«Grand champion toi-même!» disent les cols blancs à Labeaume
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Irrité par les «menaces» de l'administration Labeaume à l'endroit de ses employés qui ne respectent pas les mesures sanitaires, le syndicat des cols blancs demande au maire de faire le ménage dans sa propre cour avant de critiquer les autres.
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«Grand champion toi-même!» a lancé le syndicat à Régis Labeaume, dans un communiqué diffusé jeudi.
Le président Réal Pleau reprenait ainsi une expression utilisée par le maire la veille. Ce dernier critiquait le Méga Fitness Gym pour n'avoir pas respecté les mesures sanitaires et avoir donné lieu à une éclosion de 68 cas. «Bravo, champion! Tout le monde a de beaux biceps, mais, là, le monde est malade», avait pesté M. Labeaume.
Dans la même journée, on apprenait que des employés de la Ville venaient travailler avec des symptômes et que certains ne respectaient pas les règles sanitaires au travail. La direction générale a brandi le spectre de mesures disciplinaires.
«Le maire Labeaume peut bien, avec raison, s’en prendre à des commerçants qui n’ont pas suivi les règles sanitaires, mais quand il menace ses employés de sanctions s’ils contreviennent aux décrets du gouvernement, il devrait commencer par donner l’exemple», a fait valoir Réal Pleau. «Il y a des cas qui devraient être en télétravail aujourd'hui, qu'on tolère, et, là, on menace de sanctions. Ça n'a pas de bon sens.»
«Les gens qui n'ont pas d'affaire au bureau, mettez-les en télétravail [au lieu de] les sanctionner», a-t-il plaidé. «On envoie des menaces au lieu d'essayer de trouver des solutions. Je n'en reviens pas.»
Le maire de Québec ne s'est pas ému de ce qu'il a qualifié de «complainte indécente» du syndicat. Il trouve la sortie mal placée, dans un contexte où les gens de Québec «souffrent» de la pandémie, notamment ceux qui ont perdu leur emploi. «On ne me fera pas pleurer. C'est une plainte qui n’a aucune pertinence.» Pour lui, la Ville ne peut accepter que des employés mettent leurs collègues en danger en venant au travail même s'ils se savent atteints de symptômes.
La directrice générale adjointe Chantal Giguère a révélé que 10 employés sont actuellement positifs à la COVID à la Ville de Québec, et que ce sont surtout des employés des loisirs, de la police ou des travaux publics. «Il n'y a pas de cols blancs.»
De son côté, le chef de Démocratie Québec, Jean Rousseau, est d'avis que le maire a manqué de leadership. «C'est inapproprié. Il devrait faire preuve de plus de solidarité et c'est là où le leadership de la Ville devrait se faire sentir. Pas dans les critiques pour lesquelles on n'a pas les données pour savoir si c'est généralisé ou si ça ne concerne que quelques individus.»
Le Syndicat déplore depuis des mois que certains de ses employés soient forcés de travailler en présence. Il dit n'avoir reçu aucun avis à propos d'employés qui seraient venus travailler avec des symptômes. Même chose du côté du Syndicat des professionnels. Pour ces derniers, cependant, 90% des employés sont en télétravail, explique leur président, Michel Plante.
«Jamais autant de lettres disciplinaires»
Chez les cols bleus, la situation est différente. Ils sont le groupe de travailleurs qui est le plus présent sur les lieux de travail, confirme le président du syndicat, Félix Lindsay. «Par rapport à la COVID, on n'a jamais eu autant de lettres de disciplinaires à la grandeur de la ville» chez les employés manuels, dit-il. «C'est du jamais-vu.» Ce sont généralement des avertissements et des blâmes pour le non-respect des mesures sanitaires comme le port du masque et la distanciation.
M. Lindsay est d'avis que tous doivent respecter les consignes, mais il déplore «le manque de communication» de la part des gestionnaires et l'implantation inégale des règles. «En majeure partie, les membres suivent le protocole. Sauf que le protocole est appliqué différemment d'une place à l'autre. Les modes de gestion diffèrent d'un arrondissement à l'autre.»
Il regrette aussi la façon dont la direction générale de la Ville a transmis son message, par communiqué interne, menaçant les employés de sanctions. «Ils ont une cellule de crise qui ne nous communique jamais leur perspective et leur direction. Ça aurait été courtois de demander à tout le monde de s'ajuster. [...] On n'a pas tout le temps l'heure juste. Pour s'ajuster, il faut de la communication, et il n'y en a pas.»