Choc de titans sur le nouvel album de Gilles Vigneault
Déjà qu’un nouvel album de Gilles Vigneault – son 37e en carrière ! – est un événement en soi, le voir s’associer pour sa production à Jim Corcoran, un autre grand personnage de la chanson québécoise qui s’est fait discret depuis son départ de la CBC, dépasse les attentes... tout comme cette œuvre précieuse, d’ailleurs.
Gilles Vigneault
★★★★★
Comme une chanson d’amour...
Comme le surtitre du LP l’indique, Comme une chanson d’amour... rassemble pièces et écrits de la légende vivante. En résulte une production tantôt chantée, tantôt déclamée sur fond de musiques classiques par un Gilles Vigneault qui, du haut de ses 93 ans, étonne par sa vivacité d’interprétation. C’est connu, mais rappelons-le tout de même : le chanteur et poète a un don pour saisir son public et le mettre aussitôt dans sa petite poche arrière.
Sa voix invite au recueillement et le grain qu’elle gagne après des années d’usure injecte même une sensibilité inespérée à plusieurs morceaux, dont Langage mon doux pays, une pièce qui plaira tout particulièrement aux nostalgiques de la belle époque des boîtes à chansons.
Peut-on parler de Johnny Cash un instant ?
Les lecteurs les plus fidèles de cette chronique (merci beaucoup, d’ailleurs) savent déjà que je suis friand des associations entre artistes et réalisateurs de générations différentes, voire d’intérêts divergents (le cas de la collaboration entre Johnny Cash et Rick Rubin, connu alors pour ses productions rap et metal, vient en tête, évidemment).
À l’image de la série American Recordings, Jim Corcoran – qui a fait sensation en folk puis en pop avant de défendre la chanson québécoise en français à la barre de l’émission À propos pendant une vingtaine d’années – approche Vigneault avec respect, révérence et la même passion pour la langue de Molière. En résulte une œuvre solennelle qui éveille l’auditeur par l’essentiel : des arrangements beaux, mais subtils et Gilles Vigneault, tout simplement.
Une réussite. Bravo.
ABBA
★★★
Voyage
Le légendaire groupe pop est non seulement de retour sous forme d’hologrammes pour une tournée à venir (oui, oui), mais aussi sur disque avec ce neuvième LP qui devrait être le dernier selon la troupe. Chant du cygne oblige, j’imagine, tout y est ampoulé. I Still Have Faith In You, c’est Our Last Summer, prise deux, mais moins le fun. Voyage croule sous les ballades sirupeuses et, pire encore, les morceaux qui se veulent explosifs ne lèvent cruellement pas (outre Just a Notion qui s’avère sympa). Comme la plupart des conventums, Voyage est une surcharge de nostalgie qui nous laisse finalement sur notre faim. Dommage.
Marc Hervieux
★★★ 1/2
Nostalgia Noël
L’homme à la voix qui tonne poursuit sa série Nostalgia. Après deux albums de reprises plus intimistes parus en 2020 et en 2021 (sans compter Mes plaisirs dévoilés en 2013 ou encore Nos chansons qui date de 2018), Marc Hervieux enchaîne – vous l’aurez deviné – avec un disque des Fêtes. Dix ans après Un air d’hiver, le ténor y va d’un LP infiniment supérieur et misant sur l’essentiel : des classiques (maintes fois entendus, mais bon), une réalisation sobre et sa voix inimitable. Sans surprise, donc, mais satisfaisant. Idéal pour un souper avec vos parents.
Limp Bizkit
★★ 1/2
STILL SUCKS
Vingt-deux ans après son fameux concert revisité plus tôt cette année lors du documentaire controversé Woodstock 99 : Peace, Love, and Rage, Limp Bizkit fait suite au simple Dad Vibes en livrant finalement son sixième album sur lequel le projet a travaillé en dilettante depuis près d’une décennie. Bien que Fred Durst se fait lucide et assume que son groupe n’est vraiment plus la sensation du moment (au moins deux pièces y font référence), le LP demeure pantouflard à souhait... surtout après neuf ans de rumeurs incessantes sur cette production. Les fans vont adorer toutefois.
COUP DE ❤
Lou-Adriane Cassidy
★★★★
Lou-Adriane Cassidy vous dit : Bonsoir
Alors que plusieurs artistes peinent à lancer un deuxième album (dois-je poursuivre dans la même veine ? Dois-je faire différent ? etc.), Lou-Adriane Cassidy, elle, relève le défi avec brio et bagout. Après un premier tout en retenue, Cassidy s’éclate ici avec une œuvre foisonnante en y allant d’un rock faisant écho au son « alternatif » des années 90 sur J’espère encore que quelque part l’attente s’arrête, puis en flirtant avec une esthète plus seventies sur Je suis arrivée. Les fans de Darlène, de son frère d’armes Hubert Lenoir, vont adorer.