Hydro-Québec de «mauvaise foi» envers un entrepreneur
SEPT-ÎLES | Un juge considère qu’Hydro-Québec est de « mauvaise foi » et qualifie sa version de « non plausible » dans sa cause l’opposant à un entrepreneur de la Côte-Nord qu’elle a presque acculé à la faillite.
En juillet 2010, Construction Polaris inc., une entreprise septilienne spécialisée en génie civil, a obtenu le contrat de construction d’une partie de la route d’accès du chantier de la Romaine, d’une somme de 63,4 M$.
L’échéancier est serré et la route doit être livrée moins d’un an plus tard, en juin 2011. Des imprévus et des retards au chantier engendrent de nombreux coûts supplémentaires que Polaris réclame à Hydro-Québec. De l’aveu même d’Hydro-Québec, une « bonne partie du retard » lui est imputable.
Polaris met les bouchées doubles au chantier à la demande d’Hydro-Québec. Selon Polaris, les dépassements de coûts s’accumulent rapidement : 10 M$ en février 2011, 18 M$ en mars 2011 et 36 M$ à la fin du contrat en juin 2011.
Polaris menacée de faillite
Les nombreux dépassements de coûts placent Construction Polaris en difficulté financière. Hydro-Québec refuse de lui rembourser les coûts supplémentaires, prétextant que la réclamation de l’entrepreneur n’est pas assez détaillée.
La banque de Polaris exige qu’elle injecte 2,5 M$ en liquidités, sans quoi c’est la faillite.
Hydro et Polaris se rencontrent le 25 mai pour régler une avance de 4 M$. Polaris et son partenaire financier présentent un plan qui inclut l’avance annoncée. Mais Hydro-Québec rejette ce plan.
Elle offre plutôt de payer immédiatement 10 M$ à Polaris pour l’ensemble de sa réclamation de 24,7 M$. Hydro-Québec exige une réponse le matin même. Polaris est coincée. Elle accepte pour éviter la faillite.
Poursuite
En novembre 2013, Construction Polaris dépose une poursuite de 63,5 M$ contre Hydro-Québec.
La société d’État conteste et affirme que l’entente empêche Polaris de lui réclamer quelque montant que ce soit relativement aux coûts supplémentaires.
« La mauvaise foi d’Hydro-Québec [...] ne fait aucun doute dans l’esprit du tribunal. Les manifestations de cette mauvaise foi sont nombreuses », dit le juge de la Cour supérieure Michel A. Pinsonnault dans son jugement du 20 avril 2018.
« Si la bonne foi avait été de la partie [...], les représentants d’HQ auraient à tout le moins tenté d’élaborer une solution acceptable avec Polaris », ajoute-t-il.
Le juge Pinsonnault rejette aussi sévèrement la défense des représentants et des témoins d’Hydro-Québec. « Le tribunal considère [la version des faits d’Hydro-Québec] tout à fait invraisemblable, non plausible, voire même non crédible », écrit-il.
La Cour accueille donc la demande de Polaris et annule le contrat du 27 mai 2011. Par le fait même, elle ordonne la tenue d’un procès pour décider de la réclamation de 63,5 M$ de Polaris contre Hydro-Québec.