Affaire Louis Robert: Le nombre d’agronomes au MAPAQ a baissé de 50%
Les entreprises vendant des pesticides jouent le rôle de conseiller auprès des cultivateurs
Depuis 1990, le ministère de l’Agriculture (MAPAQ) s’est progressivement retiré de son rôle de conseiller auprès des cultivateurs et a laissé sa place aux entreprises privées qui vendent des pesticides.
« Dans les années 1980, le MAPAQ a laissé aller le service-conseil [...] Il y a une baisse de 50 % des agronomes au MAPAQ depuis 1990 », a soutenu Michel Duval, le président de l’Ordre des agronomes, lors de son passage en commission parlementaire sur les impacts des pesticides sur la santé publique et l’environnement, déclenchée dans la foulée de l’affaire Louis Robert.
Le service-conseil offert par ces professionnels est pourtant très important. Ce sont eux qui peuvent déterminer le type de pesticide à utiliser, la quantité nécessaire et les zones à pulvériser.
Cet état de fait inquiète les élus. La caquiste Marie-Louise Tardif juge « préoccupant » que de plus en plus de prescriptions de pesticides soient faites par des agronomes rémunérés par des détaillants de pesticides.
Travail d’enquête difficile
Pour assurer une meilleure reddition de compte, l’Ordre aimerait que les entreprises qui emploient des agronomes séparent sur la facture la vente du pesticide et le service-conseil avec l’identité du professionnel.
Ce n’est pas le cas pour l’instant, ce qui rend très difficile le travail d’enquête, souligne M. Duval.
Pour éviter tout conflit d’intérêts, l’organisme environnemental Équiterre demande pour sa part le retour à 100 % des services-conseils « indépendants de l’industrie des pesticides » et financés par l’État.
De son côté, la Coop fédérée, un gros joueur dans la vente de pesticide, soutient que ses agronomes sont tenus de suivre à la lettre leur code de déontologie. Elle reconnaît toutefois que trop de pesticides se retrouvent dans l’environnement.
Elle recommande elle-même au gouvernement de surveiller davantage les « bandes riveraines » longeant les cours d’eau, qui doivent servir de tampon pour empêcher les pesticides de s’y retrouver. Elles sont souvent rognées pour augmenter la superficie cultivable.
« Les bandes riveraines ne sont pas surveillées. Ça devrait l’être », a indiqué Sébastien Léveillé, agronome et vice-président de Sollio Agriculture, une filiale de la Coop.
Louis Robert sera entendu
Mardi, la question du financement de la recherche sur les pesticides sera à l’avant-plan avec le passage attendu de l’agronome Louis Robert.
Le vétéran du MAPAQ a été limogé en début d’année après avoir donné à des médias des documents accablants démontrant l’ingérence du secteur privé dans la recherche publique sur l’utilisation des pesticides. Il a été réintégré dans ses fonctions cet été après un rapport accablant de la vérificatrice générale.
MANDAT D’INITIATIVE SUR LES IMPACTS DES PESTICIDES SUR LA SANTÉ PUBLIQUE ET L’ENVIRONNEMENT
- Les audiences ont lieu du 23 au 26 septembre à l’Assemblée nationale
- Vingt-six intervenants sont entendus, dont Équiterre, l’Ordre des agronomes et la Coop fédérée, un grand distributeur de pesticides, ainsi que Louis Robert
- La commission parlementaire a été lancée après l’affaire Louis Robert
- L’agronome a été congédié par le MAPAQ après avoir dénoncé l’ingérence du secteur privé dans la recherche publique sur l’utilisation des pesticides
- Il a été réintégré dans ses fonctions après un rapport dévastateur de la vérificatrice générale