13e féminicide: arrêté en décembre, il s'était engagé à ne pas «harceler» la victime
L’accusé avait été acquitté de voies de fait après s’être engagé à ne plus s’en prendre à la victime
Coup d'oeil sur cet article
L’homme accusé du meurtre non prémédité de sa conjointe avait été arrêté en décembre et s’était engagé devant un juge, il y a à peine quatre mois, à ne pas «troubler l’ordre public» ou s’en prendre à la victime.
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Le 30 décembre 2020, les policiers du Service de police de la Ville de Québec ont procédé à l’arrestation de Noureddine Mimouni.
Amené devant la juge Sandra Rioux et accusé de voies de fait, de séquestration et de menaces de «brûler, détruire ou endommager un bien», soit l’appartement de Limoilou où s’est produit le drame, le trentenaire, qui n'avait pas d'antécédents judiciaires au Canada, avait pu recouvrer la liberté sous plusieurs conditions.
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Interdit de contact
Il devait notamment résider à l’Auberivière, puisqu’il était arrivé au pays en septembre 2020 et qu’il ne savait pas où aller, et il lui avait été interdit de se rendre à l’appartement de la victime, Nathalie Piché, ou encore d’entrer en contact avec elle.
Un mois plus tard, ses conditions avaient été modifiées et l’interdiction de se trouver «en présence de la plaignante» avait été retirée.
«Le DPCP place au cœur de ses actions la sécurité des victimes, particulièrement lorsqu’il est question de violence conjugale», a fait savoir mardi Me Audrey Roy-Cloutier, porte-parole.
Pour cette raison, avant de prendre position relativement à une demande présentée par un accusé qui veut faire modifier une condition, le procureur s’assure d’obtenir le point de vue de la victime.
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C’est ainsi que, le 18 février, Mimouni était de retour en cour, cette fois devant le juge René de la Sablonnière, pour contracter un «810». «Le procureur ne peut et ne devrait jamais forcer une victime de violence conjugale à témoigner. Il est essentiel que la victime ne ressente pas de pression additionnelle», a ajouté Me Roy-Cloutier.
L’objectif derrière tout ça: que la victime n’hésite pas à contacter les policiers à nouveau si elle croit que sa sécurité est compromise.
Des craintes
Ayant reconnu que la plaignante pouvait raisonnablement craindre qu’il lui inflige des lésions corporelles ou s’en prenne à sa propriété, l’homme avait accepté de signer un «810». Comme seule condition particulière, il s’était engagé à ne pas «importuner» la dame.
Une fois l’engagement contracté, l’homme avait été acquitté des accusations initiales portées contre lui.
«Cette ordonnance peut être demandée lorsque la victime ne souhaite plus participer ou change sa version des faits. C’est en dernier recours que le procureur choisira cette avenue, laquelle permet de mettre en place des conditions minimales visant la protection de la victime», a dit Me Roy-Cloutier en terminant.
Passage éclair
Mardi, après un bref passage du présumé meurtrier devant le juge Steve Magnan, le dossier a été reporté au 29 juin.
D’ici là, la poursuivante, Me Mélanie Ducharme, a demandé au magistrat d’interdire à l’accusé d’entrer en contact avec 11 personnes.
Les démêlés de l’accusé avec la justice
◆ 30 décembre 2020
Noureddine est arrêté et accusé de voies de fait, de séquestration et de menaces.
Il est libéré le jour même sous certaines conditions.
◆ 28 janvier 2021
Les conditions de remise en liberté de l’accusé sont modifiées.
◆ 18 février 2021
L’homme s’engage à ne pas harceler sa victime, en signant un «810». Ce faisant, les accusations portées contre lui le 30 décembre 2020 tombent et l’homme est acquitté.
► Qu’est-ce qu’un «810»?
L’article 810 stipule qu’une personne qui craint, pour des motifs raisonnables, qu’une autre personne ne lui cause des lésions corporelles ou n’endommage sa propriété peut demander à un juge d’ordonner que le défendeur contracte l’engagement, avec ou sans caution, de ne pas troubler l’ordre public et d’avoir une bonne conduite pour une période maximale de 12 mois.
Ce qu’elle disait de son conjoint
Nathalie Piché avait fait part de ses inquiétudes à une amie et sur un groupe Facebook destiné à aider les victimes de mariages frauduleux.
En décembre 2020, elle affirmait vivre un cauchemar «après un mois de mariage». Elle disait se préparer à expulser son conjoint.
Le 30 décembre 2020, après avoir porté plainte à la police, elle écrivait: «cela a mal tourné ce matin et j’ai dû le faire arrêter par la police» et «je suis stressée par tout ça, mais il est allé trop loin».
En janvier dernier, elle demandait notamment un traducteur de l’arabe pour tenter de faire la lumière sur des propos que son conjoint aurait tenus. Elle disait avoir «un mauvais feeling».
Si vous avez besoin d’aide
Ligne québécoise de prévention du suicide
- www.aqps.info
- 1 866 APPELLE (277-3553)
SOS violence conjugale
- www.sosviolenceconjugale.ca
- 1 800 363-9010