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Manifestations: la fin de la police des mœurs en Iran ne convainc pas

Les Iraniens sont sceptiques après l’annonce du procureur général d’abolir cette patrouille religieuse

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Un agent de la police religieuse, chargé de veiller au respect des mœurs islamiques, interpelle une femme pour le port de vêtements inappropriés, à Téhéran. Photo AFP


Des Iraniens vivant au Québec restent méfiants après l’annonce de l’abolition de la police des mœurs faite samedi par le procureur général iranien, sur fond de sanglantes manifestations dans le pays.

• À lire aussi: Iran: la police des mœurs dissoute, un geste envers les manifestants

« C’est un stratagème pour tenter de calmer la colère des manifestants », estime Arezoo Sadr, Iranienne installée à Montréal depuis 8 ans. 

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Arezoo Sadr. Iranienne installée à Montréal. Photo fournie par Arezoo Sadr

Samedi, le procureur général de l’Iran, Mohammad Jafar Montazeri, a en effet annoncé dans la ville sainte de Qom que la police des mœurs avait « été abolie par ceux qui l’ont créée », selon des propos rapportés dimanche par l’agence de presse ISNA. Pour l’heure, cette annonce n’a pas encore été confirmée par le gouvernement, et les modalités de sa suppression n’ont pas été explicitées.

« C’est une information à prendre avec beaucoup de pincettes, souligne Vahid Yücesoy, doctorant à l’UQAM et spécialiste de l’Iran. Il est impossible d’en conclure que la police des mœurs va être définitivement abolie. »

Changement de forme

«Ce n’est pas la première fois qu’on a ce type de déclarations, et pas la première fois non plus que la police des mœurs change de nom, affirme Nimâ Machouf, membre de l’association des femmes iraniennes de Montréal. Le peuple iranien n’est pas dupe.»

  • Écoutez l'entrevue avec Nima Machouf, iranienne d’origine et militante féministe à l’émission de Richard Martineau via QUB radio :

Si l’actuelle police des mœurs a été créée en 2006 pour « répandre la culture de la décence et du hijab », d’autres organisations similaires existaient déjà auparavant. Après 1979, des « comités de la Révolution islamique » menaient déjà des patrouilles pour faire respecter le code vestimentaire et les mœurs en Iran.

« Pour moi, la déclaration du procureur général signifie simplement qu’il enlève la responsabilité de ses épaules, pense Foad Goodarzi, natif de Téhéran installé depuis 2015 à Québec. Au moins avant, c’était identifiable, on savait que c’était la police des mœurs qui s’occupait de ça. D’autres organisations non officielles finiront par le faire d’une manière détournée. »

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Foad Goodarzi, natif de Téhéran installé depuis 2015 à Québec. Photo fournie par Foad Goodarzi

Tentative de diversion

Pour beaucoup d’Iraniens, cette annonce est une tentative du pouvoir d’apaiser la vague de contestation qui perdure dans le pays depuis l’arrestation le 13 septembre dernier de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, accusée de ne pas respecter le code vestimentaire de la République islamique. Annoncée trois jours plus tard, la mort de la jeune femme a depuis déclenché une vague de protestation dans plusieurs villes du pays. Selon Reuters, la répression du régime iranien a déjà fait plus de 500 morts.

« Les protestations actuelles sont un vrai défi pour le régime, analyse Vahid Yücesoy. L’appareil coercitif du pouvoir a été incapable de réprimer les manifestations, les plus étendues depuis 1979. Il fallait une tactique pour diviser les manifestants avant les mobilisations de cette semaine. »

  • Écoutez la chronique de Loic Tassé, spécialiste en politique internationale au micro de Benoit Dutrizac sur QUB radio :

Réformes profondes demandées

L’annonce de l’abolition de la police des mœurs intervient après la décision des autorités, samedi, de réviser une loi de 1983 sur le port du voile obligatoire en Iran.

« L’obligation du port du voile n’est qu’une infime partie de nos préoccupations, raconte Arezoo Sadr. Ce qu’on veut, c’est un changement total de régime. Ils ne nous empêcheront pas de finir ce qu’on a commencé depuis des mois. »

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