Appel à l'aide: «Je me plains tout le temps»
Entendre quelqu’un se plaindre à propos de tout et n’importe quoi est désagréable pour l’entourage, mais cette attitude est souvent un appel à l’aide, doublé d’un besoin de reconnaissance.
Henri, la jeune cinquantaine, a longtemps été un «chialeux» de première classe. «Je n’en étais pas conscient, mais tout dans ma vie était un prétexte à une insatisfaction, et je l’exprimais à haute voix. En fait, j’étais constamment en train de me dire que la vie s’acharnait sur moi, ma situation était toujours pire et plus problématique que celle des autres.»
Pourtant, Henri avait un emploi stable, un bon salaire et des enfants proches de lui. «C’était comme une litanie, je n’arrivais pas à voir le bon côté des choses. Avec le recul, j’ai compris que j’avais un grand manque de confiance en moi, mais surtout, j’avais l’impression qu’en me plaignant, ça atténuait ma responsabilité. Si des projets ou des choses ne marchaient pas comme je voulais, c’était la faute de la vie, de mes collègues, de mon entourage, mais pas la mienne.»
La remise en question d’Henri est arrivée lorsque sa femme a demandé le divorce. La raison première de la séparation n’était pas forcément son attitude, même si cela a pesé dans la balance. «Mon ex-femme, avec laquelle je suis en bons termes, m’a fait comprendre que me plaindre constamment était lourd, mais surtout que ça m’empêchait d’avancer et de m’améliorer en tant qu’être humain.»
Réveil salutaire
Après avoir questionné ses enfants, qui étaient ados à l’époque, il a décidé de consulter un psychologue. «J’y suis allé en me disant que je n’avais pas vraiment de problème, j’étais juste curieux de voir ce qu’il allait me dire. Je suis sorti de la première séance plutôt ébranlé.»
«Il arrive souvent que la tendance à se plaindre exprime une insatisfaction, une lassitude, un chagrin, une souffrance existentielle, voire un malheur profond, explique le psychologue Saverio Tomasella, auteur du livre Le syndrome de Calimero. Certains individus n'arrivent pas à communiquer autrement et sont enfermés dans ce mode relationnel qui les limite énormément.»
L’entourage de ces personnes a pourtant un rôle important à jouer pour changer les habitudes. «Ils ont raison de considérer qu'il y a, dans la répétition, une exagération pesante, mais ils peuvent aider à établir une hiérarchie entre les motifs de plaintes. C'est une façon de montrer son intérêt, mais aussi son écoute et sa compréhension. Peu à peu, gagnant en confiance en soi et en l'autre, celui qui se plaint constamment pourra, de lui-même, relativiser les motifs de ses gémissements.»
Arrêter de se plaindre
Pour la psychologue Luce Janin Devillars, «arrêter de se plaindre, c’est commencer par apprendre à dire non». Il faut être responsable de nos actes et de nos résultats. La plainte est une façon de se dédouaner, de ne pas prendre sa vie en main.
En prenant conscience de son problème, on fait déjà un premier pas. Une des clefs pour se débarrasser de cette habitude est de se dire qu’on est responsable de nos émotions face à une situation. Trouver un point positif à chaque situation est un bon début. Cette habitude peut demander un certain entraînement, mais c’est le début du changement.