Explosions à Beyrouth: des Montréalais inquiets pour leurs proches
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MONTRÉAL | Plusieurs Montréalais d’origine libanaise étaient sous le choc mercredi. En plus d’avoir vu le port et une bonne partie de la ville de Beyrouth partir en fumée la veille, certains d’entre eux n’arrivaient toujours pas à joindre leurs proches.
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Depuis les explosions de mardi, les yeux d’Ephrem Tabbakh sont rivés sur des écrans en quête d’informations. Le sexagénaire, qui demeure aujourd’hui dans le quartier Ahuntsic, tente en vain de rejoindre ses proches qui vivent à un peu plus d’une demi-heure du site de l’explosion.
«Le Liban n’avait pas besoin de cette catastrophe. [En plus] de la COVID-19, on avait vraiment des périodes difficiles d’un point de vue économique. Le Liban est endetté jusqu’au cou et n’arrive pas à s’en sortir. Ça met les gens dans des problèmes durs, durs, durs», a-t-il déploré mercredi.
Le choc est «horrible» pour Beatrice Moukhaiber, une artiste multidisciplinaire qui est arrivée avec sa famille il y a huit ans en provenance du Liban, où demeurent toujours beaucoup de ses tantes, de ses oncles et de ses cousins.
Elle a reçu plusieurs nouvelles de ses proches, mais est toujours en attente dans d’autres cas. «J’attends encore beaucoup de nouvelles de personnes que je connais, d’amis, qu’on n’a pas encore trouvés. C’est très difficile», a-t-elle dit.
Mme Moukhaiber fait remarquer que les explosions sont survenues dans la partie la plus cosmopolite du pays. «Toutes les grosses galeries d’art, les restaurants, les rues piétonnières, tout est là. [...] Toute la sophistication de ce pays est dans ce coin-là et maintenant il ne reste plus rien. C’est comme si on nous a reculés de 30-40 ans, peut-être plus, en arrière», estime-t-elle.
George Bahi, qui habite aussi dans l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville, n’a pas pu fermer l’œil mardi soir. Le bureau où sa sœur travaille s’est transformé en tas de poussière en l’espace de quelques secondes. Par chance, elle avait quitté les lieux cinq minutes avant l’événement, mais son épaule a reçu quelques éclats de verre. «Elle m’a dit que c’était comme une bombe nucléaire. Dès qu’elle ferme les yeux, elle revoit ce qui s’est passé», a-t-il relaté.
«J’ai pleuré la nuit dernière. Que veux-tu que je fasse? Je ne peux rien faire pour eux [sa sœur et sa nièce âgée de deux ans]», a mentionné celui qui est natif de Beyrouth.
Se déplacer?
La pandémie rend les déplacements très difficiles, mais même s’il était possible de se rendre sur place, ce serait difficile d’aider, croient certains. « Même si on est capable de partir, nos actions sont minimes par rapport à ce que l’on peut faire. Il n’y a pas assez d’abris pour la population. Les prochains jours seront très sombres pour Beyrouth», a déploré Karim Abou Mehri, arrivé à Montréal en 2017 pour étudier en gestion.
Beatrice Moukhaiber, qui n’est pas allée au Liban depuis 2013, aimerait pour sa part y retourner éventuellement. «Si je peux aider et pouvoir rebâtir un pays, voir ma famille surtout et redécouvrir mon identité», lance-t-elle.
Ephrem Tabbakh ne prévoit pas y retourner, même s’il est fort touché par la situation. «Je n’y ai pas été depuis 1975. Moi, je préfère garder le Liban comme je l’ai connu», a-t-il dit.
«Ça fait mal de voir ça, car ici on jouit de la sécurité et on se plaint encore [...]. Là-bas, les gens n’ont pas tous les avantages qu’on a ici. Tu travailles toute ta vie et tu arrives à la fin avec rien», a-t-il ajouté.