Le Québec accueillera des réfugiés
La province offrira sa collaboration concernant les 20 000 Afghans que souhaite recevoir le Canada
Le Québec recevra une partie des 20 000 réfugiés afghans que le Canada veut accueillir.
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«Oui, pour répondre à M. Trudeau, on va faire notre part pour prendre une partie des réfugiés qui veulent quitter le pays. Je pense entre autres aux Afghanes qui se trouvent dans une situation très difficile», a confirmé le premier ministre François Legault, lundi.
«Quand on pense à l’égalité entre les femmes et les hommes, c’est un peu décourageant de voir l’arrivée des talibans, qui remettent en question la place des femmes dans notre société», a-t-il ajouté.
Le Canada veut accueillir plus de 20 000 réfugiés afghans, dont plusieurs sont en danger en raison de la prise du pouvoir par les talibans. Lundi, Justin Trudeau a indiqué qu’«au moins» 807 Afghans ont été jusqu’ici évacués dans le cadre du programme spécial d’immigration.
Désespoir
M. Trudeau s’est dit «horrifié» par les scènes en provenance de l’aéroport de Kaboul, qui montrent des gens désespérés tentant de s’agripper à un avion de l’armée américaine qui quittait le pays en catastrophe.
«C’est à briser le cœur de voir ce qui est en train de se passer», a-t-il déclaré.
Reste à savoir si Ottawa pourra réaliser sa promesse de ramener au Canada 20 000 Afghans, notamment les plus vulnérables sur le plan politique — femmes leaders, défenseurs des droits de la personne, journalistes, membres des minorités religieuses persécutées — ainsi que ceux qui ont aidé le Canada dans son opération, comme les interprètes et leurs familles.
Cet objectif semble toutefois en péril, la situation sur le terrain étant «extrêmement difficile», selon le premier ministre.
- Écoutez l'entrevue de Benoît Dutrizac avec le colonel à la retraite Michel Drapeau sur QUB radio:
Global News rapportait lundi que des interprètes afghans et leurs familles étaient coincés à proximité de l’aéroport de Kaboul, sans argent et nourriture, et qu’ils ne savaient pas s’ils auraient un vol pour venir au Canada.
Inacceptable
Le chef conservateur Erin O'Toole a critiqué M. Trudeau pour son manque de préparation.
«Ça brise le cœur de voir des gens courir après des avions. M. Trudeau savait depuis six mois que les Américains allaient se retirer de l’Afghanistan, et il a laissé des interprètes et des collaborateurs là-bas. [...] Le gouvernement Trudeau n’a rien fait. [...] C’est inacceptable», a-t-il dit.
«Je pense qu’on doit aider toute personne qui est à risque parce qu’elle a aidé le Canada», a-t-il ajouté.
Par ailleurs, le Québec sera là pour accueillir des réfugiés, comme il a aussi été présent pour recevoir les réfugiés syriens, a précisé le bureau de François Legault. Pour l’instant, il n’y a toutefois pas d’objectif quant au nombre de personnes.
– Avec Raphaël Pirro et Marc-André Gagnon
Choc et déception
Après avoir participé à deux missions en Afghanistan et avoir été au combat pendant 16 mois, le capitaine retraité des Forces armées canadiennes Jocelyn Démétré est très choqué de voir la vitesse avec laquelle les talibans ont repris le contrôle du pays.
«On est allés combattre la tyrannie et la peur là-bas, on a perdu du monde là-bas, des amis, des frères d’armes», laisse tomber le militaire.
Il pense tout de même que la présence des forces alliées a aidé le pays. «On a mis de l’eau sur le feu pendant toutes ces années», ajoute-t-il.
Pour cet ancien militaire, le plus difficile à accepter est de savoir que ce sont les femmes et les filles afghanes qui vont «payer le prix» de la désertion des soldats afghans.
«Je n’imagine même pas ce que toutes ces femmes vont vivre durant les prochaines années, ça va être terrible...», confie-t-il.
– Clara Loiseau
- Écoutez l'entrevue de Richard Martineau avec Jocelyn Démétré sur QUB radio:
«À quoi j’ai servi?»
Frédéric Lachance est allé en Afghanistan en 2007 et en 2010-2011. Il souffre aujourd’hui du syndrome de choc post-traumatique. «À quoi j’ai servi, finalement?», dit l’homme. Il croit tout de même avoir servi, notamment en redonnant un semblant de vie normale aux Afghans, mais il se désole que tout soit «revenu à zéro dans un claquement de doigts».
– Nicolas Saillant
Inquiet pour les femmes
L’urgentologue Marc Dauphin a été le dernier militaire canadien à commander l’hôpital international de Kandahar, avant que les Américains prennent la relève en 2009. «Je suis en colère, surtout pour les jeunes filles et les femmes. Elles savent qu’elles vont revivre l’ère des lapidations», déplore le Dr Dauphin, maintenant à la retraite. «C’est ce qui me touche le plus», dit-il avec émotion.
– Nicolas Saillant
Au moins 807 Afghans rapatriés, assure Trudeau
Le personnel diplomatique canadien a déjà été rapatrié de l’Afghanistan, et «au moins» 807 Afghans ont réussi à quitter le pays pour rejoindre le Canada jusqu’à maintenant, a assuré Justin Trudeau lundi.
M. Trudeau s’est dit «horrifié» par les scènes en provenance de l’aéroport de Kaboul, qui montrent des gens désespérés tentant de s’agripper à un avion de l’armée américaine qui quittait le pays en catastrophe.
- Écoutez l’entrevue de Martin Forgues, vétéran des Forces armées canadiennes et journaliste indépendant
«C’est à briser le cœur de voir ce qui est en train de se passer», a-t-il déclaré.
Au total, 34 diplomates canadiens et membres des Forces armées ainsi que cinq membres du personnel de l’OTAN ont été évacués d’urgence, alors que les talibans ont pris le contrôle du palais présidentiel de Kaboul dimanche.
Les 807 Afghans rapatriés l’ont été en vertu du programme spécial d’immigration émanant du ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté.
Le gouvernement canadien a toutefois promis, pas plus tard que vendredi dernier, de ramener au Canada 20 000 Afghans, la priorité étant accordée aux personnes plus vulnérables et à celles qui ont aidé le Canada dans son opération, comme les interprètes.
Cet objectif semble toutefois en péril, la situation sur le terrain étant «extrêmement difficile» et «fluide», selon le premier ministre. Il n’a pas signalé son intention de revoir à la baisse la cible de 20 000 évacuations.
Officiellement en campagne électorale depuis dimanche, Justin Trudeau s’est défendu d’avoir déclenché une élection, alors que se déroule cette situation qui a pris le Canada et ses alliés par surprise.
«Je continue d’être le premier ministre, et c’est la raison pour laquelle j’ai reçu un breffage très détaillé ce matin avec des officiers sur la situation en Afghanistan, et les Canadiens peuvent s’assurer que leur démocratie et leurs institutions démocratiques demeurent très fortes», a-t-il déclaré.
Du personnel militaire des Forces armées canadiennes reste sur les lieux, tandis que les opérations stratégiques se font à partir du Koweït.
M. Trudeau dit être en constante communication avec ses alliés, à commencer par les Américains et les Britanniques.
– Raphaël Pirro