Crise du logement: «C’est certain qu’on va rattraper le retard», dit Andrée Laforest
37 000 ménages attendent des logements sociaux
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Même si elle reconnaît sans peine que l’existence d’une crise du logement, la ministre Andrée Laforest soutient que Québec serait enfin en train de «rattraper le retard du passé» dans cette matière.
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La ministre des Affaires municipales et de l’Habitation annonçait mercredi matin la construction de 1723 logements abordables dans le cadre du Programme d’habitation abordable Québec (PHAQ), ainsi qu’un partenariat qui fera en sorte que 3000 logements abordables seront rendus disponibles dans trois ans.
En plus de l’enveloppe de 300 M$ du PHAQ, le gouvernement accorde un total de 350 M$ en subvention à trois partenaires, soit le Fonds de solidarité FTQ, le Mouvement Desjardins, et Fondaction.
Concrètement, le gouvernement confie au Fonds de solidarité FTQ et au mouvement Desjardins une somme de 175 M$ chacun.
En retour, les deux fonds s’engagent à rendre disponibles 1000 logements abordables chacun, et à assurer l’abordabilité de «la majorité d’entre eux» pour une durée de 35 ans.
Fondaction recevra pour sa part une subvention de 45 M$ pour construire 1000 logements abordables supplémentaires, du type copropriété.
L’idée est de favoriser l’accès à la propriété pour des familles à plus modestes moyens, et de libérer du même coup des unités locatives de logement abordable, a expliqué la PDG de Fondaction, Geneviève Morin.
Ces logements seront construits là où «les besoins sont les plus urgents».
Appelée à donner des précisions à ce sujet, la ministre Laforest a mentionné les villes de Sherbrooke, Granby, Rimouski et Trois-Rivières.
Or, la façon dont cette annonce va se réaliser n’est pas claire, selon la porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain, Véronique Laflamme, qui considère qu’il aurait été plus efficace d’actualiser le programme AccèsLogis.
«On ne sait pas qui seront les développeurs ni les propriétaires. Pourquoi créer un nouveau véhicule pour construire des logements dont les ménages à faibles et à modestes revenus ont tant besoin?»
«On a l’impression d’une succession d’interventions incohérentes, alors qu’on a un programme qui pourrait très bien répondre à la demande, s’il était indexé et ajusté aux nouvelles réalités comme on l’attend depuis des années», a réagi Mme Laflamme.
Urgence
Or, un peu plus de 37 000 ménages à faibles revenus sont en attente d’un logement abordable à l’heure actuelle.
Comme il faut plusieurs années pour rendre accessibles de nouvelles unités, il semblerait que les annonces d’aujourd’hui ne suffisent pas à régler le problème, du moins à court terme.
De son côté, Andrée Laforest a fait valoir que le gouvernement dont elle fait partie a fait beaucoup depuis quatre ans pour augmenter le nombre de logements abordables.
Elle a évoqué notamment le milliard $ investi dans AccèsLogis, la signature de quatre ententes avec le gouvernement fédéral, et la mise sur pied du PHAQ.
La ministre estime en outre avoir rendu disponibles les ressources nécessaires pour ceux qui se cherchent un logement pour le premier juillet, soit ce vendredi.
«Les villes ont quand même reçu deux millions [de dollars] pour loger les gens à l’hôtel, entreposer les meubles, payer les déménagements.»
C’est à l’office d’habitation de leur région, qui détient les listes de logements disponibles, que les personnes en difficulté doivent s’adresser, a précisé Mme Laforest.
Par ailleurs, Mme Laforest soutient qu’elle a une approche réaliste, et qu’elle préfère «dire la vérité» plutôt que de se contenter de «dire des choses juste pour faire plaisir».
«Il faut être raisonnable. Moi je ne suis pas capable de dire des choses que je ne suis pas capable de réaliser, comme ça s’est fait dans le passé. Si on dit que dans les meilleures années, depuis 25 ans, on a construit 2500 logements, avec notre programme AccèsLogis, c’est impossible de dire aujourd’hui qu’on va en construire 6000 en un an [...]. Faut quand même livrer ce qu’on promet», a lancé la ministre.
Retard
À la question de savoir quand le «retard du passé» sera enfin rattrapé, Andrée Laforest n’a pas donné de réponse précise.
«C’est la question que je pose une fois par mois aux gens du ministère», s’est-elle contenté de souligner, avant de rappeler que les 15 000 unités promises par la CAQ ont bel et bien été financées.
«Là, on est rendu [qu’on a] livré 8000 logements AccèsLogis, [...] et autour de 9600 sont en développement. Avec Le PHAQ, encore une fois, 1700 logements qu’on annonce ce matin. Avec les grands fonds, les partenaires ici, on parle de 3000 logements. Et c’est certain qu’on va rattraper le retard», a-t-elle dit.
«Si le gouvernement n’avait pas attendu quatre budgets pour mettre les sommes nécessaires à la réalisation de sa promesse électorale de réaliser les 15 000 logements sociaux prévus dans AccèsLogis à son arrivée, on n’en serait pas là. Plus on attend, plus ça coûte cher, et pendant ce temps, la crise du logement prend de l’ampleur», a réagi la porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), Véronique Laflamme.
Enfin, Andrée Laforest convient que le gouvernement devra être prudent une fois ses objectifs atteints.
«Sauf qu’une fois qu’on va l’avoir rattrapée, l’erreur du passé n’est pas à refaire, ce qui veut dire que là on arrive à notre 15 000 [unités] financées, bien il faut continuer de financer le secteur de l’habitation.
«Donc quand on va arriver à un équilibre au niveau de l’habitation, bien il faudra continuer à investir, il ne faudra jamais arrêter d’investir», a conclu Andrée Laforest.