Un seul navire à la traverse Québec-Lévis cet été

Alors que le ministère des Transports comptait sur la Société des traversiers pour diminuer les impacts des importants chantiers sur le pont Pierre-Laporte et l’autoroute Henri-IV, on apprend qu’un seul bateau, au lieu de deux, sera en service à la traverse Québec-Lévis cet été, ce qui a conduit le maire de Lévis à livrer un vibrant plaidoyer pour le troisième lien.

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La Société des traversiers (STQ) a annoncé jeudi que l’un des deux navires affectés à la traverse Québec-Lévis, le NM Alphonse-Desjardins, devrait plutôt être utilisé entre Saint-Joseph-de-la-Rive, dans Charlevoix, et L’Isle-aux-Coudres.

Du 15 juin au 7 septembre environ, le NM Lomer-Gouin sera donc seul à assurer le service entre Québec et Lévis.

«Vitement, un tunnel entre les deux rives, ça presse!» a réagi le maire de Lévis, Gilles Lehouillier, en conférence de presse ce matin.

Circulation chamboulée

Le ministère des Transports (MTQ) avait dévoilé, il y a deux semaines, ses principaux chantiers dans la région de Québec. Il annonçait «une concentration de chantiers majeure sur l’autoroute Henri-IV», qui donne accès au pont Pierre-Laporte. Ce dernier verra quatre de ses six voies fermées 24 heures sur 24 pour deux périodes de 10 jours.

«Une congestion importante est appréhendée des deux côtés du fleuve», avait ajouté le MTQ. Le ministère comptait sur divers partenaires, citant notamment la STQ, pour l’élaboration de son plan d’atténuation, qui devrait voir le jour bientôt.

«Les travaux sur le pont Pierre-Laporte et les difficultés avec les traversiers vont nous rappeler avec acuité la problématique importante à avoir une seule traversée [routière] entre les deux rives. C’est ce que les gens de la Sécurité civile de ma ville me disent depuis des années», a lancé le maire de Lévis.

«Vous allez voir que de disposer d’une seule voie dans les deux sens durant une certaine période va avoir des conséquences dramatiques. On parle de files d’attente jusqu’à 20 ou 25 km. Ça va peut-être refouler jusqu’à Beaumont à l’est. Essayez d’imaginer que le pont a une avarie majeure et qu’il ferme durant un mois», a-t-il exposé.

Concours de circonstances

Le NM Lomer-Gouin est en arrêt technique depuis le 26 avril. Ces arrêts obligatoires durent normalement quatre à six semaines. Ils sont menés annuellement pour maintenir la certification de Transports Canada.

Le NM Lomer-Gouin reprendra du service autour du 15 juin. À ce moment, le NM Alphonse-Desjardins entamera une période d’entraînement pour être opérationnel à compter du 21 juin à L’Isle-aux-Coudres, où il demeurera jusqu’au 6 septembre.

Cette traversée est habituellement assurée par le NM Félix-Antoine-Savard en été et par le NM Joseph-Savard à l’année. Ce dernier est actuellement à L’Isle-aux-Coudres, mais en cale sèche, au chantier du Groupe Océan.

Depuis mars, le navire construit en 1985 subit des travaux de mi-vie de 30 millions de dollars. Le moteur, l’instrumentation et des éléments de sécurité seront notamment remplacés.

Incidemment, il sera aussi adapté pour être utilisé, au besoin, à la traverse Québec-Lévis.

Le NM Radisson devait prendre sa relève, mais, récemment, au moment de sa remise en service après une période d’entretien, on a constaté que son moteur devait être remplacé. À ce moment, les travaux sur le NM Joseph-Savard avaient déjà débuté.

«Le NM Radisson a été construit en 1954. Les pièces ne sont plus sur les tablettes. Il faut trouver un moteur compatible, tant en termes de puissance que de poids. Il ne faut pas s’attendre à ce qu’il soit de retour en service avant 2022», a indiqué le porte-parole de la STQ Alexandre Lavoie.

La STQ a d’ailleurs planifié son remplacement. Les sommes ont été inscrites dans le Plan québécois des infrastructures.

Le choix

«La décision a été très déchirante, poursuit M. Lavoie. Nous sommes conscients des travaux sur le pont Pierre-Laporte et que la saison estivale à Québec est achalandée. Nous avons soupesé les impacts de n’avoir qu’un navire sur l’une ou l’autre des traverses. Il nous a paru évident qu’on ne pouvait pas faire de compromis à L’Isle-aux-Coudres, où il n’y a pas d’autre option. Les insulaires dépendent de notre service. Et l’été, même à deux navires, en haute saison touristique, il y a de l’attente. À un navire, l’impact aurait été désastreux.»

Le représentant de la STQ a aussi précisé que l’achalandage sur cette traverse s’était accru de 12% l’an dernier et que la fréquentation, cette année, était déjà supérieure à ce qu’elle était en 2020.

«Au contraire, à Québec-Lévis, l’achalandage est en baisse de 50 à 70% si on compare les chiffres d’avril 2021 à ceux de 2019. Nous avons beaucoup moins de clients réguliers qui allaient travailler sur la colline Parlementaire ou étudier à l’Université Laval depuis l’avènement du télétravail. Ça a été mis dans la balance», fait remarquer Alexandre Lavoie.

Le NM Alphonse-Desjardins a une capacité de véhicules comparable à celle du NM Joseph-Savard, dont il prend la relève. Mais la marée pourrait parfois le contraindre à utiliser une rampe différente, ce qui empêcherait, lorsque cela survient, d’embarquer des semi-remorques de 53 pieds.

«Jouer avec le feu»

Au rythme maximum d’une traversée de chaque côté toutes les 20 minutes, deux navires peuvent faire traverser en tout 300 véhicules par heure entre Québec et Lévis.

Un seul traversier, «qu’est-ce que c’est, par rapport aux milliers de véhicules qui traversent [par les ponts]? Pas grand-chose. L’impact, en cas d’avarie sur les ponts, est limité, mais ça peut causer certaines difficultés si ça arrive en même temps que les travaux sur le pont, en particulier pour les piétons qui utilisent le transport en commun», estime Gilles Lehouillier.

«On va avoir la preuve, cet été, qu’en n'ayant qu’une seule traversée [routière] entre les deux rives, on joue avec le feu tout le temps», a conclu le maire de Lévis.