L’Université Laval bloque un chien d’assistance à une étudiante souffrant de problèmes de santé mentale
Elle ne peut amener l’animal en classe pour ses cours et examens en présence
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Une étudiante de l’Université Laval qui souffre de problèmes de santé mentale déplore que son chien d’assistance ne soit pas admis en classe, ce qui nuit à son bon fonctionnement dans ses études, affirme-t-elle.
Sara* souffre d’un trouble anxieux qui la pousse à faire des crises de panique pouvant la mener jusqu’à l’automutilation.
À la suite d’une recommandation de son médecin, la jeune femme de 23 ans a commencé l’été dernier l’entraînement d’un chien d’assistance, une femelle nommée Hazel qui l’accompagne désormais dans son quotidien. «Elle a changé ma vie», lance-t-elle.
Hazel est entraînée pour lui rappeler de prendre sa médication et même pour intervenir en cas de crises. «C’est vraiment rassurant de savoir qu’elle est là pour moi si j’ai une attaque de panique», dit Sara.
L’étudiante a demandé récemment au Centre d’aide aux étudiants de l’Université Laval un accommodement afin de pouvoir amener son chien en classe, lors des cours en présence et des examens théoriques, mais elle a essuyé un refus.
«Ils n’ont pas le droit de faire ça, c’est de la discrimination», laisse-t-elle tomber.
Le porte-parole de l’Université Laval, Simon La Terreur, explique que les chiens d’assistance (aussi appelé chiens de service) et chiens-guides sont acceptés comme mesure d’accommodement lorsqu’ils «aident les personnes aveugles, en fauteuil roulant ou ayant un trouble du spectre de l’autisme».
Handicap et santé mentale
Or selon la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, «le chien d’assistance et le chien guide sont reconnus comme un moyen de pallier un handicap», peu importe la nature de ce handicap.
La définition de ce qui constitue un handicap est par ailleurs beaucoup plus large que l’interprétation qu’en fait l’Université Laval, puisqu’il s’agit d’«un désavantage qui vous limite physiquement, mentalement ou psychologiquement», indique la Commission.
Il est donc tout à fait possible qu’un trouble de santé mentale soit considéré comme un handicap, selon l’Office des personnes handicapées du Québec. Même s’il est méconnu, le recours à un chien d’assistance pour des problèmes de santé mentale est de plus en plus répandu, affirme Frédérique Marchand, propriétaire de L’Allié/e Chien d’assistance, où Hazel a été entraînée.
Un fauteuil roulant
Sara n’est d’ailleurs pas la seule à avoir de la difficulté à faire accepter son chien d’assistance pour des raisons de santé mentale, ajoute l’entraîneuse.
«Pourtant, un chien, c’est comme une chaise roulante pour quelqu’un qui a une maladie invisible, dit-elle. Il y a des gens qui ne sortaient plus de chez eux avant et qui ont recommencé à vivre le jour où ils ont eu un chien.»
*Nom fictif. L’étudiante a requis l’anonymat pour éviter d’être stigmatisée en raison de ses problèmes de santé mentale.
Des règles absentes au Québec
La nature du handicap n’est pas le seul motif invoqué par l’Université Laval pour refuser à Sara* la présence de son chien d’assistance en classe. L’établissement exige aussi que l’animal ait été entraîné par une «école reconnue, comme Mira» et ait fait «l’objet d’une sélection génétique stricte».
De son côté, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse (CDPJ) indique que seuls les chiens d’assistance ou les chiens-guides «ayant été officiellement entraînés par un organisme et qui détient une preuve d’entraînement sont reconnus par les tribunaux».
La Commission précise toutefois qu’elle n’est pas spécialisée en la matière et qu’elle ne peut déterminer quels organismes sont accrédités ou non.
Conforme
Frédérique Marchand, propriétaire de L’allié/e Chien d’assistance où Hazel a été entraînée, assure de son côté que tout a été fait dans les règles de l’art.
Or le problème réside plutôt dans l’absence d’encadrement à ce chapitre, selon Sandra-Marie Hrycko, propriétaire de Solutions Canines SM, qui entraîne des chiens d’assistance qui interviendront auprès de gens souffrant d’un syndrome de stress post-traumatique.
«Là où le bât blesse, c’est que c’est un secteur qui n’est pas réglementé au Québec. Il n’y a aucun organisme accrédité parce qu’il n’y en a pas, d’accréditation», affirme-t-elle.
Quant à la «sélection génétique stricte» dont un chien d’assistance doit faire l’objet selon l’Université Laval, la CDPJ n’en fait aucunement mention. «Ça n’a aucun rapport», affirme de son côté Mme Hrycko.