REM de l'Est: la tour de Babel
Robitaille

L'humeur était au jovialisme et à la lutte contre le «cynisme» lors de la rencontre Legault-Plante, hier, au sujet du projet «REM de l'Est».
Pourtant, le premier ministre et la mairesse venaient d'annoncer que ce train n'existerait sans doute jamais.
Rendements
Comme le REM original – celui vers l'Ouest annoncé à l'ère Couillard –, ce REM de l'Est était conçu et construit par la CDPQ Infra, branche de la Caisse spécialisée dans la maîtrise d'œuvre de grands projets d'infrastructures publiques.
Mais puisque la CDPQ doit absolument faire des rendements, elle tenait à ce que le train passe par le centre-ville. Que cela le défigure ou non.
De plus, ces mêmes impératifs l'avaient amenée à mal arrimer son train au réseau de métro.
Le niet de Montréal et de Québec a fait comprendre à la Caisse qu'elle devait laisser sa place.
Soulagement
Il y a de quoi partager le soulagement de Valérie Plante. Les structures en hauteur ont souvent fière allure dans les dessins d'architecte. Mais, dans la réalité, elles bloquent le paysage, créent des barrières hideuses, sans compter que dans notre climat, elles se dégradent rapidement. Le centre-ville de Montréal ne méritait pas ça. Heureusement, le gouvernement du Québec a mis de l'eau dans son vin. Il y a quelques semaines, on avait l'impression qu'il voulait passer le «Rouleau compresseur» (permettez que je reprenne mon «jeu de mots» avec le patronyme de la ministre de la Métropole) en ignorant les réticences de la population et des principaux acteurs du transport à Montréal. La ministre Chantal Rouleau se montrait carrément lyrique. Elle élevait le REM au rang de «projet de société», soutenait que «le monde entier [avait] les yeux rivés» sur ce projet et faisait miroiter des «possibilités de développement incroyables». Il n'y avait pas d'autre option que de laisser la CDPQ faire.
Impatience
Les oppositions qui reprochent à François Legault d'être arrogant doivent admettre qu'ici, il ne s'est pas entêté et qu'il a fini par ramener au sol la structure argumentative «aérienne» de sa ministre.
La mairesse Plante a retrouvé une vraie place dans le processus, elle qui se sentait, il y a quelques semaines, «acculée au pied du mur».
Hier, elle en était presque extatique: «Je rêvais de ça!» Reste qu'en confiant le projet au quatuor ARTM-MTQ-MTL-STM, on vient de réduire presque à néant la probabilité que ce train circule un jour dans la métropole.
Souvenons-nous que le gouvernement Couillard avait eu recours à l'expertise de la CDPQ précisément parce qu'on en avait marre des reports constants de projets de transport métropolitain.
Où trouverons-nous les milliards que la CDPQ voulait investir? De plus, les possibilités de blocage entre l'Agence, la STM, le ministère, la Ville (et ses arrondissements) sont presque infinies.
C'est donc à une sorte de tour de Babel du transport que M. Legault et Mme Plante confient ce projet. Ils ont beau se dire impatients quant à la réalisation de ce train de l'Est, on est en droit d'être sceptique.