Un «Don Pasquale» moderne et réussi
L’opéra de Donizetti à la sauce des années 1960
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L’idée de situer l’opéra Don Pasquale dans les années 1960 pouvait faire un peu grincer des dents. Le choix du metteur en scène Jean-Sébastien Ouellette s’avère être le bon. L’audacieuse proposition fonctionne à merveille.
Pour sa toute première mise en scène à l’opéra, l’acteur et metteur en scène en a fait un objet ludique tout en respectant l’œuvre écrite par Donizetti en 1842.
Présentée à nouveau mardi et jeudi à 19h30, et samedi à 14h, la production automnale de l’Opéra de Québec a été lancée dans la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec malgré plusieurs sièges vides. Un phénomène présent depuis quelques années en raison d'un public moins nombreux, malgré la grande qualité des productions présentées.
C’est dans des teintes de bleu et de vert pastel que le rideau se lève. On découvre une résidence couverte d'un un mélange de briques et de revêtement en vinyle. Un laitier fait sa ronde. Une Mustang décapotable passe devant la maison. Un Don Pasquale passe la tondeuse.
Un décor qui fait très bande dessinée avec la présence d’une sorte de boîte magique, ingénieuse, qui devient un hôpital, une salle d’attente, un bureau de médecin, un salon et un restaurant.
Don Pasquale, c’est l’histoire d’un homme qui décide de déshériter son neveu Ernesto parce qu’il n’approuve pas la jeune femme qu’il fréquente.
Le vieil homme souhaite rencontrer une nouvelle femme, plus jeune, afin de léguer son héritage à un futur enfant. Une vaste machination s’installera, mise sur pied par le docteur Malatesta, afin de donner une leçon à Don Pasquale.
Belle découverte
Le Don Pasquale des années 1960 présente une Norina émancipée, que l’on peut associer au féminisme qui a émergé durant cette décennie.
Le ténor Patrick Kabongo, dans le rôle d’Ernesto, et la soprano Anne-Catherine Gillet, qui joue Norina, sont les grandes vedettes vocales de cette production.
Le Congolais a une très belle voix, mélodieuse et avec de superbes nuances vocales. Une belle découverte.
La soprano française est immense et elle s’impose dès son arrivée, avec toute une entrée, dans la salle d’attente de l’hôpital. Elle excelle par son jeu et a une puissance vocale qui lui permet de percer les couches sonores parfois trop fortes déployées par les musiciens de l’OSQ.
Les deux artistes offrent un beau duo à la fin du troisième acte avec la pièce Tormami a dir che m’ami.
Olivier Déjean, dans le rôle de Don Pasquale, n’a pas eu cette chance, étant parfois enterré par l’ensemble musical dirigé par le chef invité Laurent Campellone. C'est son langage corporel épousant ses réflexions qui le fait se distinguer. L’humour y est, mais il ne tombe toutefois pas dans le cabotinage, souvent très présent dans les opéras «comiques».
Habituellement présent à travers de belles scènes de groupe, le Chœur de l’opéra de Québec l’est un peu moins dans Don Pasquale, sauf lors d’une belle scène, sans chant, au son de la trompette et avec des parapluies, au début du deuxième acte et dans le dernier, qui se déroule devant la résidence de Don Pasquale, où on s’échange une série de commérages.
Transposer des classiques dans la modernité est une opération qui ne fonctionne pas toujours. Cette version est une réussite, de même que sa mise en scène. On nous offre ici un bel emballage et de très belles voix.