Cédrika, 15 ans plus tard: l’espoir de voir quelqu’un payer persiste
L’entourage de Cédrika continue de croire que le responsable de sa mort paiera un jour pour son geste ignoble
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La montagne russe d’émotions des 15 dernières années ne fait pas perdre espoir aux proches de Cédrika et aux autorités de retrouver le responsable de sa mort tragique.
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«Il faut qu’on sache ce qui s’est passé parce que là, il n’y a pas de fin à l’histoire», insiste sa sœur Mélissa Fortier-Provencher.
Voilà maintenant 15 ans que l’entourage de la petite Cédrika vit avec d’innombrables questions en tête. Que s’est-il passé le soir du 31 juillet 2007 alors que la petite jouait dans son quartier de Trois-Rivières?
«Un jour ou l’autre, les conséquences de nos décisions, de nos gestes, nous reviennent au visage», continue de croire Henri Provencher, le grand-père de Cédrika.
L’homme souhaite que quelqu’un puisse être accusé dans cette affaire, non pas dans un esprit de vengeance, mais surtout pour apporter des réponses et apaiser la douleur qui gruge sa famille.
«Je ne peux m’empêcher de penser à ce que ça a fait à mon fils Martin [le père de Cédrika], à Karine [sa mère], à Mélissa. Tu veux juste une chose dans la vie et c’est de voir tes enfants et tes petits-enfants heureux», insiste l’homme de 77 ans.
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Pression
Tous ceux qui ont connu Cédrika souhaitent qu’un jour ou l’autre, quelqu’un parle, que la pression devienne trop forte.
«Je souhaite que le coupable paie un jour, parce que prendre la vie d’un enfant, il n’y a pas pire crime. Pour moi, c’est un crime contre l’humanité tout entière», martèle Claude Lafrenière, un ami d’enfance de la petite.
«J’espère pour cette personne que c’est lourd à porter, parce que c’est lourd pour la famille et ceux qui l’ont connue», ajoute-t-il.
Les policiers ont eu pendant plusieurs années un suspect dans leur mire, soit le propriétaire d’une Acura rouge comme celle qui a été décrite par des témoins comme un véhicule suspect circulant dans le quartier le jour de l’enlèvement.
Or, Jonathan Bettez a été arrêté dans un autre dossier, mais n’a jamais été accusé en lien avec le dossier de Cédrika (voir encadré).
«Quand il y a eu tout ça, moi ça m’a redonné un brin d’espoir qu’il y aurait peut-être une fin. Mais finalement non. C’est difficile d’accepter ça et de laisser la justice suivre son cours», soupire Mélissa Fortier-Provencher.
Enquête toujours en cours
Appelée à commenter le dossier et à revenir sur les efforts mis en place depuis 15 ans, la direction de la Sûreté du Québec a refusé la demande d’entrevue du Journal puisque le dossier est toujours ouvert.
«L’enquête est toujours active même si 15 années se sont écoulées. Nous demandons toujours la collaboration du public qui peut nous transmettre des informations en tout temps», précise sa porte-parole Ann Mathieu.
Un dénouement serait toutefois une victoire pour l’ensemble des policiers qui ont travaillé sur ce dossier.
«S’il y avait un jour des accusations de déposées dans ce dossier-là, on dirait tous “enfin”. Ça viendrait enlever une certaine frustration qu’on a en lien avec ce dossier-là, où on n’a jamais pu trouver les dernières pièces du puzzle », souligne Michel Letarte, qui était porte-parole du Service de police de Trois-Rivières à l’époque de la disparition de l’enfant.
«Je le sais que les enquêteurs voudraient eux aussi que ça aboutisse. C’est la plus grosse enquête de leur vie», ajoute Mme Fortier-Provencher.
Une médiatisation qui a pu compliquer les choses
TROIS-RIVIÈRES | La médiatisation du dossier de Cédrika Provencher en 2007 a représenté un tournant dans les dossiers de disparition, mais elle a aussi possiblement provoqué des complications dans l’enquête, croit un policier à la retraite.
Michel Letarte a été relationniste à la police de Trois-Rivières de 2000 jusqu’à sa retraite en 2017. Le soir du 31 juillet 2007, il profitait de sa piscine à la maison quand le téléphone s’est mis à sonner.
Des journalistes voulaient de l’information sur la disparition d’une fillette de 9 ans. C’était le début d’une spirale qui durera des semaines, et ce, en continu.
«Les chaînes d’information continue LCN et RDI sont arrivées vers 1995, mais pour nous, c’était la première fois qu’on avait un dossier comme celui-là. Sur la rue Chapais [où se trouve le parc où jouait Cédrika], tu vois débarquer les camions satellites et tu te demandes ce qui se passe. Dans les premières heures, c’est fou comment ça s’est fait rapidement», se souvient-il.
D’un océan à l'autre
Et comme la nouvelle survient pendant les vacances, alors que l’actualité est plutôt calme, tout le monde s’y met.
«C’était d’un océan à l’autre. En français, en anglais, CBC, CTV, sans arrêt. Des amis de l’Ouest canadien m’appelaient pour me dire que je n’arrêtais pas d’être à la télé chez eux», raconte M. Letarte.
Il croit avec le recul que cet intérêt pour l’histoire a pu nuire au travail des enquêteurs dans une certaine mesure.
Il estime que la pression créée par cette abondance médiatique a pu pousser le ou les responsables de la mort de la petite «à passer à une autre étape», se sachant dans la mire des autorités. Notamment lorsque la question de la fameuse Acura rouge a été abordée.
Passer à côté d'un dénouement
«Je me questionne à savoir s’il n’y avait pas eu toute cette pression médiatique là, si la ou les personnes auraient pu agir autrement en lien avec certaines choses», croit M. Letarte, précisant que ce sentiment de déception de savoir le coupable toujours en liberté est probablement le même pour l’ensemble des policiers.
«On ne sait pas ce qui s’est passé dans les dernières heures de la vie de cette petite fille-là. C’est ça qui est dur pour les parents et qu’on aurait voulu leur apporter comme réponses», soupire Michel Letarte.