2020: pas si vite, les oubliettes
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Si je suis aussi heureuse que vous de voir 2020 s’en aller, devant tous ceux et celles qui en appellent à oublier l’année que nous venons de passer, j’ai envie de dire : un instant, pas si vite, les oubliettes...
En effet, je crois que nous devons scrupuleusement nous garder d’oublier 2020. Si elle nous a certes éprouvés sur tous les fronts; si à tant d’égards, elle a été tragique, vache et révoltante, et qu’elle nous a refusé nos réconforts et plaisirs les plus élémentaires, à l’heure de tous les bilans, je constate qu’elle a également su nous rappeler à notre force de caractère, à nos courages et à nos intelligences les plus honorables.
En nous empêchant d’en jouir comme à l’accoutumée, elle nous a également rappelé les véritables essentiels et a mis en exergue les absurdités normales de nos courses contre la montre et de nos névroses quotidiennes. Elle nous a, par l’inusité de son urgence et contre toute attente, sortis d’une longue léthargie populaire qui nous avait transformés en grenouille qui ne remarque pas l’eau qui chauffe.
Bien sûr, c’est un vieux réflexe qui se comprend que celui de vouloir oublier pour ne pas stagner dans un état dépressif, de perte et de souffrance. L’ennui, c’est que dans ce cas-ci, oublier 2020 au nom de tout ce qu’elle nous a causé et enlevé, c’est aussi oublier le visage et les noms de tous ceux qui nous ont quittés, ainsi que ceux qui donnent tout pour empêcher le bateau de couler, au détriment de leur personne, de leur santé et de leurs familles.
C’est oublier tout ce qui nous a, au jour le jour, gardé le menton haut et ce qui a continué de nous faire sourire et poser un pied devant l’autre. C’est laisser partir le souvenir de notre résistance, de notre entêtement et de notre résilience, et c’est nous priver de la fierté d’avoir su en faire preuve de mille de manières.
C’est vrai, 2020 a été très difficile. Elle nous a fait stresser, pleurer et rager, et elle a brisé nombre de nos rêves et réalisations. Elle nous a sévèrement attaqué l’espoir et la foi en notre espèce, et nous a plus d’une fois poussée dans nos derniers retranchements. Toutefois, je ne peux m’empêcher de remarquer que, si elle a effectivement su mettre en relief nos travers, nos violences et nos parts d’ombres, elle a aussi mis en lumière nos plus dignes humanités, à travers l’importance de nos précieux aînés, de nos valeureux travailleurs, de nos brillants enseignants et de nos magnifiques enfants, dont elle nous a rappelé la réalité de l’existence et des besoins.
Enfin, je crois que si 2020 a vraiment fait quelque chose pour nous, au cœur de tout son fameux bordel, ce fut de tous nous nous ramener à un même diapason qui ne fait aucun cas de nos couleurs, de nos carrières ou de notre nombre d’abonnés. Ce faisant, je crois qu’il est honnête aujourd’hui d’anticiper une nouvelle année sous le signe de la conscience mutuelle, du dialogue et du respect, car 2020, s’est finalement un vaste point commun à l’humanité, à l’ère où l’hystérie des modes tend dangereusement à nous caser dans des boîtes individuelles à l’oxygène fuyant.
Enfin, sur une note personnelle, ce que je nous souhaite de tout mon cœur pour 2021, en plus d’une santé et d’une prospérité endémique, c’est que ceux qui sont tombés aient la force de se relever. Que ceux qui depuis se battent comme des lions pour ne pas chanceler parviennent à se stabiliser et que ceux qui ont été épargnés s’appliquent à offrir autant qu’ils ont reçu. Je nous souhaite de tenir bon, de nous retrouver bientôt et, en attendant, de ne surtout pas oublier 2020, car ça voudrait dire qu’elle ne nous aurait rien appris et qu’on aurait vécu tout ça pour rien.
Et en terminant, je tiens, au plus sincère de ma personne, à vous remercier, vous qui prenez encore le temps de nous lire, malgré tout ce qui arrive et les exigences de la situation et de nos vies. Bonne et heureuse année à tous et merci de nous accorder votre intérêt, votre confiance et votre curiosité, car si ce n’était pas de vous, très chers amis et essentiels lecteurs, nous écririons pour les pierres.