Les galeries d’art anticipent des pertes importantes
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Les galeries d’art écopent aussi de la crise actuelle. Même s'ils n’ont pas reçu de directives obligatoires pour mettre la clé sous la porte, tous les galeristes contactés par Le Journal, jeudi, ont décidé de fermer volontairement dans les dernières heures, anticipant des pertes financières importantes pour eux et les artistes qu'ils représentent.
«On ferme parce que c’est dangereux pour la santé des employés», a expliqué, à l'autre bout du fil, Vincent Beauchamp, propriétaire d’une dizaine de galeries d’art à travers le Canada, lui-même en quarantaine parce qu’il revient de voyage.
«Au début de la semaine, c’était rempli de touristes dans la galerie du Vieux-Québec. Des touristes qui n’avaient pas d’autre chose à faire, tout est fermé. Ils échangent avec les employés, ils jasent, ils toussent. Les employés avaient peur», a-t-il ajouté.
De grosses pertes
Vincent Beauchamp avoue qu’il préfère ne pas penser aux pertes financières que lui-même encaissera, mais aussi les dizaines d'artistes qu'il représente. «Moi, je pense qu’on perdra au moins deux mois dans l’année», dit-il, précisant que 50% de sa clientèle dans le Vieux-Québec est composée de touristes.
Les autres galeristes contactés s’attendent, eux aussi, à une période «destructrice» qui durera plusieurs semaines, a évoqué entre autres Alex Leibner, le directeur de la Galerie D’Este, à Montréal, qui s’apprêtait jeudi à fermer ses portes pour une durée indéterminée.
«Si les gens perdent leur job, acheter des œuvres d’art n’est pas la priorité», a soulevé Laura Barcia, directrice de la galerie Lacerte Art Contemporain, située sur le boulevard Saint-Laurent à Montréal.
En réflexion à savoir quelle stratégie elle adoptera, la galeriste Kathie Robitaille, de la galerie Urbania, dans le Vieux-Québec, tentait jeudi de trouver les meilleures solutions pour la quarantaine d’artistes qu’elle représente. «Ce sont de grosses pertes financières», a-t-elle commenté, découragée devant la situation.
D’autres stratégies
Beaucoup de galeries d’art resteront toutefois ouvertes sur rendez-vous. «Mais je ne m’attends pas à en avoir beaucoup», a précisé le directeur de la galerie d’Este.
À Québec, la Galerie 3 continue aussi de prendre rendez-vous avec les collectionneurs et conservateurs, «ceux avec qui on a déjà une relation d’affaires, précise le copropriétaire Abdelilah Chiguer. Pas pour les groupes et pas pour le plaisir non plus. On veut offrir un lieu qui sera sécuritaire pour tout le monde.»
Pour survivre à la crise, il estime qu’il faut «transformer les relations» avec la clientèle. «Ça se fait plus en ligne et par téléphone. On va continuer, mais d’une façon différente», a dit celui qui avait investi dans la refonte du site web de la galerie dans les derniers mois.
De l’espoir
D’ailleurs, beaucoup de galeries font la promotion, sur les réseaux sociaux, de leurs collections disponibles en ligne. «Il faut garder contact avec notre clientèle», souligne Lyne Parent, propriétaire de la Galerie Blanche, à Montréal, et dont la réserve d’environ 200 œuvres se trouve en ligne.
Cette dernière, galeriste depuis de nombreuses années, apporte un peu d’espoir face à la situation.
«Il faut laisser passer le temps, pour que les gens s’adaptent à la nouvelle situation, avant qu'ils recommencent à acheter. J’ai passé la récession de 2008. Il n’y avait personne à la galerie. Les journées étaient très longues. À un moment donné, c’est reparti et le chiffre d’affaires a explosé. Je suis certaine que c’est le même scénario qui va se passer.»