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L’arrogance de Gilles Lehouillier

Gilles Lehouillier
Photo d'archives

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Abusivement confiant, Gilles Lehouillier affirmait récemment qu’il ne «souhaite pas d’opposition» et que les Lévisiens n’en veulent pas non plus parce que, selon lui, ils sont «hautement satisfaits» de son bilan.

Indépendamment du bilan de M. Lehouillier, «on ne peut clairement pas se satisfaire de ce type d’explication en démocratie», souligne Laurence Bherer, professeure agrégée en science politique à l’Université de Montréal et chercheure pour le Collectif Action politique et démocratie. 

Le principe d’une compétition électorale est important, soit l’idée qu’on puisse avoir plusieurs candidats qui défendent des idées différentes, car il n’y a pas qu’une façon de faire, précise la chercheure. «C’est normal, ce n’est pas un problème en soi, et ça ne veut pas dire qu’on n’est pas satisfait de la personne en présence.» 

Plusieurs facteurs peuvent plutôt expliquer cette difficulté des oppositions de s’installer sur la scène municipale. Parmi ceux-ci, on peut penser au manque de visibilité des enjeux et des candidats, comparé à ceux du provincial ou du fédéral.  

L’information circule moins, les citoyens sont moins intéressés, et ont moins tendance à aller voter. Et comme c’est l’opposition qui permet en grande partie de politiser les débats et les dossiers, un cercle vicieux s’installe. 

Certain danger

Pour le chercheur Philippe Dubois, doctorant en science politique à l’Université Laval, «Lévis est un drôle de cas démocratique, car dans les 10 plus grandes villes au Québec, c’est probablement celle avec la scène politique municipale la moins dynamique», du moins ces dernières années. 

Lévis s’avère aussi un très bel exemple de l’effet de l’absence d’opposition dans un conseil, qui devient une formalité plutôt qu’une arène de débat et le dernier rempart contre les décisions politiques.  

Pour M. Lehouillier, observe le chercheur, il y a certainement un danger de paraître arrogant s’il pousse trop le bouchon avec ses déclarations. «Il pourrait amener des gens à se mobiliser contre lui.» 

Le maire sortant devrait en effet se méfier. Pendant la campagne de 2005, Jean Garon avait affirmé que l’opposition était une nuisance, propos qui avaient fait le tour du Québec.  

Résultat : M. Garon, à qui les sondages concédaient une victoire serrée, avait été battu par Danielle Roy-Marinelli. À l’époque, trois candidats, dont Gilles Lehouillier, avaient aussi favorisé la division du vote à la mairie.  

Jean-Luc Daigle se souvient fort bien de cet épisode où il avait été élu comme conseiller dans l’équipe de la mairesse. Il a invité récemment les citoyens à «ramener un vent de démocratie à Lévis», en votant pour Elhadji Mamadou Diarra, chef du parti Repensons Lévis.  

Celui qui fut le dernier maire de Saint-Romuald s’inquiète notamment du développement à tous crins, des consultations orientées, et du fait que les conseillers sortants, qui faisaient tous partie de l’équipe de Gilles Lehouillier, n’ont jamais voté contre aucune proposition.  

«Je demande à la population de bien réfléchir, dit-il. Il n’est pas normal qu’il n’y ait pas de voix d’opposition dans une ville en développement de 150 000 habitants. L’unanimité ne peut pas exister.» 

Le taux de participation aux élections municipales est très bas au Québec. Il était de 44,8 % en 2017. À Lévis, il était carrément famélique, à 36%.  

Pour Repensons Lévis, qui présente une équipe complète, la déclaration de Gilles Lehouillier pourrait s’avérer une occasion en or d’inviter les gens à s’intéresser à la campagne et à les appuyer.  

Les citoyens pourraient ainsi rappeler au maire sortant que le choix leur revient, et qu’ils sont tout à fait en droit d’élire des gens qui offriront une réplique à quelqu’un chez qui, très clairement, le pouvoir est monté à la tête.  

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