Mont-Sainte-Anne: une enquête gouvernementale réclamée
Le gouvernement Legault envisage de financer l’exploitant du Mont-Sainte-Anne
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Inquiétés par la chute d’une télécabine, des leaders régionaux demandent au gouvernement de déclencher une enquête sur la sécurité au Mont-Sainte-Anne. Ils réclament aussi un changement d’opérateur, mais le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, préfère encore donner la chance au coureur et songe à lui accorder 50 millions $.
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Plusieurs voix se sont élevées dans la grande région de Québec depuis qu’une gondole s’est écrasée au sol, samedi dernier, alors que des centaines de skieurs attendaient pour gravir le Mont-Sainte-Anne.
Dans un communiqué diffusé lundi après-midi, le comité Avenir Mont-Sainte-Anne, qui regroupe des personnalités provenant des milieux politique, sportif, touristique et d’affaires de la Capitale-Nationale a sonné l’alarme.
«Il s’agit maintenant d’un enjeu de sécurité publique», ont écrit les porte-paroles du regroupement, Mario Bédard et Alex Harvey, en réclamant un changement d’opérateur, dès cet hiver.
Or, il s’agit d’une voie que le gouvernement Legault refuse d’emprunter. «L’expropriation n’est pas une solution envisagée par le gouvernement», a fait savoir l’attaché de presse du ministre Pierre Fitzgibbon, Mathieu St-Amand, dans un courriel transmis en fin de journée à notre Bureau parlementaire.
«Une proposition d’investissement de RCR reçue il y a quelque mois est étudiée par le Ministère. La question est de savoir quel est le rôle que le gouvernement doit jouer dans cette industrie», a ajouté l’attaché de presse.
Cette proposition est de l’ordre de 100 M$, dont la moitié, soit 50 M$, serait financée par le gouvernement du Québec, a-t-il précisé au Journal.
La moindre des choses, selon le PQ
Dans l’immédiat, Avenir Mont-Sainte-Anne estime que le gouvernement «a la responsabilité de prendre les moyens nécessaires [...] afin d’assurer la sécurité des installations» exploitées dans la région par Resorts of the Canadian Rockies (RCR), soit celles du Mont-Sainte-Anne sur la Côte-de-Beaupré comme celles de sa station sœur, située à Stoneham.
Le regroupement citoyen presse Québec veut mandater «toutes les instances compétentes», comme la Régie du bâtiment du Québec et la CNESS, pour mener une enquête dont toutes les conclusions seraient rendues publiques, une demande qu’appuie le Parti Québécois.
Compte tenu des enjeux liés à la sécurité, ce serait «la moindre des choses», considère le député péquiste Pascal Bérubé, qui avait interpellé la vice-première ministre Geneviève Guilbault à ce sujet, au printemps dernier.
Mme Guilbault, qui était alors ministre responsable de la Capitale-Nationale, avait écarté la possibilité de recourir à une loi spéciale pour exproprier RCR. Mieux valait convaincre l’exploitant du Mont-Sainte-Anne d’investir, plutôt que de se lancer dans une saga juridique coûteuse et interminable», avait alors laissé entendre la ministre.
Boulet «n'exclut rien»
Appelé à réagir, le ministre Jonatan Julien, qui a depuis succédé à Mme Guilbault, n’a pas voulu se mouiller, lundi.
«M. Julien est à l’extérieur du pays du 11 au 18 décembre. Il il ne fera pas de commentaires sur ce dossier. Je vous réfère au cabinet du ministre de l’Économie», a indiqué dans un courriel l’attachée de presse du ministre Julien, Mona Lechasseur.
Le cabinet du ministre de l’Économie a quant à lui assuré que «la priorité est la sécurité des skieurs du Mont-Sainte-Anne et la RBQ fait l’inspection nécessaire».
«À l’heure actuelle, on n’exclut rien quant à une enquête plus large», a indiqué pour sa part Maude Méthot-Faniel, au cabinet du ministre du Travail Jean Boulet, de qui relève la RBQ.
«On va faire les choses dans l’ordre, a continué l’attachée de presse. La RBQ poursuit son inspection et la gondole est toujours à l’arrêt. Notre priorité est la sécurité des utilisateurs et des travailleurs du Mont-Saint-Anne.»
Selon l’ex-ministre péquiste Agnès Maltais, plutôt que de mettre son pied à terre, le ministre Fitzgibbon est en train de se faire entourlouper par RCR.
«Ça fait deux fois que les gouvernements précédents obtiennent des engagements de RCR à mettre de l’argent dans la montagne, qu’il va la rénover, pis il ne s’est jamais rien fait», a relaté Mme Maltais sur QUB radio, lundi.
«Les problèmes de l’opérateur de cette station-là sont connus depuis un bout de temps. Le gouvernement a les moyens d’agir», a également rappelé Pascal Bérubé, en entrevue téléphonique.
Réputation entachée
«C'est aussi la réputation et la renommée de cette montagne-là, qui est emblématique, qui est en jeu, a souligné M. Bérubé. Le gouvernement du Québec était plus prompt à annoncer un Club Med dans Charlevoix qu'à prendre en main l’avenir du Mont-Sainte-Anne.»
Le député solidaire de Taschereau, Etienne Grandmont, s’en fait tout autant pour la réputation de la Capitale-Nationale comme destination touristique.
«Le Mont-Sainte-Anne appartient au gouvernement du Québec, c'est sa responsabilité de mettre au pas l'opérateur actuel de la montagne ou de l’exproprier pour en donner la gestion à une entreprise plus responsable, croit M. Grandmont. On n'en est pas au premier incident avec RCR, qui n’utilise la montagne que pour imprimer de l’argent au détriment de la sécurité des gens.»
Ce qu'ils ont dit
«Le Mont-Sainte-Anne appartient au gouvernement du Québec, c'est sa responsabilité de mettre au pas l'opérateur actuel de la montagne ou de l’exproprier pour en donner la gestion à une entreprise plus responsable. On n'en est pas au premier incident avec RCR, qui n’utilise la montagne que pour imprimer de l’argent au détriment de la sécurité des gens.»
– Etienne Grandmont, député solidaire de Taschereau
«C'est aussi la réputation et la renommée de cette montagne-là, qui est emblématique, qui est en jeu. Le gouvernement du Québec était plus prompt à annoncer un Club Med dans Charlevoix qu'à prendre en main l’avenir du Mont-Sainte-Anne.»
– Pascal Bérubé, député péquiste de Matane-Matapédia
«L’heure n’est plus à négocier pour forcer RCR à réinvestir dans la montagne. L’opérateur a démontré hors de tout doute son incapacité à assurer le développement du Mont-Sainte-Anne et, pire encore, la sécurité des usagers. Des intérêts québécois sont prêts à investir et à prendre le relais. Le gouvernement doit assumer ses responsabilités et agir.»
– Yvon Charest, président des Amis du Mont-Ste-Anne
«Nous ne pouvons plus faire confiance à RCR. Le gouvernement du Québec dispose de tous les leviers nécessaires pour forcer un changement d’opérateur au Mont-Sainte-Anne. Les événements de cette fin de semaine confirment qu’il y a urgence d’agir. Des gestes s’imposent maintenant.»
– Agnès Maltais, ex-députée de Taschereau et ex-ministre de la Capitale-Nationale