Le mystère Jordan Dumais: l’attaquant divise les recruteurs de la LNH
Coup d'oeil sur cet article
L’attaquant des Mooseheads de Halifax Jordan Dumais en est parfaitement conscient : il est sans contredit l’espoir le plus polarisant de la LHJMQ en vue du prochain repêchage de la LNH.
Avec 96 points au compteur – dont six mardi soir contre les Eagles du Cap-Breton –,Dumais vient à égalité au troisième rang des pointeurs du circuit Courteau. L’ailier domine largement tous les espoirs de la ligue en étant à leur première année d’admissibilité à la séance de sélection de la LNH, au chapitre des points.
À titre de comparaison, le joueur de centre des Remparts de Québec Nathan Gaucher, considéré par plusieurs comme le meilleur espoir de la province et un potentiel choix de premier tour, affichait quant à lui 51 points en 60 matchs avant d’affronter les Saguenéens de Chicoutimi, mardi soir.
Pourtant, malgré ses prouesses offensives, Dumais n’a pas la cote auprès de tous les recruteurs de la LNH, qui continuent de le voir comme un espoir de troisième ou quatrième ronde.
À 5 pi 9 po et 165 lb, le natif du quartier de L’Île-Bizard, à Montréaal, ne possède pas le coup de patin le plus fluide, ce qui effraie plusieurs recruteurs qui se demandent si le style de jeu de Dumais, fort efficace au niveau junior, se transposera à celui de la LNH. En mars, il avait été ignoré par la Ligue canadienne de hockey qui ne l’avait pas invité au match des meilleurs espoirs de son circuit, ce qui avait soulevé l’ire de son coéquipier à Halifax Zachary L’Heureux, qui ne s’était pas gêné pour critiquer la LCH sur Twitter.
«J’ai toujours été un joueur sous-estimé, a mentionné Dumais au Journal. Ç’a été le cas toute ma vie. Je sais que j’étais meilleur que certains joueurs qui étaient au match des meilleurs espoirs. Chaque fois, ça me donne une motivation supplémentaire.»
UN MYSTÈRE
Dans les Maritimes, certains médias ont commencé à parler du «mystère Dumais». Certains s’expliquent mal comment un joueur qui produit autant peut être classé au 72e rang par la Centrale de recrutement de la LNH chez les patineurs nord-américains.
En discutant avec certains recruteurs, on en vient à la conclusion que, les points c’est bien, mais ça ne veut pas tout dire.
«La combinaison d’un patin moyen et d’un petit gabarit n’est pas idéale pour le hockey professionnel. Par contre, il a été épié en masse et quelqu’un va prendre une chance. Tu ne peux pas ignorer ses points et son intelligence sur la patinoire», a réagi un recruteur de l’Est à qui nous avons parlé.
GROUPE SÉLECT
Après tout, atteindre le plateau des 90 points à son année de 17 ans n’est pas un exploit commun. Le collègue Stéphane Leroux de RDS notait récemment que Dumais était le huitième joueur seulement à atteindre ce plateau en 12 ans, joignant un groupe composé de joueurs comme Jonathan Huberdeau, Jonathan Drouin, Alexis Lafrenière et Nikolaj Ehlers.
Un autre recruteur sondé qui, lui, œuvre pour une équipe de l’Ouest, estime qu’il n’a pas volé sa place dans ce groupe sélect.
«Les points sont une chose, mais quand tu regardes comment il les récolte, c’est souvent lui qui en est la cause en raison de son sens de l’anticipation et puisqu’il crée des revirements. Son patin n’est pas une énorme lacune pour moi et je pense que c’est sa mécanique qui fait qu’il n’a pas l’air rapide. Une chose est sûre, c’est qu’on sent qu’il a quelque chose à prouver et ça paraît dans son jeu.»
Un entraîneur qui est derrière son joueur
L’entraîneur-chef des Mooseheads de Halifax Sylvain Favreau n’hésite pas à dire aux recruteurs qu’il n’est pas d’accord avec eux, lorsqu’il est question des habiletés de patineur de Jordan Dumais.
«Ma responsabilité est d’être le plus honnête possible avec les recruteurs, que ce soit dans le cas de Dumais ou n’importe qui d’autre. Quand ils me posent la question, je leur dis ouvertement : non, Jordan n’est pas le patineur le plus fluide. Par contre, il est capable de se démarquer avec sa vitesse. Ce n’est pas tout le monde qui parvient à inscrire 90 points dans notre ligue. Il faut qu’il fasse quelque chose de bien.»
Pour Favreau, même si le coup de patin de son no 11 n’est pas le plus gracieux, il ne lui nuit pas.
«Je pense que c’est facile de dire que c’est un problème. Évidemment, ceux qui le voient jouer remarquent vite que ce n’est pas Justin Barron en termes de fluidité. Par contre, il se rend du point A au point B et il est souvent le premier arrivé. Souvent, je mets au défi les recruteurs de venir à nos entraînements et de le regarder dans nos exercices en situation de courses ou de batailles.»
BELLE PROGRESSION
Favreau a vu la progression de Dumais en un an. À 16 ans, la saison dernière, le choix de première ronde des Mooseheads en 2020 avait terminé avec 29 points en 40 matchs lors de cette saison écourtée par la COVID-19.
«On a joué toute l’année contre les Maritimes, dont des gros matchs contre Charlottetown. À 16 ans, de jouer contre une équipe comme ça, ça lui a permis de prendre beaucoup de maturité. Cette année, il est en mesure de contrôler le jeu et de changer la dynamique d’un match.»
OBJECTIF
Dumais n’a d’ailleurs pas besoin qu’on lui rappelle que son coup de patin est une lacune, il le sait pertinemment et il a l’intention d’utiliser le prochain été pour y travailler encore plus.
Avant ça, toutefois, il y aura le repêchage. Le jeune homme assure que l’équipe qui le réclamera ne le regrettera pas. On lui a alors demandé ce qu’il dirait aux recruteurs pour les en convaincre.
«Mon coup de patin ne me nuira pas au prochain niveau. J’ai l’intention de continuer à le travailler et il va s’améliorer avec les années. Je suis fait pour jouer au hockey et j’y mets tout mon cœur, chaque jour. Je suis un jeune compétitif et je pense que mes habiletés et mon QI hockey me séparent des autres», conclut-il avec assurance.