/news/coronavirus
Navigation

Le virus des fausses nouvelles: internet est devenu un véritable Far West en temps de pandémie

Bill Gates, les vaccins, l’origine du virus, les théories du complot, des personnalités qui relaient de fausses nouvelles, la désinformation s’est répandue aussi rapidement que la COVID-19

FD-Manif devant le Parlement confinement
Photo d'archives, Agence QMI Portés par des manifestations aux États-Unis, des manifestants québécois se sont aussi fait entendre devant l’Assemblée nationale à Québec. La rage anticonfinement a toutefois laissé place à certains amalgames douteux, comme celui avec la fameuse 5G.

Coup d'oeil sur cet article

Les fausses nouvelles et autres théories du complot liées à la COVID-19 se sont répandues aussi rapidement sur le web que le virus lui-même à travers le monde.

• À lire aussi: Désinformation d’une ampleur inégalée

À un tel point que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a même utilisé le terme « infodémie », une contraction des mots information et pandémie, pour décrire le phénomène.

Le Journal vous a préparé une compilation de certaines de ces fausses nouvelles, révisées par les équipes de vérifications de faits de plusieurs organisations comme l’AFP, Dépister la Désinfo de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec et les Décrypteurs de Radio-Canada.

Des dirigeants qui jettent de l’huile sur le feu  

Certains dirigeants internationaux et des vedettes d’un peu partout ont adopté le narratif des partisans de la fausse nouvelle en minimisant ou tout simplement en niant les effets de la crise du coronavirus.

Un tel comportement a eu pour effet d’amplifier la crise dans ces pays et de donner des munitions à cette « infodémie ».

« C’est certain que si des politiciens partagent des fausses nouvelles ou des fausses informations, ça vient renforcer les propos de certains qui y adhèrent déjà. Ça leur donne du poids dans leur argumentation », explique Marie-Eve Carignan, professeure au Département de communication à l'Université de Sherbrooke. 

Donald Trump – États-Unis

FD-Manif devant le Parlement confinement
Photo d'archives, AFP

Dès le début de la crise, le président américain a minimisé les impacts de la COVID-19 et a multiplié les déclarations controversées.

Sa base militante, souvent liée de près aux thèses complotistes, a fait les choux gras de cette attitude du président, allant même jusqu’à affirmer que la pandémie mondiale n’était qu’une machination visant à expulser Donald Trump de la Maison-Blanche.

« Donald Trump n’a jamais été un allié pour la science. Il ne l’est pas plus pour la pandémie. Il a ses croyances, il propage beaucoup de fausses nouvelles dans plusieurs secteurs », déplore Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec. 

Boris Johnson – Grande-Bretagne

FD-Manif devant le Parlement confinement
Photo d'archives, AFP

Autre dirigeant qui a minimisé les effets du coronavirus en début de crise, il a mis du temps à mettre en place les mesures de confinement.

En fait, en mars, le premier ministre britannique avait même évoqué la possibilité que le pays « prenne [le virus] au menton d’un seul coup » pour développer une certaine immunité collective, une idée rapidement repoussée du revers de la main par les autorités sanitaires locales.

Le discours de Boris Johnson a finalement changé le jour où il a lui-même contracté le virus à la fin mars, se retrouvant même hospitalisé aux soins intensifs quelques jours. 

Jair Bolsonaro – Brésil

FD-Manif devant le Parlement confinement
Photo d'archives, AFP

Président de droite provenant du même moule que Donald Trump et Boris Johnson, Jair Bolsonaro a continué de nier les lourdes conséquences de la COVID-19 même si son pays sombrait dans une crise majeure.

À la fin avril, alors que le cap des 5000 morts était passé, le président s’est permis de répondre un « Et alors ? » bien senti à la réponse d’un journaliste sur le bilan. « Que voulez-vous que je fasse », a-t-il ajouté.

Depuis, Bolsonaro a poussé vers la sortie son ministre de la Santé et le Brésil est l’un des pays les plus touchés au monde avec plus de 955 377 cas confirmés en date de jeudi. 

Le chiffre pourrait être plus élevé selon les experts en raison du faible nombre de tests. 

Des vertes et des pas mûres  

Eau de javel et désinfectant

FD-Manif devant le Parlement confinement
Photo Fotolia

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a ajouté ces produits à sa page web « En finir avec les idées reçues » après que le président américain Donald Trump eut lancé cette ligne : « Je vois que le désinfectant l’assomme [le virus] en une minute. Une minute. Et est-ce qu’il y a un moyen de faire quelque chose comme ça avec une injection à l’intérieur ou presque comme un nettoyage ? »

M. Trump avait ensuite indiqué que ses propos avaient été saisis hors contexte, mais il était trop tard.

Craignant que des gens tentent de se soigner ou de se prémunir du virus en ingérant des produits dangereux pour leur santé, l’OMS et le fabricant Lysol ont rapidement émis des mises en garde « en raison de l’activité sur les réseaux sociaux ».

Pelures d’orange et piments de cayenne

FD-Manif devant le Parlement confinement
Capture d'écran

Une publication anglophone qui a circulé sur Facebook faisait état de cette recette plutôt particulière pour se prémunir du virus.

Partagée plus de 44 000 fois, la fausse information conseillait de faire bouillir dans de l’eau des pelures d’orange et de la poudre de cayenne, puis de respirer les vapeurs qui en émanaient.

On y vantait l’efficacité de la méthode pour éliminer le mucus, présenté à tort comme l’endroit où se cachait le virus.

Breuvage d’artemisia

Le président de Madagascar, Andry Rajoelina.
Photo d'archives, AFP
Le président de Madagascar, Andry Rajoelina.

La plante artemisia a des vertus prouvées contre le paludisme, mais l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rapidement prévenu qu’aucune étude crédible ne lui présentait des vertus contre le coronavirus, contrairement à ce qu’affirmait le président de Madagascar, Andry Rajoelina.

Le breuvage a tellement fait jaser que d’autres fausses nouvelles reliées en sont nées.

L’une d’elles affirmait que le président malgache avait refusé des offres de l’OMS, de la Chine ou des États-Unis pour empoisonner sa tisane-remède, alors qu’une autre assurait que la Russie s’approvisionnait aussi en artemisia.

Le masque et lE manque d’oxygène

FD-Manif devant le Parlement confinement
Capture d'écran

Le sujet du port du masque ayant été relancé avec la proposition de certains experts de le rendre obligatoire, les fausses nouvelles entourant celui-ci ont recommencé à circuler. 

La plus coriace ? Le masque cause l’hypoxie, soit une baisse du taux d’oxygène dans le sang. 

« Certaines personnes conduisent leur voiture avec le masque, ce qui est très dangereux, car l’air vicié peut faire perdre conscience au conducteur », affirme même une publication alarmiste affichant la signature d’un certain « Dr Dennis A Castro » pour tenter d’en augmenter la crédibilité. 

L’avis des experts est toutefois contraire. En fait, le maillage des tissus des masques n’empêche en aucun cas la circulation des gaz comme l’oxygène, permettant seulement de minimiser la dispersion de gouttelettes liquides. 

4 faussetés sur Bill Gates  

 Bill Gates, fondateur de Microsoft, est devenu au cours des derniers mois une cible parfaite pour les partisans de la théorie du complot. Voici quelques exemples de fausses nouvelles ayant circulé à son sujet.

1- Il veut profiter du vaccin pour implanter une micropuce à la population

FAUX

FD-Manif devant le Parlement confinement
Capture d'écran

Ce mythe a la couenne dure depuis avril. Il proviendrait d’une séance de questions-réponses organisée par Gates sur le réseau social Reddit où le milliardaire a abordé la question d’un « certificat numérique » qui démontrerait qui a été testé ou qui a été vacciné par exemple.

Trois jours plus tard, une vidéo publiée par une église baptiste de la Floride présentant cette théorie déformée était vue par 2 millions de personnes, la nouvelle se répandant alors comme une traînée de poudre.

2- Il souhaite éliminer 15 % de la population avec les vaccins

FAUX 

Dans le cas de cette nouvelle, ce sont les propos tronqués de Bill Gates lors d’une entrevue qui ont tout déclenché.

Abordant la rapide croissance de la population, le philanthrope affirmait qu’il était possible de la ralentir de 10 % à 15 %, entre autres si le développement de vaccins efficaces se poursuivait.

Mais lorsque coupés ou mal traduits, ses propos laissent croire qu’il souhaite réduire la population entière de 10 % à 15 %.

Appliquez ces propos à la crise du coronavirus et à l’urgence du développement d’un vaccin et vous aurez une parfaite fausse nouvelle qui se propagera rapidement.

D’autant plus qu’un montage photo a également circulé en ligne montrant un immeuble de la fondation du couple Gates affublé de l’inscription « Center for global human population reduction » (Centre pour la réduction de la population humaine mondiale). 

3- Il a lui-même refusé de faire vacciner ses enfants

FAUX 

Un texte affirmant que les enfants de Bill Gates ne seraient pas vaccinés circule en ligne depuis quelques années.

On y cite un médecin qui aurait traité la famille à Seattle dans les années 1990... sans jamais nommer ledit professionnel de la santé.

La femme du milliardaire, Melinda Gates, a déjà réfuté cette théorie en avril 2019, affirmant sur sa page Facebook que « ses trois enfants avaient été vaccinés ». 

4- Il avait prédit la pandémie de la COVID-19

FAUX

Cette idée provient d’une simulation qui s’est tenue en 2019 à New York, appelée « Event 201 ».

La Fondation Bill et Melinda Gates collaborait à l’organisation de l’événement, d’où le lien avec Gates, qui avait également abordé le risque d’une grande pandémie en 2015 lors d’une conférence.

Ces deux événements sans lien avec la COVID-19 ont été suffisants pour alimenter des tonnes de théories liant le philanthrope à la propagation de la maladie pour ses propres intérêts.