Pourquoi certains hésitent à se faire vacciner?
Une chaire de recherche se penchera sur la question à l'Université Laval
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Désinformation, méfiance, polarisation : une chaire de recherche basée à l’Université Laval se penchera sur les hésitations envers la vaccination, exacerbées par la pandémie de COVID-19, afin d’en identifier les origines.
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La rectrice Sophie D’Amours a annoncé vendredi matin la création de la Chaire en santé publique appliquée sur l’anthropologie des enjeux de la vaccination, en collaboration avec l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).
L’organisme fédéral fournira 1,1 million $ à la professeure en anthropologie Ève Dubé et son équipe sur cinq ans pour ce mandat.
La nouvelle chaire, la première sur ce sujet au pays, tentera d’identifier les facteurs individuels, sociaux, culturels ou structurels qui conduisent des personnes à douter de la vaccination, une mesure de santé publique dont les bénéfices sont pourtant bien démontrés.
Méfiance grandissante
La pandémie a mis en lumière «une polarisation accrue, une politisation de certains enjeux, une méfiance grandissante envers les recommandations, l’expertise», selon Mme Dubé, elle-même conseillère scientifique à l’INSPQ, qui s’intéresse à ces questions depuis plusieurs années.
Elle reconnaît qu’il lui faudra agir avec tact pour naviguer dans ce thème sensible.
«Se faire dire “tu n’as pas raison, tu es niaiseux, tu es anti-science”, ça n’a jamais fait avancer le débat et ça n’a jamais fait changer personne d’idée», lance-t-elle, disant que son but n’est pas de «convaincre» quiconque mais «d’essayer de comprendre» les préoccupations des gens avec «empathie».
Chambres d’écho
Ses travaux s’intéresseront en outre à la désinformation sur les réseaux sociaux et aux «chambres d’écho» des algorithmes. La spécialiste soulève le «grand rôle» de certains acteurs qui «vont marchandiser» des alternatives au vaccin ou propager intentionnellement de fausses informations pour leur gain financier ou la popularité.
La responsabilité de la communauté scientifique, particulièrement sa capacité à bien communiquer avec le public, sera aussi analysée. Mais il faudra aussi voir à une meilleure «littératie scientifique» au sein de la population, croit Mme Dubé.
«Spécifiquement pour la COVID-19, ce qu’on observe dans nos travaux, c’est qu’il y a effectivement une montée de l’hésitation, beaucoup liée à la vague Omicron, qui est aussi liée à la façon dont on a communiqué à propos des vaccins en début de pandémie», affirme-t-elle.
La rectrice D’Amours a salué la capacité de la professeure à «établir un dialogue constructif», ajoutant qu’aucun harcèlement à son endroit ne serait toléré.
Pour le Dr Gaston De Serres, épidémiologiste à l’INSPQ, l’idée d’ouvrir de nouveaux canaux d’écoute avec les gens qui ont des réticences ne peut qu’être bénéfique.
«On peut avoir des outils qui en termes d’efficacité, de sécurité fonctionnent bien, mais si les gens n’adoptent pas le comportement d’aller se faire vacciner, évidemment, on n’est pas avancés», dit-il.
Deux axes de recherche :
1) Comprendre les expressions, les causes et les conséquences de l’hésitation à la vaccination dans la population ainsi que chez les professionnels de la santé.
2) Mettre au point et évaluer des interventions afin d’améliorer l’accès équitable aux services et diminuer l’hésitation à la vaccination.
La vaccination contre la COVID-19 au Québec :
61 % : proportion de la population avec une vaccination de base complétée (pour les adultes, 3 doses ou 2 doses + une infection)
23 % : adultes ayant reçu une dose dans les 5 derniers mois
* Sources : Université Laval et Santé Québec