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Profilage racial: Québec porte la décision sur les interceptions aléatoires en appel

Le ministre des Transports, François Bonnardel
Photo Agence QMI, Thierry Laforce Le ministre des Transports, François Bonnardel

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Le gouvernement Legault conteste le jugement qui a ordonné la fin des interceptions aléatoires des automobilistes, une pratique «intolérable» et reposant sur «des apparences et des préjugés».

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Le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, et le ministre responsable de la Lutte contre le racisme, Christopher Skeete, ont annoncé la décision du gouvernement de porter la décision de la Cour supérieure en appel, vendredi matin, lors d’une conférence de presse à Montréal.

Lorsqu’il a rendu sa décision le 25 octobre dernier, le juge Michel Yergeau a dit que les interceptions routières sans motifs reposaient «sur des préjugés plus ou moins conscients associés à la couleur de peau» des automobilistes plutôt que sur un objectif de sécurité routière.

Lors du procès, le ministère public avait assuré que les policiers étaient maintenant formés «pour ne pas tenir compte des considérations raciales ou sociales» quand des interceptions aléatoires ont lieu, mais l’argument n’a pas tenu, et le magistrat a décidé de mettre fin à cette pratique, même si la Cour suprême les avait autorisées en 1990.

Or, François Bonnardel considère que ce jugement prive les policiers d’outils importants pour assurer la sécurité routière et lutter contre la criminalité. L’article invalidé par la décision du juge Yergeau est particulièrement utilisé pour interpeller des automobilistes pour lutter contre l’alcool au volant ou pour intercepter des individus au comportement suspect.

Le groupe de travail sur le racisme mis sur pied par le gouvernement Legault avait pourtant recommandé explicitement de mettre fin aux interceptions sans raison valable des automobilistes, dans son rapport de décembre 2020.

Un an plus tard, l’ex-ministre de la Sécurité publique a même déposé un projet de loi sur la police afin que Québec étudie les lignes directrices pour éliminer la discrimination au sein des forces policières. Ce projet de loi est toutefois mort au feuilleton.

Mesures

Les ministres Bonnardel et Skeete soutiennent néanmoins que «les interpellations policières ne peuvent être basées sur un motif discriminatoire». Pour cette raison, ils ont l’intention de mettre à jour la Loi sur la police, pour faire en sorte que les policiers soient mieux outillés sur «les questions de discrimination et de profilage racial».

Le gouvernement compte ainsi «établir des lignes directrices pour que le travail des policiers se fasse en l’absence de discrimination basée sur la race». Il compte également imposer de la formation continue et moderniser les processus de déontologie policière.

Enfin, davantage de financement sera accordé aux corps policiers pour «le développement et l’expérimentation de nouvelles pratiques exemplaires et innovantes» pour lutter contre le profilage racial et social.

Une décision saluée par la SQ

Appelée à réagir, la Sûreté du Québec (SQ) a indiqué qu’elle «accueille favorablement la décision du gouvernement de porter en appel la décision rendue par la Cour supérieure dans l’affaire Luamba».

«L'application de l'article 636 du Code de sécurité routière est pour nos membres, un des outils importants de notre mission de sécurité publique et plus particulièrement afin d'assurer la sécurité des usagers des réseaux de transport», a soutenu la lieutenante Ann Mathieu de la SQ.

La police provinciale compte également participer à la consultation du gouvernement annoncée vendredi matin.

L'Association des policières et des policiers provinciaux du Québec (APPQ) s'est aussi prononcée en faveur de la décision.

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Une «claque au visage»

Le député de Québec solidaire Andrés Fontecilla considère que la décision du gouvernement de contester le jugement de la Cour supérieure est «une honte» qui nuit «à l’inclusion et à la cohésion nationale».

«C’est une immense claque au visage pour toutes les personnes racisées, en particulier pour les communautés noires du Québec. En maintenant l'article 636 qui permet les interpellations aléatoires sans motif raisonnable par les services policiers, la CAQ vient d'admettre que le profilage racial est acceptable au Québec», s’est-il indigné dans un communiqué de presse.

Du côté de la Ligue des droits et libertés (LDL), on estime que la décision du gouvernement est un «rendez-vous manqué» qui vient s’opposer aux efforts déployés par la société civile pour mettre fin au profilage racial.

«Le gouvernement Legault vient de considérablement ralentir la marche des personnes noires et racisées vers l’égalité de traitement et de nuire au plein exercice de leurs droits», a déploré Maxim Fortin, porte-parole à la LDL, section de Québec.

Gouvernance improvisée et incohérente

«En même temps de porter la cause en appel, le gouvernement nous dit que le profilage racial existe et promet de mettre en place des mesures. Encore une fois, la CAQ fait la démonstration de son style de gouvernance improvisée et incohérente», a déclaré Jennifer Maccarone, porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique à Montréal et députée de Westmount-St-Louis.

Mme Maccarone a réclamé au ministre responsable de la Lutte contre le racisme, Christopher Skeete, de s’expliquer sur cette décision.

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