Un grand spectacle à Blanc-Sablon

Les artistes québécois n’ajoutent jamais Blanc-Sablon à leur calendrier de tournée. Et pour cause : situé à 2300 kilomètres de Montréal, le village ne dispose ni de salle de spectacle ni de l’équipement technique. Mais samedi dernier, deux avions ont été nolisés pour amener tout l’équipement, une équipe d’une quinzaine de personnes ainsi que Sara Dufour et 2 Frères pour le premier spectacle d’envergure de son histoire.  

« Ça prend trois jours pour aller faire une heure et demie de show ! » s’exclame joyeusement Sara Dufour à l’autre bout du fil. Près de 300 personnes ont assisté à sa prestation et celle de 2 Frères, soit le quart de la population de Blanc-Sablon. 

Et c’était tout un événement pour le village, qui ne présente jamais de spectacles, outre quelques artistes locaux. Si ses habitants veulent assister à un spectacle, l’endroit le plus près est à Corner Brook, à Terre-Neuve, situé à... six heures de route. « Mais ce sont principalement des artistes anglophones et country », souligne le conseiller municipal Danny Gaudreault.  

« À cause de la distance et des coûts, ce ne serait vraiment pas rentable pour nous d’en présenter », ajoute-t-il.

« Ça me fait vibrer » 

Cette fois-ci, Blanc-Sablon a pu se permettre une telle soirée parce que la communauté a remporté en août le concours Ville en musique, de Sirius XM, qui a assumé tous les frais. Tout le matériel nécessaire, dont un système de son, ainsi qu’une équipe technique ont fait l’aller-retour depuis l’aéroport de Saint-Hubert pour transformer leur centre récréatif en salle de spectacle.  

« Les gens étaient très contents et ils ont beaucoup apprécié. C’était pratiquement un spectacle intime », souligne M. Gaudreault, qui était dans l’assistance samedi soir dernier. 

Le spectacle de Sara Dufour et 2 Frères a fait le bonheur des habitants, mais aussi des artistes, qui se sont fait reconnaître par tous ceux qu’ils ont croisés au village, même les anglophones qui y habitent en majorité. « J’ai croisé une dame francophone qui me disait qu’elle n’écoutait jamais de musique en français », raconte Sara Dufour.  

« C’est une autre réalité, on a l’impression d’être sur une autre planète, ajoute-t-elle. C’est vraiment impressionnant et c’est de toute beauté. Moi, plus c’est loin, plus je tripe. Le fait que je sois une fille de région, ça m’a permis de connecter plus facilement avec les gens. Il y a quelque chose quand c’est loin qui est de l’ordre de l’aventure et ça me fait vibrer. » 

La chanteuse est même allée visiter des jeunes dans la seule école francophone de la région pour partager ses passions. « Je leur ai parlé de l’École nationale de la chanson. Peut-être qu’il y a un jeune qui ne savait pas que ça existait une école spécialisée pour les auteurs-compositeurs-interprètes, et qui va se dire : c’est possible de faire ça. »