La loi 21 force des travailleurs à renoncer à leurs croyances
Des avocats plaident que le texte sur la laïcité porte atteinte à la liberté de religion
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Demander à une enseignante sikhe de ne pas porter le turban en classe ou à un avocat juif de retirer sa kippa devant le tribunal équivaut à leur demander de renoncer à leurs croyances religieuses, ont plaidé des avocats qui contestent la Loi sur la laïcité de l’État.
« La loi 21 n’est pas une loi qui protège les croyances religieuses. Elle force la renonciation des croyances personnelles d’une personne qui veut enseigner », a résumé mercredi Me Faiz Lalani, au palais de justice de Montréal.
Les audiences concernant le sort de la Loi sur la laïcité de l’État tirent à leur fin, alors que les juristes présentent leurs plaidoiries finales au juge de la Cour supérieure Marc-André Blanchard.
Pour sa part, Me Lalani représente l’Organisation mondiale des sikhs du Canada et la professeure Amrit Kaur.
Cette dernière a grandi au Québec, y a étudié et souhaitait enseigner dans une commission scolaire anglophone de Montréal. Or, Mme Kaur a reçu son diplôme le jour de l’adoption de la loi 21.
« Elle a été forcée de déménager en Colombie-Britannique pour exercer son métier », a noté Me Lalani.
Pour sa cliente, se présenter en classe sans les cinq « articles de foi sikhs » – port des cheveux longs, peigne en bois sous le turban, bracelets de fer, poignard sous les vêtements et caleçon unisexe – serait comme se présenter toute nue devant ses élèves, a-t-il précisé.
« Cette atteinte à ses croyances religieuses n’est nullement justifiée », a martelé l’avocat, insistant sur le fait que la liberté de religion est un principe sacré depuis plusieurs siècles au Canada.
Droits inaliénables des citoyens
À son tour de parole, l’avocat représentant l’Association de droit Lord Reading, qui constitue la voix collective des juristes juifs au Québec, a souligné que l’Assemblée nationale avait l’obligation de garantir les droits inaliénables des citoyens.
« C’est mon droit de professer le judaïsme librement et ouvertement, comme je le fais aujourd’hui en tant qu’avocat », a plaidé en anglais Me Theodore Goloff, arborant fièrement une kippa blanche.
Membre du Barreau depuis quatre décennies, le juriste a demandé au juge Blanchard en quoi « cette pièce de tissu » sur sa tête offensait qui que ce soit.
Bagels et smoked meat
« Les juifs ne portent pas la kippa pour dire : “vous devez suivre ma façon de vivre, elle est meilleure que la vôtre.” C’est profondément personnel », a noté Me Goloff.
Pour lui, il est inconcevable qu’il ne puisse pas accéder à n’importe quelle position de confiance sans afficher ouvertement sa religion.
« Les juifs n’ont pas juste contribué aux bagels et aux smoked meat, a ironisé l’avocat. [...] Si je changeais de place avec mon collègue du Procureur général du Québec, la loi m’empêcherait de faire son travail, alors que lui pourrait faire le mien. »
► Les plaidoiries se poursuivent jeudi au palais de justice de Montréal.
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