et Charbonneau avocats et Norton Rose Fulbright ont proposé à la communauté musulmane leur aide pour le long processus judiciaire qui s’amorce dans le dossier de la tuerie de la mosquée.

«Nous offrons notre aide et notre support dans l’interprétation des procédures auprès de la communauté islamique, mais également aide et support par rapport aux victimes, ou encore aux réclamations qu’elles auront à faire», a expliqué au sortir de la salle d’audience Me Jean-Félix Charbonneau, qui était assis au côté du président du Centre islamique de Québec, Mohamed Yangui.

«Notre rôle sera également d’expliquer comment la Couronne, dans son rôle de poursuivant, est limitée dans un souci de préservation de la preuve et de non-contamination des témoins ou de potentiels candidats jurés», a ajouté Me Charbonneau.

Jusqu’à maintenant, quelques rencontres ont été faites avec la communauté et l’écoute a été mise en avant.

La question qui revient le plus souvent concerne l’accusation de «terrorisme», qui n’a toujours pas été portée contre le poursuivant.

À cette interrogation, les avocats tentent «d’explorer», n’ayant pas eu eux-mêmes accès à la preuve.

«On leur mentionne que l’enquête est toujours en cours et on regarde le droit. Évidemment, on les rassure en disant que d’une manière sociale, tout le monde a qualifié le geste de terrorisme, mais, bien sûr, le droit et le social ne dépendent pas toujours des mêmes critères, alors on tente d’interpréter en quoi les critères juridiques ne rejoignent pas toujours les critères sociaux», a précisé l’avocat.

Pour pouvoir porter une telle accusation, les policiers doivent rechercher, dans le dossier, des éléments qui sont propres aux intentions de l’accusé, et ce, sur tous les aspects.

Si, un jour, cette accusation est portée à l’encontre de Bisonnette, la communauté islamique sait très bien que ça ne ramènera jamais les êtres perdus ni la quiétude qui était la leur avant les évènements.

Mais, selon le président du Centre islamique, cette accusation serait «le vrai bonheur pour tout le monde».

La tuerie de la mosquée en chiffres

6 morts
2 blessés toujours aux soins intensifs
6 veuves
17 orphelins
39 rescapés