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La belle part de l’orgueil

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Ah, les oiseaux de malheur... Attention, je ne parle pas ici de ceux qui s’occupent de nous rapporter concrètement l’information, qui ne sont pas là pour nous faire plaisir ou nous flatter dans le sens du poil, et qui ne passent pas par quatre chemins pour nous coller le nez sur nos ratés et nos contradictions. Non, ce que j’entends par «oiseaux de malheur», sont ceux qui confondent leur mal de vivre avec le destin qu’ils prédisent à l’humanité. Ceux qui misent toujours sur la défaite et qui prennent systématiquement le pari perdant en toutes circonstances, en pensant ainsi faire preuve de sagesse et de lucidité.   

Mais d’abord, ne soyons pas injustes: oui, ça se peut qu’après la pandémie, nous retournions dans le rang, tête baissée et sans mot dire, dans la course effrénée de notre propre perte. Oui, ça se peut que demain, ça fasse déjà 15 ans depuis le coronavirus et que nous en ayons oublié toutes les leçons. Que nous constations par le fait même que nous avons depuis longtemps repris nos airs de société cynique, stagnante, morose et suicidaire, qui sabote et sacrifie son environnement et son avenir pour le salut de ses plaisirs et de sa surconsommation. Tout comme il est tout à fait possible que nous recommencions à agir en ingrats cruels avec nos aînés, nos infirmières, nos professeurs, nos camionneurs, nos commis d’épicerie et tous ceux qu’on aime appeler nos anges aujourd’hui, mais dont nous avions fort peu de scrupules à laisser piétiner les ailes jusqu’à tout récemment.   

Tout ça est possible, et il ne s’agit pas de le nier, mais de simplement garder en tête que rien n’est encore joué. Que la suite reste à écrire, que nous avons tous un crayon entre les mains et que l’optimisme demeure, encore à ce jour, notre meilleur allié.   

Mais voilà, contrairement à la croyance populaire, l’optimisme, ce n’est pas de chanter la mélodie du bonheur, telle une Julie Andrews aux yeux bandés tournoyant au milieu des ruines et des cadavres. L’optimisme, c’est avoir le courage de regarder tout ce qui va mal dans les yeux et de délibérément choisir de ne pas lâcher le morceau. Finalement, l’optimisme, c’est de prendre le pari, même si fou et improbable, que nous allons réussir. C’est ce que j’aime appeler la belle part de l’orgueil. Celle qui pourvoit la dignité au cœur des éprouvés et qui raidit la colonne de ceux qui refusent de plier sous le poids de la tempête.   

Même si bien naïf et déconnecté serait celui qui affirmerait sans rougir que tout va parfaitement bien en ce moment, je me dis que ce pari fou, nous nous devons néanmoins de le prendre et de le réaffirmer tous les jours. Surtout, nous nous devons de le faire non seulement en notre nom et en celui de nos enfants, mais également en celui de tous ceux qui ont vu des proches disparaître sans pouvoir leur dire proprement au revoir ou leur tenir la main. Au nom de tous ceux qui ont vu le fruit de toute une vie de travail, d’investissements et de sacrifices être réduit à rien en l’espace d’une quarantaine de jours. Et de tous ceux, enfin, qui ont vu leur couple et leur famille être torpillés par un isolement et une promiscuité si soudains, qu’ils ne pouvaient malheureusement pas aller sans conséquences, parfois même tragiques ou inimaginables. C’est à mon sens la seule façon de préserver nos compatriotes qui auront le plus perdu et le plus souffert dans cette histoire de l’horrible impression de n’avoir été que les numéros malchanceux tirés à la loterie sadique d’un destin malveillant.   

Ma mère a toujours eu cette même phrase devant à l’adversité, de la plus enquiquinante à la plus terrible: «pourvu que ça serve». C’est précisément ce qui nourrit en moi la conviction que tout ce que nous vivons présentement doit impérativement servir à quelque chose. Un meilleur et plus grand dessein que le seul retour à une normalité qui n’était pas si rose que ça, si on se souvient bien...  

En terminant, je remarque que parmi tous les défis qu’il y a en filigrane sous celui, déjà immense, de faire face à la COVID-19, se trouve notamment celui de nous protéger du cynisme virulent, qui pousse les oiseaux de malheur à croasser que le monde de demain, non seulement ne sera pas meilleur, mais sera même pire. Voilà pourquoi je crois que nous devons, plus que jamais, nous relever un peu plus haut les manches, malgré nos bras écorchés, et tenir à distance de notre moral ceux qui, parce qu’ils sont terrifiés eux-mêmes, cherchent à nous mettre de l’eau dans le gaz, car nous avons, plus que tout, le devoir de leur donner tort. Chers amis, en ces temps si incertains, rappelons-nous que l’avenir est devant et que c’est en continuant d’aller vaillamment vers lui qu’un peuple reconquiert et entérine sa fierté de lui-même et sort toujours debout et plus fort des chapitres difficiles de son histoire. 

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