Le caribou est partout à la COP15
Les Autochtones qui assistent à son déclin sonnent l’alarme et attendent des mesures du gouvernement
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Aucun animal n’a reçu autant d’attention que le caribou pendant la COP15, notamment grâce aux communautés autochtones. Pourtant, les annonces du gouvernement pour son rétablissement se font attendre.
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« Les efforts de restauration de l’habitat du caribou vont prendre des décennies. Mais notre communauté se dit qu’on ne peut pas baisser les bras maintenant, parce que sinon, c’en est fini de lui », témoigne Marc St-Onge, coordonnateur au développement du territoire d’Essipit, sur la Côte-Nord.
Partout au Québec, la population des hardes de caribous forestiers, migrateurs et montagnards est en déclin, victime collatérale de l’industrie forestière, des prédateurs qui utilisent ses chemins, et des changements climatiques.
Le sujet a d’ailleurs fait l’objet de multiples interventions senties et de conférences pendant la Convention sur la biodiversité biologique, qui se tient à Montréal jusqu’à lundi prochain.
« Il faut passer le message de reconnaître les efforts des communautés autochtones et innues à la COP15 », estime M. St-Onge, dont la communauté se prive de chasser l’animal depuis 1997.
Douloureuse disparition
Lors de la cérémonie d’ouverture, François Legault a bien annoncé son intention « d’appuyer le leadership autochtone dans la conservation de la biodiversité », entre autres par la création d’aires protégées d’initiative autochtone.
Mais il n’a pas eu un mot pour le cervidé qui figure sur les pièces de 25 cents.
Le cabinet du ministre de l’Environnement nous a confirmé pour sa part que la publication d’un nouveau plan de rétablissement du caribou forestier était toujours prévue pour juin 2023.
Mais en attendant des mesures fortes pour protéger la survie du caribou, les Innus souffrent de le voir disparaître petit à petit.
« C’est comme une attaque directe aux droits autochtones. Il n’y a pas d’Innu sans le caribou. Il a toujours fait partie de notre vie spirituelle, alimentaire, matérielle », rappelle Melissa Mollen Dupuis, responsable du projet Boréal de la Fondation David Suzuki et originaire d’Ekuatnitshit (Mingan), sur la Côte-Nord.
Celle qui a toujours voulu transmettre sa culture ancestrale à ses enfants de 5 et 7 ans n’a jamais pu leur faire goûter la viande d’atik (caribou, en innu).
« Nous, on se contrôle quand on sait que la biodiversité a besoin de se reposer, mais on se bat contre des intérêts [économiques] qui n’ont pas besoin d’aller à la chasse », déplore-t-elle.
« Sauvez-nous »
Le caribou est aussi une espèce qui fait office de canari dans la mine.
« Le jour où on sera capable de maintenir l’habitat du caribou forestier en conciliation avec l’exploitation forestière, on pourra dire qu’on fait une saine gestion de la forêt », illustre l’ingénieure forestière Marie-Hélène Rousseau, employée par le Conseil des Innus de Pessamit.
Pour Jean-Luc Kanapé, il était particulièrement important de faire valoir les intérêts des caribous à la COP15, puisqu’ils ne peuvent le faire par eux-mêmes.
« S’ils avaient une chose à nous dire aujourd’hui, ce serait sûrement “sauvez-nous” », laisse tomber à regret l’Innu originaire de Pessamit, qui prenait la parole dans un panel sur des initiatives autochtones de conservation.