La maladie du cerf pourrait avoir muté, selon un expert
Les 3000 animaux d’où provient une bête malade n’ont toujours pas été abattus
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GRENVILLE-SUR-LA-ROUGE | Les 3000 cerfs d’élevage d’où provient une bête atteinte d’une maladie très contagieuse et qui a le potentiel de se transmettre aux humains n’ont toujours pas été abattus.
Selon le Dr Elmehdi Haddou, de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), la maladie débilitante du cervidé pourrait être en train de muter.
« Une première étude démontrait que ça ne touchait pas les macaques. Une nouvelle étude montre que ça infecte les macaques. Est-ce une mutation ? On ne le sait pas encore », a-t-il dit en entrevue hier soir en marge d’une assemblée publique à Grenville-sur-la-Rouge réunissant des citoyens et des chasseurs.
Un premier cerf rouge atteint par la maladie a été trouvé dans un troupeau de la ferme Harpur Farms à Grenville-sur-la-Rouge. Quelque 60 cerfs ont été abattus dans le troupeau. Les tests ont tous été négatifs.
Vingt-sept autres cerfs ont été abattus près de la zone où la chasse est interdite en Outaouais et dans les Laurentides. Les tests sur ces bêtes étaient aussi négatifs.
Les tuer quand même
Des experts canadiens et américains recommandent cependant d’abattre immédiatement le troupeau de 3000 têtes pour éviter tout risque de propagation.
Ils suggèrent aussi de condamner la ferme Harpur Farms puisque la maladie débilitante du cervidé peut demeurer pendant des années dans le sol.
Le ministère de la Faune a dit attendre une étude de l’ACIA avant de trancher.
La maladie se transmet via les excréments par le sol ou l’eau contaminés. Deux ruisseaux passent sur le site de la ferme de Grenville-sur-la-Rouge et se déversent dans la rivière Rouge qui longe l’élevage.
Jusqu’à présent, aucun cas de transmission aux humains n’a été répertorié dans le monde. Mais Santé Canada considère que la maladie « a le potentiel d’infecter les humains ».
Il est donc recommandé de ne pas manger de la viande de cerf infecté. La chasse a été interdite dans un territoire de 400 km2 autour de la ferme Harpur Farms.
Le ministère de la Faune enquête sur la provenance de la maladie pour savoir comment l’animal malade a été infecté.
Cerf américain ?
Une source anonyme a indiqué hier qu’il n’est pas exclu qu’une bête entrée illégalement au Québec en provenance des États-Unis soit à l’origine de la crise actuelle.
Le ministère a confirmé hier que l’animal malade avait été découvert à un abattoir qui appartient également à Harpur Farms, situé à Saint-André-Avellin. L’abattoir est toujours en service.
Le prion à l’origine de la maladie est indestructible et résiste aux hautes températures et à l’eau de Javel.
– Avec Anne-Caroline Desplanques
Les drapeaux rouges s’accumulent
Les scientifiques lèvent des drapeaux rouges concernant la maladie débilitante chronique (MDC) des cervidés depuis près de deux ans.
►Janvier 2017
Selon le comité scientifique de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, « il n’y a pas de preuve qu’il existe une barrière des espèces absolue entre les cervidés affectés par la MDC et les humains ». Il appelle donc à des mesures de protection à l’égard des produits provenant de zones infectées, afin d’empêcher l’introduction de la maladie en Europe.
►Mars 2017
Le comité scientifique pour la sécurité alimentaire de la Norvège, où la maladie a été détectée en mars 2016, décrète l’« état d’urgence pour le futur des cervidés ». Il décrit la MDC comme hautement contagieuse, fatale et persistante. Il recommande des mesures agressives pour contrôler et éradiquer la maladie.
►Mai 2017
La Dre Stefanie Czub, de l’Agence canadienne d’inspection des aliments, présente lors d’une conférence en Écosse les résultats préliminaires de son expérience en cours sur des singes : des primates ayant consommé du cerf contaminé ont été infectés et sont décédés.
►Juillet 2017
Des chercheurs du département de l’Agriculture des États-Unis démontrent que des porcs d’élevages peuvent être infectés par la MCD en mangeant de la nourriture contaminée. Même s’ils restent asymptomatiques, ils deviennent des réservoirs de la maladie et peuvent la répandre et y exposer les humains.
Cette carte produite par le National Wildlife Health Center des États-Unis montre l’étendue de l’épidémie en Amérique du Nord. Les points rouges sont les foyers actifs dans des fermes. Le point rouge encerclé est l’élevage de Grenville-sur-la-Rouge. Les points jaunes représentent les fermes où des cas ont été détectés, mais où tout le cheptel a été éradiqué. Les zones en gris clair sont des secteurs où des cervidés sauvages sont infectés depuis 2000. Dans celles en gris foncé, les cervidés sont infectés depuis avant l’an 2000.