Livre choc pour un ancien Nordiques
Bernie Saunders raconte le racisme dont il a souffert au hockey
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Bernie Saunders n’a disputé que 10 matchs dans la LNH, tous avec les Nordiques, à leurs deux saisons initiales. À ses yeux, le fait qu’il ait été le cinquième joueur noir seulement à évoluer dans le grand circuit n’a pas aidé sa cause et il a choisi de se confier sur le racisme dont il a été victime, dans un livre qui sera publié l’automne prochain.
En 1979-80, Saunders, un attaquant natif de Montréal, avait enfilé l’uniforme fleurdelisé pour quatre rencontres. La saison suivante, c’est à six reprises qu’il a porté le logo des Nordiques, récoltant un point au passage.
Celui qui avait fait ses classes à l’Université Western Michigan était à l’époque perçu comme un espoir intrigant. Au même moment où les Nordiques donnaient leurs premiers coups de patin dans la LNH, le jeune ailier se faisait remarquer avec les Firebirds de Syracuse, dans la Ligue américaine, avec 23 buts et 40 points en 38 matchs.
Après le rappel bref en fin de saison à Québec, il espérait bien faire sa marque au camp d’entraînement l’automne suivant, ce qu’il a fait en terminant premier buteur de l’équipe.
« J’ai encore des articles du Journal qui démontrent aujourd’hui que ce que je dis est vrai. Je vivais des moments enivrants. En tant que joueur canadien, je me sentais à ma place dans un bon marché de hockey et j’étais préparé. Je me voyais dans la LNH pendant 15 ans. »
« Cela dit, je ne pense pas que personne ne m’ait porté préjudice volontairement. C’est juste qu’à l’époque, un joueur de hockey noir n’était pas perçu comme aussi bon que les autres. Je ne peux pas en vouloir à l’organisation », estime Saunders.
Fin de carrière abrupte
Les Nordiques ont demandé à Saunders d’aller parfaire son jeu dans les ligues mineures, mais c’est plutôt là que la fin a tôt fait de sonner pour lui, d’abord avec les Voyageurs de la Nouvelle-Écosse.
« Quand les Nordiques m’ont coupé à mon deuxième camp, ils n’avaient pas de club-école. Ils me demandaient de polir mon jeu, mais n’avaient nulle part où m’envoyer. À Halifax, je jouais sur la quatrième ligne. Je le vois plus comme de la malchance plutôt que de la discrimination de la part des Nordiques, mais dans les mineures, les insultes raciales continuaient de m’affecter », confie Saunders.
Après une saison de 38 buts et 75 points avec les Wings de Kalamazoo, dans la Ligue internationale, il a tout plaqué à 27 ans.
« Partout où j’ai joué dans les ligues mineures, c’est incroyable l’abus verbal que j’ai dû subir à tous les matchs de la part des amateurs et des joueurs. J’en ai souffert, je me sentais diminué et ça rendait encore plus complexe ma mission de convaincre les Nordiques ou une autre équipe la LNH que j’avais ma place dans la ligue », déplore-t-il.
Pas un livre amer
Saunders, qui habite aujourd’hui dans la région de Myrtle Beach, a connu une carrière prolifique dans le domaine de l’industrie pharmaceutique.
Après toutes ces années, il a décidé, dans la mouvance du mouvement Black Lives Matter, que le moment était venu de partager son histoire.
« Je ne suis pas amer. J’ai une belle vie et le hockey a fait de moi l’homme que je suis aujourd’hui malgré les expériences difficiles. Ce n’est pas un livre sur la colère, mais un livre sur mes expériences.
« Ça me désole qu’on continue de voir des incidents racistes au hockey. Ces événements m’attristent et démontrent qu’ils ne sont pas sur le point de s’en aller. Je me suis dit qu’en redonnant un peu à ma façon, même si je suis une personne très réservée, je pourrais avoir un impact. Une partie de moi ne voulait pas écrire ce livre, mais je devais le faire », conclut l’ancien des Nordiques.
Saunders a été le cinquième joueur noir à fouler les glaces de la LNH après Willie O’Ree, Mike Marson, Bill Riley et Tony McKegney.