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Les insectes, sources de protéines de l’avenir?

Thai traditional food grasshoppers,larvae
Photo Adobe stock


On estime que d’ici 2050, nous aurons besoin de 50 % plus de nourriture pour assurer la survie des humains à l’échelle du globe. Un défi de taille, puisque notre modèle actuel basé sur l’élevage intensif de bétail est de plus en plus pointé du doigt pour son impact dévastateur sur le climat et nos écosystèmes. Est-ce que des sources de protéines alternatives peu énergivores et peu polluantes comme les insectes pourraient s’avérer être une solution intéressante ?

Passé insectivore

Bien qu’elle soit à peu près inexistante dans les pays riches, l’utilisation d’insectes à des fins alimentaires (l’entomophagie) est une pratique très courante à l’échelle du globe, avec pas moins de 2 milliards d’humains qui en consomment régulièrement. Ces habitudes alimentaires ne sont pas tellement étonnantes si l’on considère que les insectes font depuis longtemps partie de l’alimentation des mammifères : une analyse récente indique que les premiers euthériens (mammifères à placenta) qui sont apparus après l’extinction des dinosaures au Crétacé possédaient déjà des gènes codant pour des enzymes (chitinases) spécialisées dans la digestion de l’exosquelette riche en chitine des insectes (1). Plus près de nous, on sait depuis longtemps que même s’ils sont surtout végétariens, les grands singes, avec qui nous partageons 98 % de nos gènes, consomment une grande variété d’insectes (termites, fourmis, abeilles), de larves et de vers.

Une des particularités intéressantes de ces insectes est de contenir beaucoup de vitamine B12, une vitamine essentielle retrouvée exclusivement dans les produits d’origine animale (le contenu en B12 de certains insectes est jusqu’à 10 fois plus élevé que celui du bœuf). On peut donc penser que cette consommation d’insectes a contribué à assurer un apport adéquat en vitamine B12 au cours des premières étapes de l’évolution de l’espèce humaine, avant que la viande ne fasse partie de notre alimentation. Il pourrait également s’agir d’une source intéressante de B12 pour les végétaliens qui ne consomment aucun produit d’origine animale et qui sont donc à risque de présenter des carences en B12. Malheureusement, une étude récente rapporte que les véganes sont en général beaucoup plus réfractaires à consommer des insectes que les omnivores ou les végétariens (2), et ces personnes doivent donc se tourner vers les suppléments pour obtenir un apport en B12 adéquat.

Nutritifs et bons pour le côlon !

En plus de la vitamine B12, les études qui se sont penchées sur le contenu nutritionnel des insectes indiquent que ces derniers se comparent avantageusement aux viandes couramment consommées par la population (3). Par exemple, comparativement au bœuf, au porc et au poulet, les insectes en général présentent un contenu similaire en calories, protéines et en gras, et des quantités plus élevées en calcium, fer et en vitamines A, C et B2 (riboflavine). Chez certaines espèces comme le ver mopane (un cousin du ver à soie qui est considéré comme un mets délicat en Afrique du Sud), le contenu en protéines peut même atteindre 35 g par 100 g, presque deux fois la quantité retrouvée dans le bœuf.

Les insectes contiennent également beaucoup de fibres et une étude récente suggère que ce contenu élevé pourrait influencer positivement la santé du côlon (4). Dans cette étude, les volontaires (20 personnes dans chaque groupe) ont consommé pendant 14 jours un déjeuner composé d’un muffin et un lait au chocolat contenant ou non 25 g de poudre de cricket, après quoi des échantillons de sang et de selles ont été prélevés et analysés. Les chercheurs ont observé que la consommation de la poudre de cricket provoquait une hausse importante (près de 6 fois) des niveaux de la bactérie probiotique Bifidobacterium animalis au niveau du côlon et était également associée à une réduction des taux sanguins de TNF-a, une molécule inflammatoire. Il semble donc que la consommation de cricket pourrait être bénéfique pour le microbiome intestinal et réduire l’inflammation systémique, deux effets positifs pour la santé.

Il existe évidemment d’importantes barrières culturelles à la consommation d’insectes ou de larves sous formes entières. Par contre, plusieurs produits à base de farines d’insectes (pâtes alimentaires et barres granolas, entre autres) ont commencé à voir le jour et on peut penser que ces aliments sont plus faciles à intégrer aux habitudes alimentaires occidentales. Chose certaine, il est maintenant clairement établi qu’il faut absolument diminuer la consommation de viandes rouges si on espère limiter les dégâts environnementaux qui découlent de l’élevage intensif. Sans être le seul facteur pouvant contribuer à cette réduction des dommages, la production d’insectes représente certainement une alternative intéressante en raison de son faible coût, son haut rendement en éléments nutritifs et sa très faible empreinte écologique.


(1) Emerling CA et coll. Chitinase genes (CHIAs) provide genomic footprints of a post-Cretaceous dietary radiation in placental mammals. Sci Adv. 2018 ; 4 : eaar6478.

(2) Elorinne A et coll. Insect consumption attitudes among vegans, non-vegan vegetarians, and omnivores. Nutrients, publié en ligne le 29 janvier 2019.

(3) Voelker R. Can insects compete with beef, poultry as nutritional powerhouses? JAMA, publié en ligne le 16 janvier 2019.

(4) Stull VJ et coll. Impact of edible cricket consumption on gut microbiota in healthy adults, a double-blind, randomized crossover trial. Sci. Rep. 2018 ; 8 : 10762.







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