[CARTE INTERACTIVE] Dans quel état se trouve le pont près de chez vous?
Consultez notre carte interactive qui répertorie les informations disponibles sur plus de 7400 ponts du Québec
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Près de 30 ponts dans un état vétuste ont dû fermer en un an, car ils n’étaient plus sécuritaires pour les automobilistes.
Québec a dû fermer au moins 27 ponts et viaducs dans la dernière année parce que leur état ne permettait plus aux véhicules d’y circuler de façon sécuritaire. Ces structures s’ajoutent à 48 autres déjà fermées depuis plusieurs années, pour un total de 75 ouvrages complètement inaccessibles en date du 4 novembre dernier, selon les chiffres fournis par le ministère des Transports (MTQ).
Quinze ans après l’effondrement tragique du viaduc de la Concorde (voir plus bas), on constate à la lecture des données qu’il reste beaucoup de travail à faire pour rendre sécuritaires les ponts du Québec.
Plus de 7400 ponts du Québec figurent dans cette carte interactive produite par notre Bureau d’enquête. Les données représentées dans cet outil représentent uniquement l’état des structures gérées par le ministère des Transports du Québec (MTQ). L’état des ponts privés ou sous juridiction fédérale ou municipale n’y est donc pas recensé.
«Mesure ultime»
«La fermeture de structures est une mesure ultime, parfois nécessaire, mais que le ministère n’utilise qu’en dernier recours par mesure de protection exceptionnelle pour les usagers de la route», explique la porte-parole du MTQ, Émilie Lord.
Plus du quart des 380 structures sous la responsabilité du MTQ qui nécessitent un remplacement ou des travaux majeurs sont aujourd’hui fermées à la circulation. Par exemple, le pont des Grandes-Fourches, à Sherbrooke, a dû être fermé cet été. Les travaux de remplacement dureront jusqu’en 2022.
- Écoutez l'entrevue de Jean-Louis Fortin au micro de Philippe-Vincent Foisy sur QUB Radio:
Fermés pour longtemps
À Pointe-Claire, le maire sortant John Belvedere doit vivre depuis deux ans avec la fermeture complète de vieilles bretelles d’autoroute qui surplombent l’autoroute 20. De quoi tester sa patience et celle de ses concitoyens.
«Ils [le ministère] ont fait les deux premières l’an dernier, de novembre à avril. En juin, ils ont fermé la troisième, qui vient juste de rouvrir. Et il en restera une autre», énumère-t-il.
Le pont d'Avoca de Grenville-sur-la-Rouge, dans les Laurentides, a été fermé à l’été 2019 pendant presque deux ans.
Le maire Tom Arnold avait alors dit au Journal que la structure «n’a pas été entretenue comme de nombreux autres ponts au Québec» et que sa fermeture coûtait très cher à sa municipalité.
Ses concitoyens ont dû faire des dizaines de kilomètres de plus par jour pour traverser la rivière.
Le MTQ aura finalement réalisé les travaux nécessaires, mais encore aujourd’hui, les camions sont interdits sur le pont.
Jamais rouverts
Selon Émilie Lord, la plupart des structures fermées à long terme «sont situées dans des endroits très peu achalandés ou encore avec une structure [de détour] à proximité».
«Parfois, leur réouverture n’est pas une solution envisagée lorsque le détour imposé aux usagers de la route est court», ajoute-t-elle.
Marc-André Martin, président de l’Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec (APIGQ), croit que le MTQ a laissé tomber ses infrastructures en confiant leur entretien à des firmes externes plutôt qu’à ses propres employés.
«La perte d’expertise et notre dépendance aux firmes de génie-conseil nous obligent aujourd’hui à fermer des ponts plutôt que prendre en charge les travaux nous-mêmes», estime-t-il.
Des effondrements qui ont marqué les mémoires
2000 - Viaduc du Souvenir
Cette structure en construction au-dessus de l’autoroute 15, à Laval, s’était écroulée le 18 juin 2000, faisant un mort et deux blessés graves.
Un rapport d’enquête de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) avait mis en lumière plusieurs déficiences sur le chantier.
En 2010, l’ex-policier de Laval Marc Demers, qui allait devenir maire quelques années plus tard, avait affirmé à Radio-Canada qu’il y avait eu de la «négligence et qu’on pourrait la qualifier de criminelle» dans ce dossier. Mais ni l’entrepreneur sur le chantier ni les ingénieurs qui avaient conçu les travaux n’ont été poursuivis.
2006 - Viaduc de la Concorde
L’effondrement qui a fait 5 morts à Laval, le 30 septembre 2006, a éveillé les consciences.
L’an dernier, à l’occasion de la première édition de notre dossier spécial sur les pires ponts du Québec, l’ingénieur Mario Fafard expliquait que cette tragédie a eu un impact sur la façon dont on conçoit et inspecte les structures de nos jours.
«Il n’y avait pas d’élément qui avertissait que le pont n’allait pas bien. C’est souvent le cas avec des ponts en béton», selon lui.
Une commission d’enquête présidée par l’ex-premier ministre Pierre-Marc Johnson a entraîné notamment un rehaussement des normes d’inspection au ministère des Transports du Québec (MTQ), et une hausse massive des investissements en entretien et en reconstruction.
2011 - Autoroute Ville-Marie
Le 31 juillet 2011, une immense poutre de béton et les paralumes qu’elle supportait se sont effondrés sur l’autoroute Ville-Marie, à Montréal.
Par miracle, même si l’autoroute était ouverte à la circulation, il n’y a eu aucun mort et aucun blessé.
L’Ordre des ingénieurs du Québec avait finalement déposé des plaintes contre deux de ses membres ayant conçu les travaux de réfection des murs qui avaient lieu au moment de l’effondrement.
Québec a aussi poursuivi trois firmes d’ingénieurs en lien avec ces événements.