[EN IMAGES] Voici 9 choses à savoir sur la plus ancienne paroisse de l’Île-d’Orléans
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L’imaginaire collectif représente l’île d’Orléans comme un lieu où les traditions héritées de la Nouvelle-France se transmettent de génération en génération. Or, au-delà de cette perception, voyons ce qu’il en est de la vie sur l’île d’Orléans en nous attardant sur ces quelques instantanés de sa plus ancienne paroisse: Sainte-Famille.
1) L’île d’Orléans

Sainte-Famille se situe sur le côté nord de l’île. La municipalité fait face à la Côte-de-Beaupré. Son territoire est borné du côté ouest par Saint-Pierre, du côté est par Saint-François. Il s’étend vers le sud jusqu’au milieu de l’île où il rejoint Saint-Jean.
D’où vient le nom «Orléans»? Jacques Cartier nomme ainsi l’île en 1535 en l’honneur du fils de François 1er, le duc d’Orléans. Ce nouveau nom remplace définitivement le nom d’île de Bacchus qu’il lui avait donné l’année précédente. Les Premières Nations l’appellent Minigo. Ce nom est une variante du mot algonquin ouindigo, qui signifie «coin ensorcelé».
2) Le berceau
L’expression «berceau de la civilisation canadienne-française» est souvent utilisée pour désigner l’île d’Orléans. Il est vrai qu’on y trouve la souche d’environ 300 familles canadiennes-françaises.
C’est notamment le cas pour la famille dont l’ancêtre est Robert Gagnon, un pionnier de Sainte-Famille. La première mention officielle de sa présence figure au recensement de 1666. Il s’y est en revanche installé presque 10 ans plus tôt, soit en 1657.
L’abondance de familles souches sur l’île incite à la création de la Maison de nos Aïeux. Cet organisme a pour mission de retracer l’histoire des familles pionnières de l’île. Il occupe le presbytère de Sainte-Famille, construit en 1888 selon les plans de l’architecte David Ouellet. Les familles qui ont fait souche sur l’île d’Orléans peuvent ériger une plaque commémorative sur un terrain situé à proximité.
3) L’église actuelle
La première église est construite en 1666. Les registres paroissiaux y ouvrent la même année et couvrent tout le territoire de l’île pendant quelques années. Un prêtre missionnaire y officie jusqu’à la nomination d’un curé résident en 1674. L’érection canonique a lieu 10 ans plus tard.
La construction de l'église actuelle, en pierres de Château-Richer, commence en 1743. On peut y célébrer la première messe en 1746. Abîmée lors de la conquête, elle est rapidement réparée. On ajoute en 1807 les clochers surmontant les tours latérales.
Les statues qui ornent la façade de l’église représentent la Sainte Famille, soit Jésus, Marie, Joseph, Anne et Joachim. Elles en sont à leur troisième génération. Ce sont les frères François-Noël et Jean-Baptiste-Antoine Levasseur qui ont sculpté les premières statues. Elles ont été endommagées par un incendie en 1889. On mandate rapidement le sculpteur Jean-Baptiste Côté pour les remplacer. Cependant, les deuxièmes résistent mal au climat rigoureux du Québec. Ainsi, de 1928 à 1929, on les remplace par celles de Lauréat Vallières. En juin 2018, elles sont retirées de la façade en raison de leur mauvais état de conservation.
4) L’éducation
Dès 1684, François Lamy, curé de Sainte-Famille, demande aux Sœurs de la Congrégation Notre-Dame de venir s’installer dans la paroisse. Deux premières religieuses enseignantes arrivent à l’automne de la même année. C’est le plus ancien établissement hors Montréal de cette congrégation fondée par Marguerite Bourgeoys. L’année suivante, on construit un premier couvent.
Celui qui illustre ce texte est construit en 1858 et est agrandi en 1893. Les jeunes filles y suivent leurs cours du primaire et du secondaire. S’ajoute à la fin des années 1930 le cours d’enseignement ménager. L’édifice est rasé par un incendie le 6 avril 1941.
Rapidement, on érige un nouveau couvent, dont l’architecture rappelle l’ancien. Les religieuses poursuivent leur œuvre d’éducation pendant quelques années. La commission scolaire achète le couvent en 1958. Il devient la seule école du village en 1971. Les garçons y intègrent alors les classes.
Mentionnons que l’on construit en 1830 une première école pour garçons. L’apport de deux généreux donateurs permet d’y offrir une éducation gratuite.
5) La chapelle de procession
Sainte-Famille comptait deux chapelles de procession: une à l’est de l’église, qui a aujourd'hui disparu, et celle-ci à l’ouest de l’église. Elle a été érigée durant la première moitié du XIXe siècle et est classée immeuble patrimonial le 16 décembre 1981.
Les murs de maçonnerie de cette chapelle sise sur le chemin Royal sont recouverts d'un crépi. Le toit est surmonté d’un clocheton. Fait plus rare pour ce type de chapelle, on trouve à l’intérieur un tabernacle. Ce dernier, réalisé en 1767, se trouvait dans l'une des chapelles latérales de l’église paroissiale.
La coutume catholique des processions est héritée de la France médiévale, et les premiers colons arrivés en Nouvelle-France en perpétuent la tradition. Les chapelles servent de lieux de rassemblement à l’occasion de fêtes religieuses.
6) Le terroir agricole
La vocation agricole de l’île d’Orléans en a façonné le paysage. Il en est de même pour Sainte-Famille. D’une agriculture de subsistance, on passe à une agriculture marchande au milieu du XVIIIe siècle.
À cette époque, les agriculteurs élèvent des bovins, dont plusieurs sont destinés à la production laitière, des porcs et des moutons. Quelques volailles viennent compléter le cheptel de la ferme familiale. Les principales cultures sont le foin, les céréales, les pois, les fèves et les pommes de terre.
L’outillage reste rudimentaire. La traction animale demeure le seul moyen de tirer les instruments aratoires. Le cultivateur gagne sa croûte, celle de sa famille et de son bétail à la sueur de son front. La mécanisation de l’agriculture au Québec devient courante à partir des années 1940.
C’est en 1895 qu’un premier jalon de l’agriculture industrielle s’implante à Sainte-Famille avec la création de la Société de fabrication de beurre de Sainte-Famille et la construction d’une beurrerie. Les producteurs laitiers y vendent leur crème.
7) Les cultures céréalières
Le régime seigneurial prévaut sur l’île d’Orléans jusqu’à son abolition. Parmi les obligations dévolues au seigneur se trouve la construction d’un moulin. On le considère comme un incitatif à l’établissement de colons et à la mise en valeur des terres concédées. De plus, le pain, à la base de l’alimentation de l’époque, ne peut être cuit que si l’on moud préalablement les grains.
Quelques moulins se sont succédé à Sainte-Famille. Un premier moulin à vent est construit en 1665 et le second, au milieu du XIXe siècle, entre 1841 et 1847. Ce dernier se nomme moulin Poulin, du nom de la dernière famille de meuniers qui en a été propriétaire. La structure existait encore en 2018, mais elle était en piètre état. Deux moulins à eau ont aussi été construits à Sainte-Famille.
Les opérations de battage du grain se mécanisent avec l’arrivée des moteurs stationnaires, puisqu’ils permettent d’actionner des batteuses mécaniques. Les producteurs l’achètent en groupe et font des corvées de battage lorsque vient le temps de récolter les céréales, essentiellement le blé et l’avoine.
8) La pomiculture
L’île d’Orléans, grâce à ses terres fertiles, est appelée le grenier de Québec. Les producteurs agricoles de l’île y écoulent leurs surplus de production dans les marchés publics. En matière de production maraîchère, Sainte-Famille est particulièrement reconnue pour ses pommes.
C’est vers 1880 qu’on note une augmentation importante du nombre de vergers. Les variétés de pommes mentionnées dans les rapports annuels de la Société pomologique et de culture fruitière de la province de Québec de 1946 à 1948 sont principalement la Fameuse et la McIntosh. À ces deux variétés s’ajoutent la Cortland, la Lobo, la Duchesse, la Gravenstein, la Northern Spy, la Melba et la Transparente.
La vente de pommes s’effectue à la ferme et dans les marchés publics. Des producteurs écoulent leurs récoltes auprès de grossistes pour la vente dans les épiceries et d’usines de transformation pour la production de jus et de compote. Aujourd’hui, plusieurs producteurs offrent à la ferme les produits transformés sur place: cidre, moût, vinaigre, pâtisseries, etc.
9) Les cultures maraîchères
Pour faire face à la demande croissante des marchés, la culture maraîchère de l’île d’Orléans se diversifie au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Outre les pommes, on y cultive des fraises, introduites en 1870, et des framboises ainsi qu’une variété de légumes.
La production commerciale de fraises au Québec est destinée aux marchés locaux, aux usines de transformation et à l’exportation vers d’autres provinces et les États-Unis. L'une des variétés de fraises produites sur l’île d’Orléans dans les années 1940 est la Sénateur Dunlop.
Le ministère de l’Agriculture du Québec installe à Sainte-Famille, de la fin des années 1930 à la fin des années 1940, un laboratoire saisonnier. On y étudie un ravageur des fraisiers: le charançon de la racine du fraisier.
Grâce à l’augmentation de la demande, les agriculteurs produisent davantage de pommes de terre, d’oignons, de poireaux, de carottes, de maïs. Notons que l’ouverture du pont de l’Île-d’Orléans en 1935 ajoute encore plus de possibilités pour écouler la production maraîchère. Aujourd’hui, c’est toute une variété de fruits et légumes frais qu’on trouve chez les producteurs de Sainte-Famille tout au long de la belle saison.
Un texte d'Annie Labrecque, technicienne en documentation, Bibliothèque et Archives nationales du Québec.
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Sources
- Chapelle Sainte-Famille, Répertoire du patrimoine culturel du Québec (consulté le 26 mai 2021).
- Cap aux diamants, vol. 5, no 1, printemps 1989, numéro spécial consacré à l’île d’Orléans.
- DUBOIS, Martin et Marie-Ève FISET, Sainte-Famille-de-l’île-d’Orléans – Terre nourricière, MRC de L’Île-d’Orléans, «Les Cahiers du patrimoine», 2019, 32 p.
- Église Sainte-Famille, Répertoire du patrimoine culturel du Québec (consulté le 26 mai 2021).
- LÉGARÉ, Denyse et Chantal PRUD’HOMME, Patrimoine et paysage agricoles de l'arrondissement historique de l'Île-d'Orléans, Québec, Commission des biens culturels du Québec, 2006, 92 p.